samedi 26 mars 2022

Pour Abir !

Le combat de Abir Moussi l'est pour la Tunisie pour préserver ses institutions et sauver la République des mains des complexés de l'Histoire; mais aussi pour les femmes pour préserver leurs acquis bourguibiens puisque le CSP est dans le viseur de Ghannouchi et de ses Frères musulmans. Les Tunisiennes, et particulièrement celles qui ont voté massivement pour Béji Caid Essebsi croyant qu'il sera leur rempart contre l'islamisme, devraient se mobiliser et rejoindre l'unique personne qui combat réellement ce cancer du siècle avec une conviction inébranlable, plutôt que rester passives voir critiquer Abir sur des futilités de bonne femme : maquillage, coiffure, tenues vestimentaires ... car il y va de leur sort ainsi que de celui de leurs filles. 

R.B 


Il y a des jours où j'en veux à tout le monde, à commencer par moi-même.
Je me dis, c'est bien, reste là derrière ton écran pendant qu’elle se bat sur tous les fronts.
Préserve-toi pendant qu'elle reçoit les coups.
Campe dans les rangs d'une gauche aveugle sur la réalité et incapable de s'unir.
Brandis tes slogans droit-d'hommistes et ferme les yeux sur la dictature religieuse qui se prépare en coulisse.
Dis-toi féministe en laissant une femme aux prises avec la meute.
Fais semblant d'ignorer que sa voix touche au cœur des problèmes de ton pays, ses points névralgiques, son ancrage dans le siècle, sa modernité, l'avenir de ses enfants et sa place dans le monde.
Tu es de celles et de ceux qui la regardent se faire violenter et restent les bras croisés, au risque de devenir une alliée objective de ses ennemis devant l’Histoire.

Alors, lève toi.
Lève-toi contre ceux qui manient l’orgueil et le mépris à son égard, et dis leur qu'ils ne sont pas les aristocrates de la pensée et elle la petite pauvresse venue de nulle part.
Qu'ils ne peuvent pas faire la fine bouche comme s'ils avaient une autre alternative à proposer.
Dénonce ceux qui, tous les jours lui lancent une accusation, lui inventent une tare, un manquement, une dérive, l'injurient et la moquent.
Dis leur que si elle les dérange, qu'ils ne se rallient pas à elle, mais qu'ils ne l'attaquent par sans raison ou par pur machisme.

Son programme ne les convainc pas ?
Qu'ils en débattent avec ses troupes. Elle ne correspond pas à leurs critères intellectuels ?
Qu'ils lui concèdent la stature d'une Mère Courage qui jamais ne faiblit ni ne baisse les bras.
Son physique et sa dégaine ne correspondent pas à leurs goûts ?
Qu'ils essaient d’avoir un peu, mais vraiment un peu, de la clarté de son discours, l’indéniable de son raisonnement, ses vraies qualités de tribun.

Elle passe le plus clair de son temps à dire non aux projets obscurantistes, au terrorisme, à la corruption, à la déliquescence de l’État, et vous râlez ?
Elle veut extraire le mal et son origine et vous lui demandez de l’occulter, de tourner autour comme tant d’autres qui nous gavent de formules d'« entente nationale » visant à noyer le poisson et frisant l'imposture, ou de vœux pieux de justice et de dignité, ces arlésiennes de la Révolution...

Qu'on prenne garde au jour où l’on ne nous traitera plus en citoyens mais en croyants uniquement ; où l’on fera de nos enfants les contingents de soldats daéchiens, et alors, ne venons pas pleurer.
Ce jour où notre liberté d’être et de penser, notre création, notre art, notre désir du monde seront frappés d’anathèmes et considérés comme blasphématoires.
Ce jour, Mesdames, où l’on nous assignera de nouveau au régime de tutorat et à la polygamie, où nous reviendrons contraintes et forcées au patriarcat et n'aurions d'autres missions que de servir de « moule » à procréer.
Nous aurons alors tout le temps de méditer dans nos cuisines ce que nous n'avons pas fait et aurions du.

J'exagère ?
J'espère bien.
Je me trompe ?
C'est un risque à prendre. Est-ce que je fais l'impasse sur l'absolue nécessité de la démocratie, de la liberté individuelle et de l'égalité des sexes, y compris dans l'héritage ?
Certainement pas.

Celle que je défends dans ces lignes doit nous en donner les gages.
Si toute son énergie se concentre aujourd'hui sur son adversaire, il y aura un moment où elle se prononcera sur les valeurs universelles.
Et si elle a le mérite de ne pas tomber dans le consensus à tout prix, le bons sens politique lui dictera de nous rassembler.
Ce jour là, nous aurons gagné.

Abir Moussi

Sept clés pour comprendre l'intégrisme islamiste

" L'islamisme n'est pas l'islam.
C'est une idéologie, pas une religion."
Yasmina Khadra

Rachid Mimouni analyse le mode opératoire islamiste à l'origine de la décennie noire en Algérie et oublie de dire que le FIS est une branche de l'organisation mondiale des Frères musulmans; comme il oublie de nommer le wahhabisme qui fonde son action politique, lui préférant un générique fourre tout : l'intégrisme religieux ! Il est vrai que tout le monde était pris de court par la barbarie des jihadistes Algériens rentrés au bled après avoir servi dans les rang d'Oussama Ben Laden en Afghanistan, pour comprendre le fonctionnement de cette organisation criminelle.
Dés les années 90, Rachid Mimouni dénonçait l'islamisme, mais les gouvernants de l'époque n'étaient pas disposés à l'écouter. Dommage pour les peuples qui le subissent; puisque les Occidentaux, non plus, ne sont pas épargnés par ce cancer du siècle !
R.B

Rachid Mimouni
C’est à un moment où la société et ses politiciens tergiversaient sur la nature de la mouvance religieuse qui s’abattit sur l’Algérie après l’ouverture du champ politique (1988), que des plumes se sont élevées pour dénoncer ce qui était un fascisme théocratique. Des intellectuels francophones et arabophones se sont mis au travail pour comprendre la vague qui portait le Front Islamique du Salut, à la tête duquel trônaient les sinistres Belhadj et Madani. La réplique intégriste contre ce travail ne s’est pas faite attendre : les intellectuels étaient traqués et assassinés un à un, ils tombaient dans des attentats individuels à l’arme blanche ou à l’arme à feu. Un climat de terreur s’est instauré chez les gens de la plume : ils rasaient les murs, sortaient « comme des voleurs », se déguisaient pour aller en ville et s’autocensuraient. Les plus chanceux ont gagné les capitales européennes, dépeuplant ainsi les universités algériennes et les livrant à la toute puissance de l’islamisme. C’est contre ce climat de terreur que s’est révolté un Tahar Djaout en écrivant : « tu dis, tu meurs. Tu te tais, tu meurs. Alors dis et meurs ! ». Il a été en effet tué le 26 mai 1993, ouvrant une longue liste de ce qui se révéla être un véritable carnage des penseurs algériens entre 1993 et 1997 approximativement. (Cf. une liste des intellectuels assassinés)

En pleine terreur, dans un moment de détresse collective, un penseur qui n’appartenait pas à la caste des hommes hyperprotégés du sérail ou à celle des dignitaires privilégiés, un homme qui vivait dans un bâtiment EPLF d’une cité populaire (équivalent d’un HLM) a osé braver la peur. Il fait paraître en Algérie un livre retentissant au titre on ne peut plus clair : De la barbarie en général et de l’intégrisme en particulier (1992). C’est ce qu’on appelle, au sens fort, risquer sa vie. En effet, les islamistes intégristes se sont immédiatement acharnés sur l’écrivain pour l’éliminer et plusieurs attentats n’ont pas eu raison de lui. Il mourra finalement d’une maladie dans un hôpital parisien, après avoir été contraint à l’exil.
Cet homme s’appelle Rachid Mimouni.
Ses idées survécurent. Les voici :

Première clé pour comprendre l’islamisme : Le FIS n’est pas un parti politique mais une résurgence du Moyen Age maghrébin.

Loin d’être organisé comme un parti politique contemporain, avec des instances locales, provinciales puis nationales, élues par les adhérents et renouvelées à échéance déterminées, le FIS est une nébuleuse instable. Il n’a jamais tenu de congrès ordinaire, n’a ni statuts, ni règlement intérieur. Il s’est présenté aux élections de 1991 avec pour seul programme le Coran. Ses réunions sont souvent secrètes et tenues à huis clos. Son seul organe reste un Conseil Consultatif (Majlis al-choura) dont on ne connaît ni le nombre de sièges, ni les noms exacts des membres, ni la durée de leur mandat. Il n’a ni président, ni secrétaire général mais seulement deux leaders autoproclamés et quelques personnalités qui gravitent autour d’eux.
« Ce sont des prédicateurs et ils s’inscrivent en cela dans la pure tradition historique maghrébine » (p. 17). Les leaders du FIS entretiennent donc une « obscurité délibérée » (p. 17) sur leur mouvement. Nul besoin d’un programme, il suffit de prêcher « la voie droite ». « Comme leurs modèles du Moyen Age, ils ne songent qu’à ramener le peuple vers l’orthodoxie religieuse » (p. 18). Ils ressemblent en cela aux Maïssara (à l’origine de Tahert), Obeïd Allah (au service des Fatimides), Ibn Tumart (Almohade), etc.

Deuxième clé : L'idéologie intégriste est un archaïsme

Le crédo par excellence de l’islamisme est « un retour à la pureté originelle de l’islam » (p. 21). Ce retour se fait concrètement par l’adoption d’un mode de vie censé avoir court au temps du Prophète. Barbe, tenue vestimentaire, khol, sommeil à même le sol, interdiction de la musique, etc. « Toute évolution au niveau des mœurs ou des pratiques devient suspecte d’hérésie » (p. 22). Refus du calcul astronomique pour fixer d’avance le premier jour de Ramadhan, refus du calendrier solaire et du week-end universel, interdiction du maquillage et de la cigarette (inconnue du Prophète) pendant le jeûne, attachement à une interprétation littéraliste sans tenir compte des changements du monde (moyens de transport bouleversant la notion de voyage par exemple).

Les crimes ne sont pas loin : couper la main au voleur, couper la langue du menteur, crever l’œil du faux témoin, lapider la femme adultère, etc. « Chaque fois que les croyants interrogeaient leurs guides pour savoir si l’usage de telle ou telle commodité était licite, un « La yajouz » (ce n’est pas permis) tombait comme un couperet » (p. 25). On s’accroche à l’état archaïque du monde du VIIème siècle et on refuse tout changement ultérieur au nom d’un islam pur et littéral.
Troisième clé : La femme chez les islamistes est comme le Juif chez Hitler !

« Il reste que, chez les islamistes, la femme est l’objet d’une fixation obsessionnelle, comme le juif pour Hitler » (p. 29). « Elle est la source de tous les tourments. L’inadmissible est qu’elle ait un corps, objet des désirs et fantasmes masculins. Sa beauté devient une circonstance aggravante. Tout apprêt ou parure devient une incitation intolérable » (p. 29).
« La question sexuelle reste l’un des fondements du projet islamiste. Contraint au réalisme, les intégristes accepteraient d’accommoder nombre de leurs principes (…) mais certainement pas le sort promis à la femme » (pp. 43-44)
Le hijjab (le voile et non le foulard) n’est d’ailleurs pour eux qu’une façon d’occulter la sexualité, incarnée par le corps de la femme. Cachez-moi ce corps désirant que je ne saurais voir…
Quatrième clé : Hijjab (voile) et Qamis (robe blanche) constituent l’uniforme intégriste.

Le voile dans les pays où les masses sont fanatisées, loin d’être une question de liberté de culte ou de liberté tout court, est un signe de ralliement et d’embrigadement. C’est une uniformisation des masses par le vêtement qui précède une uniformisation de la pensée. Arborer un hijjab dans ces sociétés, c’est se rallier à une certaine éthique du couple indissociable du projet politique intégriste. C’est adopter « la voie droite » et situer de facto les autres (moutabarijât) dans la dépravation et l’immoralité.

« Le hijjab est une invention géniale car il illustre la conception qu’ont les intégristes de la relation de couple. Ses larges plis, qui occultent les formes de la femme, découragent toute entreprise de séduction. Il procure surtout une formidable sérénité aux disgracieuses, grosses ou difformes, puisque l’ample tunique cèle les défauts de l’une et les attraits de sa rivale. Le voile est destiné à inhiber le désir masculin. Leur corps occulté, les femmes se retrouvent interchangeables, réduites à leur organe génital. On parvient ainsi à refréner l’émergence de tout sentiment amoureux et à rabaisser l’acte sexuel au niveau d’un besoin trivial. On fait l’amour comme on va aux toilettes » (p. 48)

Mimouni relève que le même souci de distinction vestimentaire caractérise les mouvements fasciste italien, nazi allemand et islamiste algérien. « Au chemises noires ou brunes correspondent le qamis et la barbe. Leurs militants aiment se coudoyer dans d’immenses meetings afin de se compter et d’éprouver cet enivrant sentiment de puissance de se voir ainsi par milliers regroupés. Ils vibrent de conserve aux discours enflammés de leurs tribuns. Cela donne lieu à des orgasmes collectifs. Les mots d’ordre qu’ils clament finissent par avoir un contenu magique. Fascisme, national-socialisme ou république islamique se retrouvent dotés d’un sens nouveau, radical ou utopique. Une réelle solidarité et d’obscurs désirs de revanche les rapprochent. » (p. 153)

Il faut ajouter à ce tableau la volonté délibérée des trois mouvements de recourir à la violence et la constitution à leur périphérie d’obscurs groupuscules faits d’illuminés, de fanatiques, de nervis terroristes, de « désaxés de tout genre » prêts à agir le moment venu.
Cinquième clé :
L'intégrisme est l’ennemi des intellectuels.

« Comme tous les mouvements populistes, l’intégrisme est ennemi des intellectuels et de la culture. Son discours fait appel à la passion plutôt qu’à la raison, à l’instinct plutôt qu’à l’intelligence. Toute activité intellectuelle doit se consacrer à l’approfondissement de la connaissance du message divin. Toute forme de création est taxée d’hérétique parce qu’elle est perçue comme faisant une coupable concurrence à Dieu. Le projet islamiste se propose donc d’étouffer toutes les formes d’expression artistique : littérature, théâtre, musique et bien entendu peinture » (p. 51)

Après juin 1991, les islamistes fermèrent la cinémathèque d’Alger, prétextèrent des problèmes d’hygiène ou des travaux de rénovation pour faire cesser l’activité des centres culturels, asphyxièrent financièrement nombre d’institutions de culture ou de loisir, interdirent par la violence des galas, des expositions, etc … avant de passer purement et simplement au meurtre des producteurs culturels après 1993 : écrivains (Djaout), hommes de théâtre (Alloula), chanteurs (Hasni), etc.
« Les sciences humaines restent globalement suspectes à leurs yeux. A l’université, elles se sont transformées en cours de propagande. » (p. 54)
Sixième clé : L’intégrisme récupère la pauvreté.

Les intégristes reçoivent de l’argent par le biais de diverses banques islamiques, ligues et associations religieuses. La manne provient essentiellement de l’Arabie Saoudite, des pays du Golf, du Soudan et de l’Iran et des collectes naguère organisées en Occident. Ils fructifient ensuite cet argent dans le trabendo (marché noir parallèle au marché), en enrôlant un nombre de chômeurs algériens. Au final, les caisses sont pleines, ce qui leur permet de porter secours aux pauvres, aux sinistrés, aux victimes des inondations et des séismes, aux mal logés et aux sans-abri, tout en récupérant ce beau monde dans le cadre de l’idéologie islamiste. Contrairement à l’absence et à la corruption de l’Etat, l’intégrisme gagne à lui les masses et progresse socialement et électoralement. Les terrains où se fait sentir une misère matérielle, un mécontentement populaire, une frustration larvée, un ressentiment, sont les terrains de recrutement par excellence de l’islamisme.
Septième clé : L’intégrisme est promu par l’enseignement et les média.

« La politique d’éducation épaissit d’une nouvelle strate le terreau intégriste. Les pas de clercs et les incohérences des programmes d’enseignement constituent sans doute une des causes du retour de la barbarie » (p. 121)

Aux lendemains de l’indépendance, pour combler son manque de personnel de l’éducation, l’Algérie a importé des enseignants d’Egypte, qui répandirent l’idéologie panarabiste parmi les élèves. L’arabisation, politique destinée à récupérer l’héritage linguistique arabe spolié par la colonisation, se transforma en apologie de l’islamisme et en mépris des langues locales et populaires. Menée à la hâte, cette arabisation était dépourvue de moyens pour incarner une ouverture vers la modernité. Elle se rabattît sur les dogmes islamiques du Moyen Age et sur la sacralisation de l’idiome coranique, à un moment où le reste des secteurs économiques sensibles fonctionnait encore en français. La bi-partition des compétences et des élites crée des frustrés, une partie de la population semi-lettrée se trouvant exclue du jeu économique. C’est cette partie qui, privée des moyens matériels et intellectuels modernes, s’identifia aux modes de vie rétrogrades. Elle vint par la suite grossir les rangs de l’intégrisme et stigmatiser les « francisants » privilégiés (moufanassoun).

Par ailleurs, des millions d’élèves écoutent chaque jour un catéchisme inspiré par les prédicateurs du Moyen Age comme Ibn Taymiyya. La télévision et les radios nationales retransmettent ces discours, tandis que l’école se chargeait de les enseigner dés le jeune âge.

Résultat d’un système éducatif désaxé, incapable d’amarrer les écoliers sur les acquis de la culture universelle tant spirituels que matériels, l’intégrisme sait d’où il vient. Aussi, ses promoteurs sont-ils farouchement opposés à la réforme de l’école qui leur permet de se reproduire. Ils pensent que celle-ci doit enseigner, à côté des matières techniques supposées « neutres » (sciences dites dures), les dogmes coraniques, les certitudes divines et les principes de la foi. Aussi tendent-ils à expurger de l’éducation le doute, la raison, l’esprit critique, la relativisation historique ou la discussion herméneutique qui caractérisent les sciences humaines.
Conclusion : Quelle démocratie pour l'Algérie ?

Le droit d’élire librement ses représentants n’est concédé qu’à des citoyens mâtures (pas à des enfants par exemple). Si l’analphabétisme perturbe l’exercice du jeu démocratique, le fanatisme le fausse gravement. Comment concéder la maturité à un « citoyen » convaincu que mettre le bulletin du FIS dans l’urne est une condition pour aller au paradis ? Comment convaincre un barbu muni d’une liasse de procurations que ses filles doivent accomplir elles-mêmes leur devoir électoral ? Comment fonder un Etat avec un « leader » islamiste qui proclame abroger la démocratie une fois au pouvoir ?

On ne parle pas de la vieille qui met la photo de son fils chahid (martyre) tué pendant la guerre d’Algérie dans l’urne, de l’Algérien moyen perdu dans le choix de 36 candidats, du quinquagénaire qui demande au chef du bureau quel bulletin il faut mettre, du jeune homme qui vient voter FLN pour avoir – croit-il – droit à un passeport, et de tous ceux qui viennent les « aider » avec des barbes opulentes. Comment expliquer aux Algériens, venus voter sur le Maître des lieux et le dépositaire du pouvoir (sultan, président ou monarque), qu’ils ne s’agit en réalité que de législatives ou de communales ? Comment leur demander de revenir au deuxième tour, alors qu’ils estiment avoir déjà voté le premier tour ? Comment imprimer des programmes et une littérature politique destinée aux membres d’une tribu dont le chef seul décide du vote de sa communauté ? Etc.

« Tu ne peux pas deviner, assurait un chef d’un centre de vote à Mimouni, ce qui peut se passer dans un bureau de vote. C’est inimaginable. Figure-toi que, dans l’urne provenant du bureau réservé aux femmes, on a trouvé quarante bulletins « Non ». Heureusement qu’on a pu s’en rendre compte et les changer » (p. 142)

Dans ces conditions, il n’y a que certains occidentaux, dont l’intégrisme rivalise avec celui des islamistes, pour réclamer l’application intransigeante et littérale du principe démocratique. « La démocratie suppose que soient réunies les conditions qui en permettent le sain exercice » (p. 152). Or, de toute évidence, tel n’était pas le cas après le premier tour des élections législatives de 1991 en Algérie. Le FIS, avant même de gagner, planifie l’iranisation du pays et met en place son fascisme théocratique. L’interruption du processus électoral a été un acte patriotique qui a épargné aux Algériens des décennies de charia, de lapidation, de mutilation publique, etc. Il n’a pas été effectué à l’instigation de la seule armée, comme le suppose ses détracteurs, mais le premier appel est venu des intellectuels menacés et de la société civile. L’armée algérienne elle-même n’est pas dépourvue d’intégrisme et l’écrasante majorité de ses généraux sont des hojjaj (ayant fait leur pèlerinage à la Mecque).

Mais comment établir une démocratie dans un pays où l'islamisme, vaincu militairement, se régénère socialement à vue d'œil ...
*****

Citations de Rachid Mimouni :

• « La religion a ainsi fini par investir tous les lieux de l’espace social, du culturel au scientifique. En ce cas, la barbarie n’est jamais loin. Les hommes de culture auraient été les premières victimes de ces souffles ravageurs » (p. 57)
• Les intégristes « promettaient l’instauration de tribunaux populaires pour juger les « mal-pensants », la lapidation des femmes adultères, la mutilation des voleurs à la tire, l’obligation pour les filles de porter le hidjab, l’interdiction de la mixité à l’école, etc. Le projet islamiste, dans sa radicalité et dans sa démesure, tient à la fois de la révolution culturelle chinoise et du régime des Khmers rouges. » (pp. 149-150)
• « Il fallut l’immense talent de Soljenitsyne, le formidable acharnement de Sakharov et le courage de tant d’autres intellectuels dissidents soviétiques pour faire prendre conscience aux intellectuels européens de l’abjection du goulag stalinien, occultée alors par l’utopie socialiste. Leurs émules s’obstinent à ignorer ce qui se passe en Iran et au Soudan » (p. 150)
• « Vis-à-vis de l’expérience politique algérienne, les occidentaux ont eu l’attitude de cette catégorie de médecins qui s’intéressent plus à la maladie qu’à l’état du patient et aux risques qu’il encourt. Le cas était inédit et fournissait donc un excellent sujet d’étude. (…) Quant à l’état du malade, ils s’en lavent les mains, comme l’a fait Ponce Pilate lors de la crucifixion de Jésus » (p. 149)
• « En pariant sur la prévisible modération d’un régime intégriste, on oublie que sa base le pousse vers une radicalisation forcenée » (p. 155)
• L’intégrisme est une imposture. Il discrédite le message de Mohammed en en donnant une image d’intolérance mâtinée de violence, et de son temps, le Prophète n’a pas manqué de dénoncer le dogmatisme » (p. 156)
• « Quelques uns de nos compatriotes adoptent une position qui rejoint en de nombreux points celles des Occidentaux. Au-delà de l’influence qu’exercent sur eux les médias des pays où ils vivent, je crois qu’il existe dans leur attitude une part de sadisme. D’outre mer, ils nous accusent de diaboliser les intégristes mais se gardent bien de venir partager le sort de leurs concitoyens. » (p. 156)
Sources : Rachid Mimouni, 1992, De la barbarie en général et de l'intégrisme en particulier, Belfond-Le Pré aux clercs. 10 Janvier 2008




samedi 19 mars 2022

Cachez moi ce wahhabisme que je ne saurais voir

La barbarie du wahhabisme s'installe en France, aussi !

Pourtant, intellectuels, hommes politiques, journalistes peinent encore à nommer les choses par leur nom, quand ils persistent à parler d'islamisme et de son pendant le jihadisme, sans nommer l'idéologie qui les nourrit, autrement dit de l'obédience à laquelle se ont convertis ceux qui prennent en otage l'islam et les musulmans de France et tentent par tous les moyens mis à leur disposition par les pétromonarques "amis de la France" d'installer le wahhabisme en France; puisque c'est de cette obédience que découle toute la barbarie, aussi bien en terre d'islam qu'en Occident.

Ce qui n'empêche pas certains d'en jouer, comme Eric Zemmour, pourtant d'origine algérienne à même de faire ce distinguo entre l'islam d'obédience malékite et l'islam d'obédience soufi, ancestraux des Algériens; d'avec l'obédience wahhabite importée en Algérie par les jihadistes partis combattre en Afghanistan auprès d'Oussama Ben Laden. Amalgame entre islam et islamisme, par pur populisme de la part de ce royaliste plus que le roi et plus Français que les Français de souche !

R.B 








 


Il aura suffit de 36 secondes. 36 secondes pour que l’islamiste Merah tue Jonathan, Arié et Gabriel Sander et abatte à bout touchant la petite Myriam Monsénégo. 36 secondes pour semer la mort dans une école et abattre des enfants simplement parce qu’ils étaient juif. Si peu de temps et tellement de choses irréversibles.
A ce moment-là on a voulu croire que Merah était un monstre, un loup solitaire, une anomalie. Peut-être parce que ce qu’il avait fait était tellement horrible, tellement inenvisageable que miser sur la monstruosité c’était espérer qu’une telle horreur n’arriverait qu’une fois, c’était conjurer le sort. C’est peut-être la seule façon de comprendre notre aveuglement collectif et surtout notre absence de réaction.
La suite nous aura prouvé que l’aveuglement n’est pas une protection et que l’on ne protège personne en fermant les yeux sur l’horreur. Et surtout que Mohamed Merah n’était pas un cas isolé mais le produit d’une idéologie, l’islamisme. Une idéologie dont l’influence sur l’Islam était à la fois importante et croissante et fabriquait ce type d’assassin.
Depuis ?
Depuis le sang n’a cessé de couler, de Paris à Nice, de Saint Etienne-du-Rouvray à Magnanville, Carcassonne, Trèbes, Conflans-Sainte-Honorine… La liste n’a cessé de s’allonger. La France est devenue terre de jihad et les massacres se sont accumulés. Et ce n’est pas un hasard. L’Europe est une cible et les gouvernements n’ont toujours pas pris la mesure de ce que cela implique.
Aujourd’hui encore, en pleine élection, certains partis font des appels du pied aux islamistes et reprennent leurs éléments de langage pour défendre le port du voile, faire croire à une persécution des musulmans sur notre sol, parler de racisme systématique et relayer la thématique de « l’islamophobie ». EELV et LFI sont à la pointe de ce mauvais combat, mais les Législatives qui s’annoncent devraient multiplier les appels du pied au clientélisme islamiste.
Aucun gouvernement n’a voulu regarder en face le lien entre islamisme et jihadisme et à chaque fois que cette idéologie teste notre capacité de réaction, c’est la faiblesse qu’elle rencontre. Comme dans le sport où le port du voile tente de s’imposer en compétition sans susciter autre chose que le déni.
Pire encore, beaucoup de ceux qui combattent l’islamisme sont menacés, une partie doit vivre sous protection, une jeune fille, Mila n’a aujourd’hui plus de vie et doit se cacher tandis que ses persécuteurs paradent, un enseignant Samuel Paty a été décapité et de plus en plus de professeurs se censurent.
Aujourd’hui ceux qui nous dirigent n’ont toujours pas pris la mesure de ce que nous affrontons et le sang ne peut que couler à nouveau car l’influence des islamistes, en terre d'islam comme en France et en Europe, ne cesse de s’accentuer. Avec cette influence grandit encore leur potentiel politique, l’électoralisme les nourrit et augmente leur pouvoir d’emprise sur leur communauté.
L’horreur de Toulouse nous a montré que les loups solitaires n’existaient pas : la famille de Merah était une famille d’islamistes, la religion, l’inculture et la violence étaient leur terreau. Il a été radicalisé également parce que Toulouse était un foyer actif du jihadisme qui a formé et radicalisé nombre de futurs soldats de l’EI. Merah a été « accompagné » pour devenir ce monstre. Des enregistrements entre son frère et sa mère, captés dans la prison où le frère a été incarcéré, montrent que la mère est fière de ses fils, qu’assassiner des enfants est excusable puisqu’ils sont juifs et que pour elle, son fils est au paradis. Cet homme a évolué dans un imaginaire dont l’influence ne cesse de progresser. Il est représentatif d’un mouvement politico-religieux qui ne recule pas parce que seuls ces formes les plus criminelles sont combattues. L’idéologie qui l’alimente, elle, est protégée.
Je n’ai jamais oublié les enfants de l’école Ozar Hatorah. J’ai encore honte d’avoir attendu le massacre de Charlie pour ouvrir les yeux sur ce qui s’était passé à Toulouse même si je sais que cet aveuglement était collectif, il me tourmente encore. Je ne supporte toujours pas d’entendre le récit de ces 36 secondes qui ont suffit pour que la barbarie s’installe chez nous. Elle n’est toujours pas repartie.

samedi 5 mars 2022

Poutine, le nouveau Staline ...

9 mai 1945, victoire des alliés contre l'Allemagne nazie, 
que célèbrera Poutine à sa manière.
 
Excellente analyse de l'impérialisme poutinien, par un communiste trotskiste qui dénonce la supposée menace militaire de l’OTAN que brandit Poutine pour étouffer l’aspiration démocratique des peuples d’Europe centrale et orientale.
R.B

Edwy Plenel

Contre l’impérialisme russe, pour un sursaut internationaliste

Un nouvel impérialisme menace la paix du monde, et il est russe. C’est cette réalité que l’invasion de l’Ukraine par la Russie oblige, enfin, à regarder en face. Cette vérité est sous nos yeux depuis une décennie, précisément depuis le début, en mars 2012, du troisième mandat présidentiel de Vladimir Poutine, qui détient le pouvoir à Moscou, de façon ininterrompue, depuis bientôt un quart de siècle.

Cette vérité, amplement documentée sur Mediapart, c’est celle d’un impérialisme de revanche, mû par le ressentiment des nations déchues qui retournent leurs blessures en agressions contre d’autres peuples. Celle aussi d’un impérialisme de mission, convaincu de défendre une vision du monde conservatrice et identitaire, alternative aux idéaux démocratiques assimilés à une décadence occidentale.
Celle enfin d’une puissance nucléaire à la merci d’un homme et de son clan oligarchique, ayant basculé de l’autoritarisme à la dictature, assassiné des opposants et des journalistes, muselé et emprisonné les dissidences politiques, interdit les organisations de la société civile, diabolisé toute contestation en menée étrangère.
Outre sa propre population que cette fuite en avant guerrière détourne de ses aspirations sociales et de ses revendications démocratiques, la première cible de cet impérialisme est le libre arbitre des peuples à disposer d’eux-mêmes, leur droit de choisir leur destin, leur liberté d’inventer leur futur.
C’est le ressort de la crise ukrainienne depuis 2014. Mais c’est aussi celui de l’intervention russe en Syrie venue, à partir de 2015, au secours de l’une des pires dictatures du monde arabe. Comme ce fut celui de la seconde guerre de Tchétchénie en 1999 où, déjà, Vladimir Poutine affirma son pouvoir par la violence en menant une guerre d’extermination contre les volontés indépendantistes d’un peuple du Caucase.
Il y a huit ans, avec l’annexion russe de la Crimée ukrainienne, pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale un État européen s’emparait d’une région faisant partie d’un autre État européen. Or cette violence ne ripostait à aucune agression sinon celle que signifiait, pour Vladimir Poutine et les siens, l’aspiration démocratique du peuple ukrainien exprimée par son désir de formaliser une association avec l’Union européenne.
C’est en effet le refus de celle-ci par le président alors en place à Kiev, au profit d’un accord avec la Russie, qui déclencha la mobilisation populaire de l’Euromaïdan. Loin des arguties propagandistes sur une prétendue menace de l’OTAN, c’est bien contre ce sursaut démocratique que la Russie déclencha un cycle guerrier au cœur du continent européen, dont l’invasion de l’Ukraine est aujourd’hui l’aboutissement.
Indifférents ou inconscients, nombreux furent ceux, diplomates ou politiciens, qui se rassurèrent alors en réduisant l’annexion de la Crimée à une affaire interne à l’espace géopolitique russophone. Leurs œillères idéologiques, ou plus prosaïquement leurs préjugés, vis-à-vis des peuples non européens, notamment musulmans, les ont empêchés de voir plus loin. Car, pour prendre à temps la mesure de la dynamique agressive de ce nouvel impérialisme incarné par Vladimir Poutine, il aurait fallu qu’ils prêtent plus d’attention au sort tragique du peuple syrien.
S’ils l’avaient soutenu, accueilli et écouté, ils auraient su. Devenue l’épicentre des révolutions démocratiques arabes après le coup d’État militaire égyptien de 2013, la Syrie fut en effet le premier théâtre d’expansion militaire russe hors de l’ancien espace soviétique, prolongé depuis par ses incursions africaines, notamment sub-sahariennes, sous couvert des mercenaires du groupe Wagner.
Sans jamais renâcler aux crimes de guerre contre les civils, l’intervention russe a ainsi sauvé le régime sanguinaire de Bachar al-Assad contre lequel s’était faite, en 2011, à la suite du soulèvement tunisien, l’unité pacifique du peuple syrien dans sa diversité confessionnelle et partisane.
En même temps qu’il affirmait ainsi sa puissance hors des frontières russes, le régime poutinien radicalisait sa violence en politique intérieure.
Son cours impérial devenait aussi un cours dictatorial. Le début de la guerre en Ukraine fut marqué par deux événements qui symbolisèrent sa capacité transgressive, à la manière d’un État voyou.
Le 17 juillet 2014, un Boeing de la Malaysia Airlines (283 passagers et 15 membres d’équipage) était abattu en vol au-dessus de la région de Donetsk, dans l’est de l’Ukraine, sous le contrôle des séparatistes pro-russes. Les révélations initiales de CORRECT!V, relayées par Mediapart, sur la responsabilité de la Russie dans ce crime ont été, depuis, confirmées par les enquêtes internationales.
Puis, le 27 février 2015, Boris Nemtsov, opposant politique de Vladimir Poutine, était assassiné sur un pont de Moscou, à quelques pas du Kremlin. Il s’apprêtait à rendre public un rapport sur la guerre russe en Ukraine, contre laquelle il avait appelé la population à se mobiliser. Depuis, les opérations des services spéciaux russes contre les opposants et les dissidents, notamment par empoisonnement mortel commis jusqu’à l’étranger, se sont multipliées.
Ayant miraculeusement réchappé, grâce à l’intervention de l’Allemagne, d’un semblable assassinat, Alexeï Navalny, devenu la principale figure de l’opposition, croupit désormais en prison sur la base d’un dossier entièrement fabriqué, tout comme d’autres dissidents. Peu de temps avant son arrestation, il avait diffusé une enquête en vidéo réalisée par sa Fondation contre la corruption sur le « palais de Poutine », symbole du cynisme d’un pouvoir dont l’assise sociale est un capitalisme rapace et prédateur.
Progressivement, le pouvoir moscovite a mis fin à ce qui restait d’expression publique, pluraliste et indépendante, de la société civile russe. Dans les médias, la propagande règne en maître absolu, sans espace de contestation. Persécutant les ONG qui reçoivent des aides extérieures, notamment de fondations étrangères, une loi de 2012 a ouvert la voie à leur marginalisation, puis à leur interdiction, après son durcissement en 2020 qui les oblige à se déclarer « agent étranger ».
Dans ce contexte, la légende tenant désormais lieu de réalité, le passé, pas plus que le présent, ne saurait être réévalué ou discuté. C’est ainsi que le 28 décembre 2021, la Cour suprême russe a prononcé la dissolution de l’ONG Memorial, fondée en 1989 avec le soutien d’Andreï Sakharov, physicien nucléaire, père de la bombe H soviétique et Prix Nobel de la paix. Outre la défense des droits humains, on doit à Memorial d’avoir lancé le travail de documentation des crimes du stalinisme, d’exhumation des lieux, des camps et des charniers, ainsi que de réhabilitation de toutes ses victimes.
Spectre né des décombres de l’URSS, Vladimir Poutine offre une synthèse du tsarisme grand-russe et du stalinisme communiste.
Telle est, sommairement résumée, la réalité du régime poutinien. Impossible d’y déceler une once d’idéal progressiste, de principe démocratique et de morale politique. Les extrêmes droites, notamment françaises, ne s’y sont pas trompées, recherchant ses financements et courtisant ses dirigeants, comme nos enquêtes l’ont abondamment démontré. De la campagne pour un Brexit identitaire en Grande-Bretagne à l’élection du suprémaciste Donald Trump aux États-Unis, le Kremlin ne s’est d’ailleurs pas privé de servir leurs intérêts en utilisant toutes les armes virtuelles offertes par la révolution numérique, de désinformation, d’intoxication et de manipulation.
Mais, avec l’invasion de l’Ukraine, ce sont des armes autrement réelles que Vladimir Poutine déchaîne sur l’Europe jusqu’à brandir, à la manière d’un nouveau Docteur Folamour, la menace nucléaire. Quelles que soient les pathologies propres au pouvoir personnel, à sa solitude et à sa paranoïa, les spéculations sur son irrationalité ou sa déraison manquent l’essentiel : la cohérence du projet impérial, longuement pensé et mûri, qui met en branle une Russie agressive et conquérante.
Dès 2015, soit l’année qui a suivi le début de la crise ukrainienne, un essai méticuleusement documenté permettait de le comprendre.
« Dans la tête de Vladimir Poutine » de Michel Eltchaninoff (Solin-Actes Sud), est un inventaire exhaustif des idéologies qui animent Vladimir Poutine.
Revenu en 2012 à la présidence de la Russie, après l’intermède fictionnel où il fut le premier ministre de son bras droit Dmitri Medvedev, il inaugure alors un tournant conservateur revendiqué dont la « Voie russe » sera le poteau indicateur.
Dans une salade russe où s’entremêlent intellectuels grands-russes sous le tsarisme, Russes blancs face aux bolcheviques et Alexandre Soljenitsyne dans la dissidence soviétique, une constante s’impose : la promotion d’une Russie éternelle, rabattue sur son identité chrétienne et slave, en alternative à la démocratie moderne, réduite à une tromperie occidentale. Lors d’un Forum de la jeunesse tenu en août 2014 en Crimée, quelques mois après son annexion, un universitaire moscovite et poutinien en résume l’enjeu : « S’édifier comme une civilisation séparée ou se penser comme le sauveur conservateur de l’Europe. »
La posture victimaire face à un Occident qui, sous domination nord-américaine, serait agressif et méprisant s’enracine dans une vieille rhétorique que résumait en ces termes le philosophe anti-communiste Ivan Ilyine (1883-1954) : « Les peuples occidentaux ne comprennent ni ne supportent l’originalité russe », leur objectif étant dès lors de « démembrer la Russie pour la faire passer sous contrôle occidental, la défaire et finalement la faire disparaître ». Or Nos missions, l’un des essais programmatiques d’Ilyine qui fut brièvement séduit par le nazisme, fut offert en janvier 2014 par l’administration présidentielle russe à tous les hauts fonctionnaires, gouverneurs et cadres du parti Russie unie.
Le 18 mars 2014, dans son adresse à la Fédération de Russie après l’annexion de la Crimée, Vladimir Poutine y fait explicitement écho : « La politique d’endiguement de la Russie, qui a continué au XVIIIe, au XIXe et au XXe siècle, se poursuit aujourd’hui. On essaie toujours de nous repousser dans un coin. » Le 8 avril 2014, dans un entretien à la Pravda, un historien proche du Kremlin, Viatcheslav Nikonov, qui n’est autre que le petit-fils de Viatcheslav Molotov, ministre des affaires étrangères de Staline et signataire du Pacte germano-soviétique de 1939, renchérit : « Un combat dirigé contre la Russie est mené depuis mille ans. Les jours actuels ne sont pas des exceptions, cette lutte de l’Occident contre la Russie ne cessera jamais. »
Spectre né des décombres de l’URSS, dont il n’hésitait pas, le 25 avril 2005, à décrire la chute en 1991 comme « la plus grande catastrophe géopolitique du siècle », Vladimir Poutine offre une synthèse du tsarisme grand-russe et du stalinisme communiste. Rien d’illogique à cela quand l’on sait combien, en faisant table rase meurtrière des idéaux internationalistes de la révolution de 1917, Joseph Staline réduisit le soviétisme à l’amour aveugle de la grande patrie russe, à une culture d’obéissance militaire ainsi qu’aux organes de répression et d’espionnage – le KGB, devenu FSB, où Poutine commença sa carrière – promus colonne vertébrale de l’État.
Loin de relever d’une spéculation hasardeuse, cette filiation est revendiquée par le président russe lui-même dans son discours du 21 février 2022 qui, annonçant l’accélération de son offensive contre l’Ukraine et l’Europe, a sidéré le monde entier. Se livrant à un négationnisme historique de l’existence même de l’Ukraine qui serait une « invention » des bolcheviques, il y revisite le moment fondateur du schisme entre léninisme et stalinisme, dont son opposition de gauche, le trotskisme, entretiendra ensuite le souvenir : la question des nationalités.
Pour Poutine, la faute indélébile de Lénine – « bien pire qu’une erreur du point de vue du destin historique de la Russie et de ses peuples » – est d’avoir voulu « satisfaire sans compter les ambitions nationalistes sans cesse croissantes aux confins de l’ancien empire » tsariste. Refusant de mettre à égalité un impérialisme oppresseur, de conquête et de domination coloniales, et les nationalismes qui se révoltent pour s’en émanciper, Lénine défendait en effet le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes quand Staline s’employait à subordonner à la domination russe les petites nations de l’empire tsariste déchu.
Tout comme la question coloniale travaille encore le présent de nos sociétés – leurs diversités, discriminations et racismes, etc. –, cette question des nationalités est au cœur de la persistance du passé stalinien dans l’idéologie poutinienne. Seul ouvrage théorique de Staline, écrit en 1913 sous le contrôle de Lénine, « Le marxisme et la question nationale » lui offrira le poste de commissaire aux nationalités du début de la révolution russe jusqu’en 1923. Il s’y distingue par un chauvinisme grand-russe, s’opposant à l’autodétermination au point de juger contre-révolutionnaires les demandes de sécession, notamment de l’Ukraine – déjà.
Le travestissement de l’agression en victimisation par la propagande poutinienne
Exactement un siècle plus tard – l’URSS est créée en 1922 –, Poutine se pose donc en héritier politique de Staline.
Quand en août 1922 est ébauché le premier projet définissant les relations entre les futures Républiques soviétiques et la Russie, Staline ne veut leur accorder qu’une vague autonomie au sein d’une fédération entièrement subordonnée à la Russie. Lénine s’y oppose farouchement à tel point qu’outre sa prise de conscience tardive que « Staline, en devenant secrétaire général, a concentré dans ses mains un pouvoir illimité », cette question sera son dernier combat avant que la maladie ne le terrasse.
Dans son fameux « Testament », écrit en décembre 1922 et longtemps tenu secret par le pouvoir soviétique, Lénine dénonce la « campagne véritablement nationaliste grand-russe » de Staline, qu’il qualifie en des termes peu amènes de « Géorgien qui accuse dédaigneusement les autres de “social-nationalisme” alors qu’il est lui-même non seulement un véritable et authentique “social-nationaliste”, mais un grossier argousin grand-russe ».
À l’inverse, l’actuel occupant du Kremlin, dans son discours du 21 février, donne acte à Staline d’avoir « pleinement réalisé non pas les idées de Lénine, mais ses propres idées sur l’État », c’est-à-dire « un État strictement centralisé et totalement unitaire ». Il lui fait seulement grief de n’avoir pas « révisé formellement les principes léninistes proclamés lors de la naissance de l’URSS », autrement dit de n’avoir pas mis en cause sur le papier le droit des républiques à s’autodéterminer et à se séparer. Autant, assène-t-il, de « fantaisies odieuses et utopiques inspirées par la révolution, absolument destructrices pour tout État normal ».
Plutôt qu’un signe de déraison, les divagations historiques de Vladimir Poutine afin de justifier sa guerre d’agression indiquent la cohérence et la dangerosité de son projet. Ce passé mort qui saisit le vif du présent est au ressort des idéologies du ressentiment qui font les nations dangereuses. Leur refrain obsessionnel est l’humiliation subie et la grandeur perdue, nourrissant la conviction qu’on ne retrouvera la seconde qu’en vengeant la première.
Évoquant la fin de l’Union soviétique dans son discours du 24 février qui accompagnait le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine, Poutine assène qu’il en a tiré la certitude que « la paralysie du pouvoir et de la volonté est le premier pas vers une dégradation totale et une disparition complète ».
S’ensuit une diatribe contre les États-Unis et leurs alliés européens, cet « Occident collectif » dit-il : « Ils ont essayé de nous enfoncer, de nous achever et de nous détruire pour de bon. » De « détruire, insiste-t-il, nos valeurs traditionnelles et nous imposer leurs pseudo-valeurs », lesquelles mènent « à la dégradation et à la dégénérescence car elles sont contraires à la nature humaine elle-même ».
Ce travestissement de l’agression en victimisation est le piège tendu par la propagande poutinienne qui y dissimule sa volonté de puissance en nécessité défensive.
La supposée menace militaire de l’OTAN est brandie pour étouffer l’aspiration démocratique des peuples d’Europe centrale et orientale.
Il va sans dire que l’accumulation, ces trois dernières décennies, par les États-Unis et leurs alliés, d’occasions manquées, d’aveuglements persistants et d’erreurs tragiques, donne sa consistance à cette rhétorique au point qu’elle rencontre, fort logiquement, un écho favorable parmi les peuples qui en ont subi les conséquences et payé le prix – y compris de la domination de notre propre impérialisme, en « Françafrique ».
Toutes ces fautes, voire ces crimes, de l’Occident ne sauraient excuser l’agression russe. Elles ont certes favorisé l’avènement de cet impérialisme russe. Mais elles n’en sont pas la cause
Oui, l’Occident, en tant que réalité politique, s’est enivré de sa victoire par défaut après l’effondrement de l’URSS sur elle-même en 1991. Pactisant avec la nouvelle classe dirigeante qui s’enrichissait en pillant les dépouilles soviétiques, il s’est comporté en puissance arrogante et dominatrice, portée par sa croyance en une fin de l’Histoire dont le capitalisme, libéré de toute entrave et menace, serait le terme.
Oui, à partir de 2001 et du 11-Septembre new-yorkais, l’Occident s’est lancé durant la décennie suivante, de l’Afghanistan à l’Irak, dans une guerre contre le terrorisme aussi mensongère que désastreuse, violant le droit international, piétinant la souveraineté des nations, multipliant les atteintes aux droits humains, tolérant la torture, les détentions illégales et les crimes de guerre. Le tout en acceptant la persistance de la violation, voire de la négation, des droits du peuple palestinien à un État souverain.
Oui, quand en 2011 ont surgi les révolutions démocratiques arabes, au lieu d’en être solidaire, l’Occident s’est inquiété de la persistance de sa domination au point de pactiser encore plus avec l’ordre ancien des monarchies absolutistes et des dictatures nationalistes. La France de Nicolas Sarkozy y a même ajouté, avec l’intervention en Libye à laquelle la Russie et la Chine ne s’étaient pas opposées, le mensonge d’une guerre aux motifs inavoués car inavouables, dissimulant ses propres corruptions.
Oui, depuis le début de la crise ukrainienne en 2014, l’Europe fut pusillanime, dans un mélange d’inconscience et d’hésitation.
Tandis qu’elle ne rechignait guère à faire affaire – et des affaires – avec l’oligarchie poutinienne, jusqu’à tolérer la vénalité pro-russe de certains de ses anciens dirigeants, elle se reposait sur l’alliance atlantique sous domination américaine au lieu de s’affirmer comme puissance autonome, y compris en matière de défense. Et, dans le même temps, elle se détournait du monde, se barricadant en forteresse sécuritaire et identitaire.
L’Europe qui redécouvre la guerre sur son continent, avec son cortège de réfugiés, de désastres et de misères, est la même qui, le plus souvent, notamment en France, a fermé ses portes aux humanités blessées qui venaient à elle, se refusant à réinventer une relation d’interdépendance et de solidarité avec les peuples méditerranéens et africains.
En témoigne, ces derniers jours, le racisme banalisé et toléré qu’a donné à voir la mobilisation, nécessaire, pour accueillir les Ukrainiens fuyant les combats : elle fut accompagnée de discours sur le fait qu’ils nous ressembleraient (en somme qu’ils sont blancs) et qu’il s’agirait d’une émigration « de qualité » (à l’inverse des migrations venues d’ailleurs) (lire le parti pris d’Ellen Salvi). Pendant ce temps-là, les non-Européens, Africains notamment, qui faisaient de même aux frontières de l’Ukraine étaient refoulés sans ménagement (lire notre reportage à la frontière avec la Pologne).
Cependant toutes ces fautes, voire ces crimes, de l’Occident ne sauraient excuser, encore moins expliquer, l’agression russe.
Elles ont certes favorisé l’avènement de cet impérialisme russe agressif, conquérant et réactionnaire, qu’incarne Vladimir Poutine. Mais elles n’en sont pas la cause, tant cette « Voie russe » qu’il veut imposer à la face du monde a sa logique propre.
L’invasion de l’Ukraine a obligé à prendre conscience, fût-ce tardivement, d’une brutale nouveauté qu’il nous faut regarder en face plutôt que de la ramener à des schémas anciens, automatismes de pensée ou réflexes « campistes ». Celles et ceux qui n’ont aucune sympathie pour les ravages d’un capitalisme économiquement prédateur, écologiquement dévastateur et géopolitiquement dominateur, ne sauraient les brandir en absolution de l’agression russe ou en motif d’abstention face au devoir de solidarité avec le peuple ukrainien.
Déjà, lors des guerres yougoslaves (1991-2001), premier moment du retour du fracas des armes en Europe, il avait fallu affronter cette nouveauté d’États et d’armées issus de l’effondrement du socialisme réel qui épousaient une idéologie meurtrière, nationaliste et raciste, au point de commettre des crimes contre l’humanité dont furent victimes les musulmans de l’ex-Yougoslavie.
Le dilemme fut alors de ne rien faire et de s’en laver les mains, ce qui était impensable aussi bien moralement que politiquement surtout après le crime génocidaire de Srebrenica en Bosnie, ou bien d’agir, quitte à accepter que la riposte se fasse dans un cadre discutable et critiquable – en l’occurrence, pour le Kosovo, celui de l’OTAN hors d’un mandat de l’ONU (j’y ai consacré un essai en 1999, L’Épreuve chez Stock).
L’appel des gauches ukrainiennes, russes et polonaises
Il est pourtant facile de sortir de ce faux dilemme : il suffit d’écouter les premiers concernés, notamment les voix ukrainiennes, russes ou polonaises qui partagent les engagements socialistes et anti-impérialistes des gauches radicales européennes. Pour elles, comme lors de l’intervention russe en Syrie (lire ici une tribune de Farouk Mardam Bey sur Mediapart), il n’y a pas débat, sauf à devenir complice d’une nouvelle domination oppressive et criminelle.
Il en va ainsi du Mouvement social, nouvelle organisation politique en Ukraine qui regroupe des syndicalistes et des militant·es issu·es de diverses anciennes organisations de gauche. Dénonçant « la renaissance de l’impérialisme russe », elle a lancé « un appel à la gauche internationale pour qu’elle condamne les politiques impérialistes du Kremlin et fasse preuve de solidarité envers celles et ceux qui ont souffert d’une guerre qui dure depuis près de huit ans ».
« Malheureusement, développe-t-elle, le déclin de l’impérialisme américain ne s’est pas accompagné de la montée d’un ordre mondial plus démocratique, mais de la montée d’autres impérialismes, de mouvements fondamentalistes et nationalistes. Pour cette raison, la gauche internationaliste, qui n’a l’habitude de combattre que l’impérialisme occidental, devrait repenser sa stratégie. Tout comme l’empire russe était le gendarme de l’Europe au XIXe siècle, le régime de Poutine est désormais le garant de l’absence de changement social et politique dans l’espace post-soviétique. »
Dans une interview accordée à Dnevnik, un quotidien slovène, l’historien russe Ilya Boudraitskis, qui vit à Moscou et reste une des voix critiques de gauche du régime poutinien, ne dit pas autre chose : « La gauche européenne a perdu tout intérêt pour l’internationalisme. Ils voient le monde comme un conflit entre l’impérialisme américain et ceux qui s’y opposent. Parmi eux, de façon surprenante, on trouve de la sympathie pour Poutine, parce qu’il résiste à la domination politique des États-Unis. Il me semble qu’à la lumière du conflit en Ukraine, il est urgent de renouveler l’approche internationaliste de la gauche européenne. »
« Ce serait très pratique pour nous », ajoute non sans humour Ilya Boudraitskis alors même qu’il lance un véritable cri d’alarme : « Nous sommes dans une situation pire que durant la guerre froide. » Pourquoi ? Parce que « l’éthique de responsabilité » a déserté les relations internationales, dans les deux camps, explique-t-il. Et parce que la Russie poutinienne, à la différence de l’Union soviétique pendant la guerre froide, « ne peut prétendre offrir une alternative idéologique, politique, sociale ou économique à l’ordre américain ».
Enfin, venue de Pologne, voici cette autre adresse « à la gauche occidentale : vous n’êtes pas obligé d’aimer l’OTAN, mais la Russie n’est pas la partie la plus faible et la plus menacée ». Elle émane du parti de gauche Razem, qui signifie « ensemble » et dont l’orientation le rapproche du Podemos espagnol ou de certaines composantes de La France insoumise.
« Depuis des décennies, écrivent quatre de ses dirigeants, la Russie essaie de se présenter comme une victime entourée de forces hostiles qui menacent sa sécurité. Les faits contredisent cela. C’est la Russie, avec une armée puissante, un puissant arsenal d’ogives nucléaires et des ambitions impériales, qui tente d’imposer sa volonté à ses pays voisins – et c’est à cela que la gauche doit s’opposer. »
Bref, face à ce nouvel impérialisme russe, il n’y a pas à barguigner. Toute posture d’équidistance, renvoyant dos à dos des adversaires qui seraient tous deux menaçants, revient à en sous-estimer la nouveauté et la dangerosité. Dès lors, la réponse ne saurait être le retrait sur un Aventin national, dans une illusoire position d’équilibre au prétexte d’un non-alignement. Face à un péril de cette ampleur, il n’est d’autre riposte que dans l’inter-nations, cet internationalisme dont le délaissement par les gauches européennes a pavé la voie du retour des nationalismes identitaires et xénophobes. Et, par voie de conséquence, d’un nouvel impérialisme conquérant et dominateur.
De plus, sa genèse précédemment rappelée souligne combien toute ambiguïté envers le régime poutinien revient à passer par pertes et profits un enjeu décisif du point de vue de l’émancipation, de ses luttes et de ses revendications : la question démocratique.
Comme en témoignent ses soutiens d’extrême droite, la tolérance envers l’actuel pouvoir russe est l’indice d’une fable car cette question des nationalités est au cœur de la persistance du passé stalinien dans l’idéologie poutinienne. En matière de libertés, et c’est peu dire : en vrai, d’une fascination pour les pouvoirs autoritaires.
Bataillant en 1941, au début de la Seconde Guerre mondiale, contre les intellectuels de gauche qui renâclaient à s’aligner derrière leur gouvernement dans le combat contre le nazisme, George Orwell leur concédait volontiers toutes les tares du régime britannique, qui était encore un empire.
« Après tout, si les Allemands sont cruels avec les Polonais, notre propre comportement en Inde n’est pas tellement meilleur », écrivait-il par exemple. Mais c’était pour mieux asséner, comme une tranquille évidence, que si un crime reste un crime, qu’il ait été commis par une démocratie ou par une dictature, il n’y a pas pour autant d’équivalence entre les deux régimes, l’un permettant de le contester quand l’autre l’interdit : « Dans un pays comme le nôtre, nous n’avons pas peur de nous lever pour dire ce que nous pensons. »
Pour que le peuple ukrainien aujourd’hui, le peuple russe demain, les autres peuples d’Europe centrale et orientale, puissent encore se lever pour dire ce qu’ils pensent et choisir librement leur destin, il n’est d’autre urgence que de soutenir, défendre et aider, y compris militairement, celles et ceux qui résistent à l’agression de ce nouvel impérialisme russe.