Les pères fondateurs de la Francophonie, étaient de grands hommes de l'Histoire contemporaine.
Ils ont compris qu'il faille aux peuples décolonisés, ne pas confondre la France et ses valeurs universelles, avec ses gouvernants qui ont trahi les principes de la Révolution française. Ce faisant, ils voulaient décomplexer leur peuple vis à vis de la France en faisant le distinguo entre la culture française et les gouvernants de la France.
Ils considéraient la langue française, comme un butin de guerre comme disait Kateb Yacine, comme l'avait été avant lui, celui des Arabes venus envahir l'Ifriqiya d'alors, actuelle Tunisie, pour y implanter l'islam et leur langue arabe.
Ces hommes sont :
- Leopold Sedar Senghor (Sénégal),
- Habib Bourguiba (Tunisie),
- Hamani Diori (Niger), et
- le prince Nordom Sihanouk (Cambodge) !
Malheureusement en Algérie comme en Tunisie, les complexés de l'Histoire, que sont les pan arabistes et les pan islamistes, n'ont toujours pas fini de digérer leur histoire ni tirer des leçons de ces doctrines néfastes qui ont fait le malheur de leur pays; le FLN poussant le populisme, jusqu'à faire de la colonisation son fonds de commerce en imputant les échecs de ses dirigeants à la France ... 60 ans après le départ des Français !
R.B
Kamel Daoud
Le français sans rancune
À Jerba s’est tenu le Sommet de la francophonie. L’Algérie, deuxième pays francophone après la France, n’y était pas présente, ne faisant pas partie de cette organisation. Encore plus radicale dans son déni, l’Algérie efface la langue française et la condamne au statut d’intrusion et de traîtrise. L’usage est de confondre cette langue qui enrichit le pays avec la blessure coloniale qui lui sert de prétexte et de fonds de commerce pour récuser son présent. Là où on devrait nourrir cette langue comme la sienne, lui ajouter d’autres idiomes du monde pour s’ouvrir, voilà que le procès du francophone s’élargit à la langue, à son usage, à ses usagers et même à sa graphie.
Dans ce pays, depuis peu, on se revendique même d’une adhésion nécessaire (et elle l’est) à l’anglophonie et à l’anglais des savoirs. Mais un anglais de rancune antifrançaise surtout, investi non du désir d’apprendre mais de contrer le français, non d’échanger mais de ne plus changer. On le fait comme on décida autrefois, dans les années 1970, de l’usage exclusif de l’arabe comme langue unique du pays : du jour au lendemain, dans la volonté sournoise de rejeter une partie des élites du pays, un lien au nord de la Méditerranée, une histoire commune, on prétendit vouloir parler arabe pour se prétendre Arabe. Et aujourd’hui, du jour au lendemain, on a décidé que les écoliers algériens n’apprendraient plus que l’anglais, mais en gardant à l’esprit la guerre imaginaire à la France, la haine de la France et du français, le culte d’une monstrueuse identité faite de dénis, de colères, de xénophobies.
C’est que cette rancune n’est pas seulement l’acte de ceux qui croient qu’enrichir un pays commence en l’appauvrissant, ni l’acte des islamistes qui ont réussi à faire se confondre Allah, la langue arabe et la guerre, mais il est aussi celui de francophones qui vont et viennent entre les deux rives, s’y nourrissent, y gagnent le pain et de la visibilité.
Pourquoi des francophones du « Sud », de l’Algérie entre autres, croient-ils devoir faire le procès de cette langue et éternellement se récuser et se justifier dans leurs pays ? Maîtriser la langue française, c’est en faire le procès pour apparaître plus patriote que ses prochains ? La raison encore une fois est ce culte perpétué, jusqu’au ridicule, de la guerre comme preuve de vie et de valeur : je fais la guerre au français pour (faire) croire que je fais la guerre à la France, et donc ma vie a ce sens puissant qu’il avait à l’époque pour mes libérateurs. Et, dans cet acte d’amputation et de mépris de soi, on s’appauvrit, on s’isole, on se meurt.
La langue française n’est pas la France, dans son passé, son déclin présumé ou son ego exacerbé. C’est une terre plus vaste que l’ensemble des pays qui la parlent, un usage du monde, une promesse de vivre mieux. Il faut guérir la langue française de la France (même si la formule abuse) mais aussi du souvenir entretenu chez les décolonisateurs imaginaires. Le français est une langue intime dans de nombreux pays, quoi qu’on dise. Elle raconte encore le monde et le peuple. Et si la France devient étroite par ses populismes, la francophonie y fera contrepoids. En Algérie, on s’appauvrit en croyant se libérer d’une langue, alors qu’il s’agit de la magnifier. Un écrivain algérien déclara aux premiers jours des indépendances que « le français est un butin de guerre ». Sentence désormais abusive : les guerres sont finies et ceux qui s’en recommandent sont inaptes à endosser le présent. Le français n’est plus un butin mais une parenté. Croire tuer cette langue, c’est surtout l’aveu d’un plus grand drame : on refuse de s’accepter, de s’assumer, de s’engager dans l’immédiat, de multiplier les outils de la compréhension et de la préhension.
On continuera à voir dans les sommets de la francophonie des parades ou des inefficacités, des dépenses ou des pensées pieuses, cela est vrai, cela est faux. Car la langue française n’a ni à incarner un pays, ni des rancunes. Et si l’Algérie est le plus grand pays francophone après la France, malgré ses nationalistes et ses islamistes, elle est aussi l’incarnation du mauvais usage d’une langue, et du monde, lorsqu’on les incrimine de ses propres défauts. K. D.»
Jean Pierre Ryf
RépondreSupprimerEt je regrette infiniment que l'Algérie n'ait pas conservé, développé cette langue avec en plus l'anglais sans doute. Je m'en désole, pas pour une "gloriole" pour la France mais pour l'Algérie elle-même.
D'ailleurs cette volonté de se séparer complétement de la France on la trouve aussi dans cette volonté d'adhérer au BRIKS comme si l'Algérie n'était pas avant tout méditerranéenne !
Tout cela me paraît relever d'un complexe que n'avait pas eu, par exemple Bourguiba en Tunisie, lequel a prononcé un magnifique discours pour justifier le maintient du français.