Ils ne sont ni fous et encore moins "jihadistes" !
Ce sont des voyous sans foi ni loi, mercenaires pour le compte du plus offrant !
Il faut que ceux qui en parlent (intellectuels, journalistes, analystes ... ), cessent de les glorifier du titre de "Jihadiste" !!
R.B
Ce sont des voyous sans foi ni loi, mercenaires pour le compte du plus offrant !
Il faut que ceux qui en parlent (intellectuels, journalistes, analystes ... ), cessent de les glorifier du titre de "Jihadiste" !!
R.B
Peut-on dresser un portrait
psychologique des jihadistes, qui combattent au nom de leur religion ? Sont-ils
pleinement conscients de leurs actes ? Francetv info a interrogé
Jean-Michel Hirt, psychanalyste et auteur de l'essai "Le Voyageur nocturne
: lire à l'infini le Coran".
Ils décapitent leurs ennemis,
pillent les villages, violent des femmes et font régner la charia dans la
terreur, un fusil à la main. Les membres de l'organisation Etat islamique sont
en guerre au nom d'Allah. Une guerre idéologique dont les actions, d'une
violence rare, horrifient la communauté internationale.
Les quelques témoignages de
proches d'apprentis jihadistes évoquent leur isolement, leur embrigadement, une
forme de déconnexion avec la réalité. Peut-on brosser un portrait psychologique
de ces fous de Dieu, qui combattent et massacrent des populations au nom de
leur religion ? Sont-ils pleinement conscients de leurs actes ?
Francetv info a interrogé Jean-Michel Hirt, psychanalyste et auteur des
essais Le Voyageur nocturne : lire à l'infini le Coran(Bayard)
et Paul, l'apôtre qui "respirait le crime" (Actes
Sud).
Ariane Nicolas : Le
fanatisme religieux est-il un champ exploré par la psychologie ?
Jean-Michel Hirt : Non, pas à proprement parler. Bien sûr, il
existe des travaux sur la religion qui sont fondamentaux, comme ceux de Freud (L'Avenir
d'une illusion, L'Homme Moïse et la religion monothéiste), mais le
phénomène religieux reste trop peu exploré par les psychanalystes
ensuite. Il y a même eu une époque où, en France, il était presque
scandaleux pour un analyste de s'intéresser de façon ouverte au religieux.
C’était une affaire classée, on était naturellement athée puisqu’analyste,
et la messe était dite, alors que personne aujourd’hui ne peut plus
ignorer la religiosité du psychisme, c’est-à-dire la répression du
pulsionnel par le religieux ou son inverse : le pulsionnel mettant à
son service le religieux pour se déchaîner.
On a pu s'imaginer, par
exemple, que les pays arabes allaient connaître une évolution comparable à
la nôtre, vers la sécularisation, grâce au nationalisme panarabe. On s'est fait
de grosses illusions en prenant nos désirs laïcs pour la réalité.
Aujourd'hui, il y a urgence à revenir là-dessus, à approfondir les
analyses des grandes religions.
Ariane Nicolas : Le déchaînement de violence
de l'EI est-il une forme de folie ?
Jean-Michel Hirt : Un jihadiste n'est pas un
"fou", pour peu que ce terme ait un sens. Le "fou", c'est
un individu seul, qui est seul dans son monde et qui n'arrive pas à faire
partager son monde aux autres. Précisément, les combattants de l'Etat
islamique, ce sont des gens qui ne sont pas seuls. Ils sont en groupe, ils se
reconnaissent dans un ensemble de références et ils luttent en
se servant de la mise en commun de leurs savoirs pour imposer leur
tyrannie.
Ces jihadistes ne sont pas
très différents de vous et moi. lls souffrent de toutes les pathologies que
nous connaissons dans la société : certains sont très névrosés, d'autres
délirent, d'autres sont psychotiques ou suicidaires. Ils tentent de résoudre
des difficultés psychiques par des comportements dangereux à la fois pour eux
et pour les autres. Pour parler en termes freudiens, chez eux, le conflit entre
Eros (la pulsion de vie) et Tanathos (la pulsion de mort) tourne à l'avantage
du dernier. Puisque Tanathos a l'ascendant, alors Eros se met à son service.
Mais encore une fois, il s'agit juste d'une régression qui n'est pas
irréversible. Saint Paul lui-même était un homme qui "respirait
le crime", disent les Actes des Apôtres, avant de se convertir sur le
chemin de Damas, de convertir ses pulsions de destruction pour se
mettre au service de la construction de la religion chrétienne.
Ariane Nicolas : S'ils ne sont pas fous,
comment expliquer ces actes qui nous horrifient ? On a l'impression que
commettre ces crimes ne les affecte pas, qu'ils le font avec une grande
légèreté…
Jean-Michel Hirt : Leur idéal mortifère a pris
toute la place dans leur personnalité. Comme tous les passages à l'acte,
les crimes que les jihadistes commettent se font dans une sorte d'aveuglement,
de sidération de la conscience. La plupart des individus qui se
retrouvent en prison pour avoir tué ont du mal à reconnaître ce qu'ils ont
fait.
Mais on sait, parce que la
guerre n'est pas une affaire nouvelle, combien les traumatismes peuvent se
révéler considérables, quand les individus en reviennent. Certains ne peuvent
plus continuer à vivre normalement et tombent malades. Tuer, ce n'est jamais
quelque chose qui se fait comme on avale un verre d'eau. Aucun criminel n'est à
l'aise dans sa culture et bien dans sa peau. Ce sont des individus qui
souffrent de profonds troubles psychiques qu'ils n'arrivent pas à résoudre
et qu’ils projettent violemment sur autrui.
Ariane Nicolas : Par quel
processus psychologique en sont-ils arrivés là ?
Jean-Michel Hirt : Tout commence par le refus de
l’altérité et de la différence. On refuse d'accepter ce que l'on ressent,
et qui nous dérange, et on accuse l'autre d'être responsable de la crise
ou de ce qui fait qu'on est mal dans sa peau. Ensuite, c'est la fuite en
avant. Tous les individus connaissent un conflit entre ce qu'ils sont et
ce qu'ils devraient être, ou ce que l'on attend d'eux. Or, le fanatique
n'accepte pas ses contradictions et déplace ce conflit hors de lui. Autrui
devient donc une cible. Il se dit : "Ce n'est pas moi
qui suis déchiré entre le bien et le mal, c'est l'autre. Donc, si je
supprime l'autre, ça ira mieux." C'est à la fois radical et
apparemment confortable, car l'individu semble avoir résolu son conflit
intérieur. Mais en fait, c'est une attitude très infantile.
Un adulte doit, au contraire,
parvenir à intérioriser et le mal et le bien, de façon complexe. Or, parce
que le fanatique religieux rejette le mal sur l'autre, il cherche par tous
les moyens à légitimer cette opération psychique, notamment en se faisant
l'ennemi de toute interprétation des textes sacrés auxquels il prétend
croire. C’est le ressort de tout fondamentalisme religieux, pratiquer une
lecture littérale de ses textes de référence. Plus de métaphore, plus de
double ou triple sens, les mots deviennent des mots d’ordre. Il n'y a pour
lui plus qu'un seul sens dans une parole d’Évangile ou un verset du Coran.
Tout est devenu injonction, comme si la religion relevait du code de la
route. "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens" est
le drapeau sanglant des fanatiques à travers les siècles, quand
la religiosité de leur psychisme se met au service de leurs pulsions
destructrices.
Ariane Nicolas : Des fanatiques s'en tiennent
aux prêches, d'autres prennent les armes. Que signifie ce passage à
l'acte ?
Jean-Michel Hirt : Le passage à l'acte constitue
une transgression supplémentaire, qui correspond à une tentative
désespérée de résoudre par la violence destructrice les conflits qui
habitent le fanatique. La conviction que "moi et ceux qui sont comme
moi représentent le bien" permet de donner libre cours à des pulsions
que nous avons tous en nous, mais avec lesquelles la plupart des gens
s’organisent de manière constructive. La question, aussi, c'est comment
la société dans laquelle on évolue, avec ses normes et ses valeurs, nous
incite à nous précipiter ou pas vers des actes destructeurs. En temps de
guerre, par exemple, la société nous autorise à tuer, pas en temps de
paix. Tout est réversible.
Ariane Nicolas : Que dire des femmes qui partent
en Syrie pour vivre selon la charia, mode de vie qui bafoue pourtant leurs
droits fondamentaux ?
Jean-Michel Hirt : Ces femmes s'imaginent qu'en
changeant radicalement de vie, elles vont connaître la paix intérieure, voire
le bonheur. Elles font ce pari, à partir de la façon dont elles
vivent difficilement leur histoire personnelle et les conflits psychiques
qui les traversent. Combien d'enfants se sont rebellés contre leurs
parents ? Aujourd'hui, une forme de cette révolte liée à
l'adolescence, à la misère sociale, à l’ignorance de la grandeur
culturelle de l’islam passe par cet engagement absurde et criminel. C'est
pourquoi certaines familles musulmanes ont besoin d'être aidées pour
permettre à leurs enfants de sortir de leurs impasses. Cela suppose une
mobilisation de toute la société, que l'islam ne soit plus ostracisé ou
caricaturé, que ses valeurs spirituelles et libératrices soient reconnues
et encouragées.
Ariane Nicolas : Vous citez l’Évangile comme
le Coran… Toutes les religions peuvent créer des sujets radicalisés ?
Jean-Michel Hirt : Tout à fait. Ce n'est pas la
religion qui suscite de la haine. Il n'y a que des gens qui instrumentalisent
des religions pour vivre leur haine. Même les bouddhistes se montrent parfois
violents. L'élément clé, c'est le contexte psycho-culturel. S'il vous garantit
que l'acte criminel que vous accomplissez est ce qu'il y a de mieux à faire,
vous en retirez un grand bénéfice psychique. La même chose se passe
dans la mafia, où le crime est perçu comme une initiation, un rite
d’appartenance pour des gens qui se trouvent exclus ou se vivent
comme rejetés par leur société.
Ariane Nicolas : Si vous receviez un jihadiste
en consultation, que lui diriez-vous ?
Jean-Michel Hirt : Je lui dirais qu'il est sauvé
! Que si quelqu'un fait cette démarche, c'est qu'il a déjà fait un bout de
chemin pour sortir de cette culture de mort. Cela signifierait que
les questions qui se posent à lui ne vont pas se résoudre par le passage à
l'acte, mais par la recherche de ce qui l'anime, par la connaissance de
son désir et de la façon dont il peut l’incarner. Sa réponse par le
langage et l’exploration de son monde interne sera pour lui plus
constructive.
Nous avons tous connu des
situations qui étaient très limites, parfois proches de la dépression
grave, du suicide ou même du crime, des situations propices au passage à
l'acte. Face à cela, beaucoup ont réussi à trouver dans le travail
psychanalytique la possibilité de s'en sortir autrement. Encore faut-il
trouver quelqu'un qui écoute, et qu'ils aient le courage d'être écoutés.
Il faut beaucoup se confronter à ses dieux et à ses démons intérieurs.
Ces jeunes qui se radicalisent
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