22 novembre 2011,
jour d'investiture de la première Constituante élue démocratiquement
à marquer d'une pierre blanche
Vous avez été élus à
l’Assemblée Constituante, au terme d’une période révolutionnaire et à la faveur
d’un scrutin historique qui a été à la fois transparent pour la première fois
de l’histoire de la Tunisie et qui a vu une participation magnifique qui montre
l’attachement des Tunisiens à la liberté de vote ; ce qui vous donne une
très grande légitimité. Une fois de plus les tunisiens auront étonné le monde
entier par l’engouement (plus de 90 % des inscrits) qu’ils ont manifesté pour
ces élections, après l’avoir étonné par leur révolte par laquelle ils ont
chassé leur dictateur.
Vous mesurez, je le
pense, le rôle historique que vous allez jouer et, du coup, la responsabilité
immense qui est la vôtre, à chacun d’entre vous, à l’égard du peuple Tunisien.
Au moment où vous allez rédiger ensemble la nouvelle Constitution du pays,
sachez que vos enfants vous regarderont agir et que vous aurez à leur rendre
des comptes. Essayez donc d’être à la hauteur des enjeux qui sont de donner à
vos enfants un pays qui leur permettra de s’épanouir et de progresser.
Je pense que
vous avez tous la volonté de faire le mieux pour votre pays et je voudrai
vous rappeler quelques règles simples qui devraient, selon moi, guider votre
action.
Il faut d’abord que vous
ayez conscience que vous n’allez pas, dans l’immédiat, agir sur la vie
politique au jour le jour mais que vous allez réfléchir et voter sur les règles
d’organisation des pouvoirs car ce sont ces règles qui ensuite permettront
d’organiser une vie politique riche et porteuse d’espoir.
Que veulent les
Tunisiens ? En faisant leur révolution et en chassant le dictateur, ils
ont adressé quelques demandes simples :
- Ils ont souhaité
d’abord la liberté. Ils ont dit qu’ils ne voulaient plus vivre dans la peur et
dans le silence.
- Ils ont ensuite dit
qu’ils voulaient éradiquer la corruption sous toutes ses formes et permettre
l’existence d’un véritable Etat de droit.
- Ils ont dit enfin
qu’il fallait mettre un terme au déséquilibre économique trop profond entre les
régions et entre les différentes classes sociales.
Je ne crois pas trahir
les aspirations du peuple tunisien en les résumant en ces trois demandes
essentielles.
A l'occasion de votre investiture, je voudrai vous dire que
pour parvenir à les satisfaire, la Constitution devra respecter un certain
nombre de principes essentiels :
- Si l’on veut que la
liberté réclamée par le peuple existe réellement, il faut que l’on ne passe pas
d’une dictature à l’autre. Or cela exige selon moi que la Constitution se
réfère expressément à la Déclaration Universelles des droits de l’homme qui
n’est pas réservée à l’Occident mais, comme son titre l’indique, à l’ensemble
des hommes.
- Si l’on veut éradiquer
la corruption et éviter qu’elle ne gangrène, à nouveau, la vie du pays ;
il faut que la Constitution organise une Justice indépendante, disposant de
réels pouvoirs et que, nul dans le pays, ne soit à l’abri de cette Justice.
- Enfin, la Constitution
devra organiser la vie des régions de manière à assurer un égal développement
pour chacune d’elle.
Voilà, me semble-t-il,
les principes qui devront guider vos choix. Vous devrez éviter les
compromissions, les demis mesures pour satisfaire chacun.
Soyez fermes sur ces
principes et le peuple Tunisien vous en sera reconnaissant.
Rachid Barnat
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