vendredi 26 août 2022

Les gouvernants feraient bien d'écouter le petit peuple ...

En Tunisie post révolution, il est réconfortant de voir que des gens modestes, souvent incultes, faire de la politique. On les imaginait tous manipulables par les partis populistes (islamiste & arabistes); et on découvre des fois, à les entendre, qu'ils ne manquent pas de clairvoyance pour dénoncer et condamner leur populisme et leur politique rétrograde pour le pays. 
R.B 

Khadija Moalla

Deux heures très instructives dans mon Hamam préféré.
Je viens de passer deux agréables heures au Hamam. Un hamam traditionnel très ancien comme je les aime. Depuis très longtemps, j’ai toujours été fascinée par cet endroit où la propreté est démocratisée. En effet, ne coûtant qu’1 Dinar de se laver, (3.800 D aujourd’hui), toutes les couches sociales se mêlent d’une manière égale et transparente.
A l’intérieur, vêtues simplement de culotte, il est difficile de deviner la position de chaque femme et vous verrez se laver une PDG de société avec une ouvrière, agricultrice ou une femme au foyer. Il est vrai que quelques femmes essayent de tricher en exhibant un shampoing ou un drap de bain relativement cher, mais cela n’impressionne personne!
A côté de la magie de cet endroit, s’il y a un travail féminin qui m’a toujours impressionnée, c’est celui de « Harza ». Ces femmes sont admirables car elles font un travail très fatigant que j’avoue être incapable de faire ! Ce travail demande beaucoup de générosité car une Harza passe plus de 30 minutes à s’acharner à vous rendre la plus propre possible, à la sueur de ses bras, pour la modique somme de 3 dinars (un peu plus, en fonction du pourboire que les clientes veulent bien lui donner).
Chaque moment passé avec la Harza (DM) qui s’occupe de moi, est des plus intéressants. En effet, DM a le génie de faire des analyses de la situation politique, économique et sociale à partir d’une perspective que je trouve beaucoup plus proche de la réalité que celle de beaucoup d’analystes politiques qui se produisent sur nos medias. De plus, DM a un sens de l’humour extraordinaire qu’elle parfume avec un vocabulaire assez corsé et cocasse parfois ! Elle adore parler fort, en gesticulant dans tous les sens, telle une actrice dans une pièce de théâtre de Klem Ellil !
D’une voix grave et qu’elle voulait solennelle, elle me dit : « Il nous faut une nouvelle révolution ! » Ah oui, et pourquoi lui demandais-je d’une voix naïve ? « Cela ne peut plus durer ! Nous n’en pouvons plus ! On l’aurait déjà faite s’ils avaient commis la bêtise de déclarer une année scolaire blanche ! Vous imaginez combien nous dépensons pour les cours particuliers, presque tout notre revenu ! Non… non, cela ne peut plus durer ! ».
Alors je lui dis : Imaginez que vous soyez la Présidente de la République, qu’est-ce que vous feriez ?

D’une voix pleine d’enthousiasme et une joie qu’elle avait du mal à cacher : « J’enfermerai tous les Khwanjiah … (pour les oreilles chastes, je ne répéterai pas tous les adjectifs dont elle les a qualifiés) ! Tous en prison, ces voleurs qui ont vidé les caisses de l’Etat à leur sortie de prison, sous prétexte qu’ils voulaient être dédommagés. Et puis quoi encore ? !!! S’ils croient que ma génération pourra oublier Bab Souika ou Sliman … ils se foutent le doigt dans … !
De plus, ils prétendent que ceux qui appartiennent à Daech ne sont pas revenus au pays … (encore quelques mots corsés). Ils mentent ! Je connais ceux qui sont partis de notre patelin, ils sont revenus arrogants et mal élevés comme toujours ! ».

« Vous savez, me confit-elle, un jour, l’un d’eux m’a accostée dans la rue et m’a dit que je devais mettre un Niqab » ! « Alors, continua elle, j’ai enlevé ma chlaka et je l’ai menacé, que s’il osait venir m’importuner une nouvelle fois, je lui donnerai la pire raclée que sa mère ne lui a jamais donnée car si elle l’avait fait, elle lui aurait appris qu’on ne devait jamais manquer de respect aux dames ! Il ne s’est plus approché de moi ! ».
Puis elle continua à m’expliquer toutes les mesures qu’elle prendrait en tant que Présidente de la République. Egoïstement, je vais les garder pour moi, qui sait, j’en aurais peut-être besoin un jour ! Hahaha !

Ce qui est sûr, c’est que DM restera toujours ma conseillère proche afin que je n’arrête jamais d’écouter la voix du peuple et que je ne commette pas la bêtise de m’enfermer dans ma tour d’ivoire avec rien que des bouffons ridicules qui me repéraient chaque jour que la situation est au mieux dans le meilleur des mondes, madame la Marquise !

dimanche 21 août 2022

Sunnisme et chiisme

Le sunnisme et le chiisme sont les deux branches principales de la religion musulmane. Leur origine remonte à la mort de Mouhammad et au problème de sa succession.

Les sunnites reconnaissent les trois premiers califes (terme qui signifie « successeurs ») tandis que les chiites ne reconnaissent comme légitimes que le quatrième calife, Ali, cousin et gendre de Mouhammad met et ses successeurs. 

À l'époque ottomane et jusqu'à l'abolition du califat en 1924 par Mustapha Kemal dit Atatürk, le sultan, chef politique de l'empire ottoman, assumait également le titre de calife, commandeur des croyants reconnu par les sunnites. 

Les sunnites représentent 90 % des musulmans actuels. Ils sont majoritaires dans de nombreux pays à l'intérieur de ce qu'on appelle le monde musulman. 

Les chiites sont majoritaires en Irak et en Iran où c'est la religion officielle. Une minorité chiite est également présente dans plusieurs pays à majorité sunnite comme la Syrie ou le Liban. 

Le sunnisme et le chiisme comportent un très grand nombre de points communs et peu de différences :

- Ils reconnaissent le Coran comme livre saint, 

- Mouhammad comme seul prophète, la révélation comme fondement de la foi,

- et leur pratique religieuse repose sur les cinq piliers de l'Islam :

° la profession de foi,

° la prière,

° l’aumône,

° le jeûne du Ramadan, et 

° le pèlerinage à La Mecque. Cette ville, comme Médine et Jérusalem, est une ville sainte commune aux deux branches. Certains lieux saints sont toutefois propres au chiisme comme Kerbala et Nadjaf en Irak.

Sunnisme et chiisme comportent tous les deux une tradition messianique :

- fondée sur l'attente du retour de l'imam caché pour le chiisme et

- sur celle du Mahdi pour le sunnisme.

Ces deux branches principales de l’islam sont chacune divisées en plusieurs écoles de pensée :

- Le sunnisme se divise en quatre écoles de pensée principales : 

° l'école hanafite laisse une relative liberté d'interprétation, 

° l'école malikite présente en Afrique du Nord insiste sur le respect du Coran et des hadith (recueil des paroles de Mouhammad), 

° l'école chaféite permet le consensus entre juristes sur la base du Coran comme référence, et

° l'école hanbalite fondée sur une lecture littérale et rigoriste du Coran, que l'on retrouve en Arabie et au Qatar.

- Le chiisme reconnaît, outre les enseignements de Mouhammad, ceux de sa fille Fatima et des douze imams. L'imam a un rôle de guide spirituel dans la communauté en tant qu'« ami d' Allah ». On peut repérer trois principales écoles de pensées dans le chiisme : 

° le chiisme duodécimain à forte teneur messianique qui attend le retour de l'imam caché avant la Fin des temps, 

° le zaydisme qui ne reconnaît que les cinq premiers imams, et 

° l'ismaïlisme à forte teneur ésotérique.

Les différences théologiques entre sunnisme et chiisme ont pu être instrumentalisées dans le cadre de conflits au Proche et au Moyen-Orient, même si bien souvent elles se superposent à d’autres motivations d’affrontement entremêlées.

Quant à l'islamisme et à son corollaire le terrorisme, il peut se développer au sein du sunnisme comme dans celui du chiisme; puisque dans les deux cas il s'agit du wahhabisme dont s'inspirent les islamistes des deux bords. Ce qu'avait fait Khomeiny pour faire sa révolution islamiste en Iran et prendre le pouvoir en chassant le Shah Reza Pahlavi !

 




samedi 20 août 2022

Salman Rushdie victime des islamistes et de la lâcheté d'un Occident frileux à combattre l'islamisme ...



" Qui ne peut attaquer le raisonnement, attaque le raisonneur. "
Paul Valéry

Sylvain Fort *

Nous n’avons pas été dignes de Salman Rushdie

Face à la fatwa, Rushdie est resté Rushdie. Tandis qu’il ne cédait pas un pouce de terrain devant l’inadmissible, nos sociétés capitulaient.

En cet été 2022, les vastes incendies qui ravagent les forêts françaises nous offrent la triste occasion de réapprendre ce que les sapeurs-pompiers nomment un feu de tourbe. Apparemment éteint en surface, le feu de tourbe se propage souterrainement en consumant les couches profondes de feuillages en décomposition, pour resurgir parfois plus de cent mètres plus loin et embraser comme par surprise, des jours, des semaines, des mois plus tard, d’autres lieux jusque-là préservés. Telle est la fatwâ lancée contre Salman Rushdie : un incendie destructeur dont la résipiscence apparente aura brûlé le sol en profondeur, jusqu’à ce funeste 12 août 2022, à New York. 


Parce qu’il avait mis tout son courage à reconquérir un semblant de normalité, et à rester l’écrivain qu’il avait tant aspiré à devenir, Salman Rushdie aura pu croire que la violence s’était calmée, que le pire n’arriverait plus. Je ne crois pas qu’il se soit trompé. Je ne crois pas qu’il ait donné dans le déni. Tenir à distance la fatwâ, poursuivre son œuvre, vivre : telle est l’expression la plus haute de son combat contre la terreur et la mort, et telle est sa suprême élégance. Telle aura été, aussi, sa victoire. Car plus personne avec le temps ne s’est avisé, comme trop d’intellectuels et de politiques occidentaux, de voir en lui un opportuniste ou un pyromane : son statut de symbole de la lutte contre l’obscurantisme islamiste et contre le fanatisme religieux lui était acquis, pour ainsi dire unanimement chez les gens dotés de conscience. 


Ce que nous ne mesurions pas, c’est que le feu gagnait. C’est que l’étincelle semée voici trente-trois ans dans les esprits, prospérait de proche en proche, jusque dans la cervelle de jeunes gens qui de Rushdie n’avaient pas lu une ligne, et qui n’avaient pas même eu à vivre sous le régime des mollahs. 


Cette fatwâ qui fut en 1989 un geste politique lancé par un Ayatollah moribond pour recoller les morceaux d’un islam désuni est devenue en 2022 un fait culturel voire civilisationnel rassemblant par-delà les frontières tous les tenants d’un islam devenu identitaire voire terroriste. Rushdie est resté Rushdie. Sa grandeur aura été de survivre à tout cela et de persévérer dans sa vocation et dans son être. Mais la fatwâ qui le visait a changé de face. Elle n’est plus seulement l’expression d’une intolérance bigote dont déjà en 1989 la doctrine était formée, mais le signe de reconnaissance de millions d’âmes perdues qui partout et pour tout cherchent vengeance, sang, boucs émissaires. 


Alors que Rushdie ne cédait pas un pouce de terrain pendant les trente-trois années écoulées, nos sociétés, par pans entiers, capitulaient devant l’inadmissible. C’est-à-dire devant les prédicateurs de haine, les prédateurs de la terreur, les doctrinaires de la foi qui, jour après jour, imposaient à notre laïcité française ou à un certain équilibre social le venin de leurs exigences indues et le trouble jeu victimaire ralliant à eux les complaisants et les carriéristes qui flairaient là un fonds de commerce, et trouvèrent juste de brandir comme des étendards révolutionnaires des linceuls tachés de sang.


Il faut bien le dire : nous n’avons pas été dignes du combat de Salman Rushdie. Nous n’avons pas tout compris de ce combat. Nous n’avons pas saisi qu’il ne serait jamais terminé. Nous n’avons pas mesuré son ampleur ni sa nécessité. Je le dis posément, excluant absolument de ce triste constat les compagnons de route de l’écrivain qui n’ont jamais cessé de se tenir à ses côtés, et de clamer dans le désert. 


Le désert, en vérité, a cru. J’en veux pour preuve les messages de soutien adressés à l’écrivain par toutes sortes de personnalités bien intentionnées. Je ne parle même pas de ceux qui n’ont pas su nommer l’islamisme comme cause première du geste assassin, ni ceux qui ont cru approprié de parler des Versets sataniques comme d’un livre « controversé » (sic). Peu importe ces amoureux du pire. Non, je parle de ceux qui ont pris position au nom de la « liberté d’expression », de tous ceux qui ont vu dans la tentative d’assassinat de Salman Rushdie une réédition glaçante de l’attentat de Charlie-Hebdo.


Or, il faut quand même le dire, ce n’est pas du tout de liberté d’expression qu’il s’agit là.


Cela supposerait que Rushdie se serait aventuré à tenir sur l’islam des propos injurieux, mensongers, ou même simplement ironiques : alors oui ce serait sa parfaite liberté et c’est au nom de la liberté d’expression qu’il faudrait le défendre. 


En vérité, Les Versets sataniques ne sont ni injurieux, ni mensongers, ni ironiques. C’est un roman tout enveloppé de fiction, de songeries, de divagations méditatives. C’est une œuvre littéraire de plein droit, recourant aux légendes et aux textes sacrés pour promener sur la croyance des hommes un regard singulier, dans une langue lyrique, chargée de poésie presque naïve, démarquée entre autres des épopées indiennes. On n’y aperçoit rien qui doive s’abriter derrière la défense de la liberté d’expression pour éviter les bigots et les dogmatiques. La liberté du conte et la poésie du mythe ne devraient pas avoir à rendre compte devant une chambre de justice. Or, un peu lourdement, c’est quand même sous ce régime qu’avec les meilleures intentions du monde, nous plaçons Salman Rushdie et son œuvre. Autrement dit, nous plaçons le meilleur de la littérature sous l’ombrelle plus ou moins rassurante d’un article de loi et sous le ressort des tribunaux.


C’est bien là que nous ne sommes pas dignes de Rushdie : nous ne l’avons pas assez lu. Nous n’avons peut-être pas pris la peine de dire aux fanatiques : non seulement nous protégeons la liberté d’expression lorsqu’elle semble s’en prendre aux religions, non seulement nous reconnaissons un droit au blasphème, mais, a fortiori, nous reconnaissons une liberté de création, une liberté d’invention, une liberté d’imagination qui sont l’ordre supérieur de la vie de l’esprit ; qui ne sont pas seulement ce que nous brandissons devant les abus des doctrinaires, mais sont la sève même de notre civilisation et de notre être. Et nous ne voulons pas avoir à demander pardon ou convoquer un avocat à chaque fois que cette imagination, cette fantaisie, cette poésie prennent leur envol. Car c’est bien cela qu’il s’agit, en Salman Rushdie, d’atteindre : il s’agit d’intimider quiconque prendra la plume même sans aucune intention blasphématoire, même sans avoir aucunement la controverse en tête, mais simplement le désir de dire et de raconter ce vers quoi son inspiration le porte.


Nous n’avons pas été dignes de Salman Rushdie parce qu’au fond depuis trente-trois ans le règne de cette simple liberté de raconter s’est considérablement restreint sous l’effet de mises en cause religieuses, simili-religieuses, idéologiques. Qu’aujourd’hui les bibliothèques d’universités anglaises ou américaines retirent de leurs programmes et de leurs rayonnages des livres supposés heurter la sensibilité de tel ou tel groupe atteste que le règne de la terreur n’a fait que grandir, sans qu’il soit besoin pour cela de convoquer les mollahs. 


Le feu de tourbe qui a frappé Salman Rushdie le 12 août est frère de ce feu des autodafés qui reprennent jusqu’en Europe. 


N’est-il pas alors temps de sortir de cette torpeur et de cette complaisance ? N’est-il pas temps de retrouver ce qui nous fait vraiment et nous permet d’échapper à cette espèce de terreur dont nous faisons nous-mêmes, par paresse, croître la puissance ? 


Pour cela, il faudrait que nos sociétés percluses de technologies et de pacotille médiatique retrouvent le chemin des livres : ceux qu’on lit seul, à part, dans le simple dialogue entre sa conscience et l’esprit de l’auteur. Ceux qui parlent aussi des autres livres, de l’ensemble de ces livres parvenus jusqu’à nous et qui ont forgé notre regard. Tout cela dans la gratuité pure de l’imagination. C’est ce qu’a fait Rushdie avec son merveilleux Quichotte, repassant à son propre tamis le roman de Cervantès, enrichi des alluvions de Borges, Aragon, Bellow, Nabokov… Lire, lire encore pour échapper au tourment des terreurs faciles et de la peur-réflexe. 


Et puis, ne pas réduire l’insolence ni l’audace au courage du blasphème. L’obscurantisme religieux et le fanatisme sont les cibles de choix des consciences libres. Il faut que la critique la plus verte reste possible. Mais tant d’autres sujets mériteraient la même dose de sel sur la plaie : la comédie politique, les conventions médiocres du monde économique, les nouvelles modes du prêt-à-penser… De cela, Rushdie nous a livré plus d’une fois la clef, faisant le choix de l’humour et du rire face aux puissances sombres qui tentaient d’avoir raison de lui. 


Une des manifestations les plus hilarantes de cette liberté du courage, de cette insolence parfaite, n’est peut-être pas dans ses livres, mais dans une série où, le temps d’un épisode, il joue son propre rôle. La série écrite et jouée par l’inénarrable Larry David s’intitule Curb your enthusiasm, et fut diffusée par HBO. La saison 9 tourne autour d’un projet de comédie musicale de Larry David intitulé : Fatwâ. L’intrigue reprend l’affaire Rushdie pour en faire un « musical » de Broadway. F. Murray Abraham chante et joue l’ayatollah Khomeiny et Lin-Manuel Miranda incarne Rushdie. 


Évidemment, cette riche idée vaut à Larry David d’être à son tour frappé par une fatwâ. Réfugié dans un hôtel, grimé, il se décide à prendre conseil auprès d’un écrivain qui est passé par là : Salman Rushdie. C’est alors que Rushdie lui enseigne une vertu méconnue de la fatwa : cela fait de vous un homme dangereux, très attirant pour les femmes. Il faut bien dire, dit Rushdie avec le plus grand sérieux, que rien n’est meilleur que le « fatwâ sex » ! Est-ce blasphématoire cela ? Non, c’est simplement d’une folle insolence, d’un humour décapant, qui démystifie mieux que n’importe quel traité philosophique. La leçon vient de Salman Rushdie, qui ajoute à propos de sa fatwa à lui : « it’s here, but fuck it » (c’est là, mais on s’en fout). Et c’est bien cela le comble de la liberté : se donner le droit de vivre, rêver, parler, imaginer, faire l’amour, et donc, au fond, de se foutre des conventions et des postures qui emprisonnent les esprits. 


Il n’y a aucun sens, même métaphorique, à assigner au geste purement nihiliste (et rémunéré : 4 millions de dollars !) perpétré contre Salman Rushdie. Puisse-t-il seulement nous rendre cette conscience que notre liberté n’est pas là pour toujours et que nous en faisons un usage par trop modeste. Qu’il importe d’en recouvrer l’insolence et la force. Que littérature n’est pas seulement une question d’ « expression » mais est notre imprescriptible, notre transcendance, notre demeure, le lieu où nous inventons qui nous sommes. Que nous n’avons pas trouvé tellement mieux pour féconder les âmes que lire des livres et en écrire. Surtout s’ils sont de Salman Rushdie. 



* Conseiller d'Emmanuel Macron

Bel abîme ...

... ou l'effet d'une révolution confisquée par les islamistes jusqu'à transformer un pays pacifiste en pays exportateur de terroristes et son peuple en totale régression, à reproduire la violence de ses nouveaux gouvernants; jusqu'à s'en prendre aux chiens, victimes collatérales de cette fumeuse révolution. 

Un livre bouleversant de vérité. Un livre qui exprime toutes les colères des déçus de la "revolution du jasmin" du sinistre "printemps arabe" ourdi par le Qatar avec l'accord des EU & de l'UE ! 

 R.B 


Par Kaouther Khlifi

Il est des lectures qui invitent à l’apaisement. D’autres au vagabondage. D’autres encore à la distance.

«Bel abîme», lui, est un texte qui te fait te rencontrer avec quelque chose que tu connais très bien mais pour lequel tu n’as jamais été en mesure d’avoir les mots justes. Ou pas dans le bon ordre. Ou pas avec la causticité nécessaire. Tu lis et les mots piquent à ta chair, point après point. Tapissent ton intérieur, comme une doublure un vêtement. Le contact au texte est intime, physique. Fait mal au toi que tu es. Au toi que tu étais. Parce qu’un jour, toi aussi t’as voulu avoir un chien.

Le chien, lui, va pointer son nez à la page quarante-quatre. Sortir d’entre un carton d’emballage et un autre, éparpillés dans un de ces interminables chantiers qui balafrent le visage de nos rues.  Mais je ne vais pas en rajouter au hors-d’œuvre des poubelles entassées, des passages à niveau sans barrières, des marres de pisse et du mur vers lequel tout le monde va.

«Bel abîme», c’est l’histoire d’un adolescent tombé en amour pour un chiot à qui il va sauver la vie et, par là même, va voir la sienne se chambouler. D’un adolescent heurté à l’acerbité de l’affliction par les siens, indicible, socialement correcte, collectivement acquiescée. Indénonçable, parce qu’à la lisière de l’ingratitude et parce que ceux qui font ton bien font aussi ton mal.

L’hostilité (au chiot) est le leitmotiv du récit. Fortement portée par un père appliqué à donner au mariage le vrai sens du terme institution et qui fera de même avec la paternité. Un père qui a tellement bien carrelé le terreau de l’affect qu’aucune ébréchure ne le fera céder aux supplications du fils. Et en dépit du sursis accordé, le poignard ne tardera pas à se planter dans son dos.

La mère, elle, peine à faire tampon. Elle aussi est tenue en laisse, au dehors, sur le seuil. Fort probablement parce que la seule chose qu’on ne lui ait jamais inculquée, sa jeunesse durant, c’est la mécanique du devoir.

On n’ira pas jusqu’au meurtre du père. Mais le père ne pourra plus taper du poing sur la table. Et par le trou ouvert dans la chair de sa paume, la mise en abyme d’une succession d’autres mains qui ne se sont jamais tendues ou qui n’ont connu les joues de leurs enfants que par la gifle. 

Puis, du familial au sociétal, du sociétal au politique, la perspective est très vite dessinée. Explicite. Les cercles concentriques se reproduisent les uns des autres, “on n’y échappe pas”. En ce moment, certes, nous sommes tous très politiquement inflammables. Tous arrêtés sur le même constat selon lequel “les gouvernants ressemblent de plus en plus aux gouvernés”.

Yamen Manaï a écrit «Bel abîme» en sept jours. En monologue. Parce que la colère est sourde et qu’elle a ses délais. Parce qu’aucun éjecta ne supporte l’attente. Parce que dans le répit, on édulcorerait les mots, on tournerait sept fois sa langue dans sa bouche. On laisserait tomber le scalpel.

Yamen Manaï a quarante et un ans. Il vit et travaille à Paris.  Il est également l’auteur de «La Marche de l’incertitude» (Elyzad 2010-Comar d’or, Prix lycéen “Coup de cœur de coup de soleil”), de «l’Amas ardent» (Elyzad 2017-Comar d’or, Prix des cinq continents de la francophonie, Grand prix du roman métis, Prix du livre Lorientales et de «La sérénade d’Ibrahim Santos» (Elyzad 2011-Prix Alain-Fournier).


mercredi 17 août 2022

Les Silencieux ou quand le wahhabisme prépare la naissance des jihadistes...

Des intellectuels Français commencent à comprendre le mode de fonctionnement de l'islamisme et de son corollaire le terrorisme, tel que le pratiquent méthodiquement les Frères musulmans en Occident et en France en particulier ; ce que Gilles Kepel appelle le "jihadisme d'atmosphère" et qu'Eric Delbecque appelle "Les silencieux", pour dénoncer l'imprégnation des esprits par le wahhabisme envahissant qu'exportent les pétromonarques en France. 

Le salafisme terme utilisé par ces intellectuels, comme par les journalistes et les hommes politiques, prête à confusion de vouloir stigmatiser les islamistes/terroristes par ce générique qui englobe toutes les écoles/obédiences du monde musulman sunnite qui font toutes référence au "salafs" les prédécesseurs que sont Mohamed et ses compagnons; alors qu'il s'agit bien du wahhabisme cette dernière née des obédiences sunnites la plus dangereuse et la plus obscurantiste; puisque son fondateur Mohamed Abdel Wahhab fait une lecture littéraliste du Coran et se réfère uniquement à la chariaa promulguées par les 4 premiers califes de l'islam que sont les compagnons du Messager Mohamed; l'exégèse ayant été close avec eux, selon ce fou d'Allah ! 

Or comme dit Albert Camus : « Mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde ». Et l'objet en l'occurrence, c'est bel et bien le wahhabisme !

R.B


Dans son livre « Les silencieux », Eric Delbecquela alerte sur la menace terroriste qui pèse sur la France. Il invite à ne pas rester focaliser sur les terroristes afin de prendre la mesure de l’ampleur du problème. Il propose d’« ouvrir les yeux » sur le « danger » que représente les islamistes « qui préparent chez nous la naissance des jihadistes ». Car, derrière le terrorisme l’auteur met en exergue, un mouvement plus silencieux, tel celui que l’on installe au bout d’un revolver, le wahhabisme qui « tout à la fois facilite le basculement dans la violence et encourage l’engagement dans un militantisme "pacifique" visant à abattre l’architecture républicaine française ».

L’auteur ne manque pas de mettre à mal la notion de "Loup solitaire" car un milieu est là pour préparer le passage à l’acte. Et appelle « à assumer d’exposer clairement ce qui se joue en ce moment même, à savoir un combat se livrant à l’intérieur même de l’islam entre les partisans de l’interprétation et les intégristes ». 

L’auteur est expert en sécurité intérieure. Il fut responsable de la sécurité de Charlie Hebdo après l’attentat de 2015. Il a enseigné entre autres à Sciences Po, à l’ENA et à l’Institut national des hautes études de la Défense Nationale. 

Eric Delbecque dénonce des polémiques stériles : « Notre problème ne se situe pas au niveau des Services en matière de lutte contre le terrorisme islamiste, tant au niveau de l’anticipation que du pilotage de crise ».

L’analyse de l’auteur est d’autant plus forte que la construction de l’ouvrage est rigoureuse, étayée, nourrie de nombreuses références. Il invite à découvrir la "pyramide islamiste". 

- Sa première branche, "quiétiste" dont les adeptes sont « investis d’une mission morale d’insufflation d’une authentique conscience islamique ». Elle rejette, théoriquement, tout engagement politique. 

- La deuxième branche, le salafisme politique, prône pour sa part la conquête du pouvoir; et enfin 

- Le troisième courant, est le salafisme jihadiste. 

« D’une manière ou d’une autre, l’Arabie Saoudite est le promoteur et animateur axial du salafisme », indique l’auteur qui met en garde : « Le salafisme quiétiste prépare, mécaniquement, le terrain pour le jihadisme salafiste ». 

Puis, il revient sur l’histoire, l’idéologie des Frères Musulmans. Il parle d’un système qui veut « proposer l’islam politique comme idéal de gouvernance des pays arabes, puis de l’intégralité du globe. L’ennemi héréditaire qu’ils définissent eux-mêmes, c’est la laïcité et nos sociétés ouvertes ». 

La critique du concept d’islamophobie est sans appel tout en précisant : « Il ne s’agit pas de nier que des actes ou violences antimusulmanes existent : les Ministères de l’Intérieur et de la Justice documentent cette réalité avec régularité ».

Pour Eric Delbecque, « reconquérir la spiritualité du Coran, voilà qui forme un bel objectif pour un islam français. Dès lors, l’ambition qui se dévoile facilement consiste à faire reculer les interprétations littéralistes d’un message religieux qui n’a plus vocation à déterminer un modèle politique. La source du problème ne réside pas dans le Coran, mais dans ceux qui s’en servent comme d’une arme pour affaiblir la République ». 

Face à la menace salafiste l’essayiste plaide en faveur d’une société de vigilance qui, précise-t-il immédiatement, « vise à éviter la société de surveillance ». « Nous ne viendrons définitivement à bout des terroristes qu’en retissant l’unité nationale autour du refus des extrémistes », affirme-t-il. Et de nous prévenir nous devons accepter de vivre dans « des sociétés vulnérables ». « C’est la contrepartie des libertés dont nous jouissons en république ».

L’auteur incite à nous interroger sur les racines du mal, à nous demander ce que nous avons raté. Il pointe du doigt : « Les accusations permanentes du récit national par les élites hexagonales, la panne de l’ascenseur social (...), l’accroissement des inégalités (...) forment un faisceau de tendances toxiques à la fabrication d’une saine cohésion nationale qui se définit comme une solidarité élémentaire entre les membres du corps social ». 

« A une violence diffuse il faut opposer une résistance globale de la nation » poursuit-il avant d’ajouter : « Mettre sur pied une société de vigilance, une dynamique sécurité du quotidien, un continuum de sûreté public/privé, c’est progresser vers cet horizon noble de la police qui rêve d’une polis tendue vers la liberté, l’égalité et la fraternité ».