Il y a des jours où j'en veux à tout le monde, à commencer par moi-même.
Je me dis, c'est bien, reste là derrière ton écran pendant qu’elle se bat sur tous les fronts.
Préserve-toi pendant qu'elle reçoit les coups.
Campe dans les rangs d'une gauche aveugle sur la réalité et incapable de s'unir.
Brandis tes slogans droit-d'hommistes et ferme les yeux sur la dictature religieuse qui se prépare en coulisse.
Dis-toi féministe en laissant une femme aux prises avec la meute.
Fais semblant d'ignorer que sa voix touche au cœur des problèmes de ton pays, ses points névralgiques, son ancrage dans le siècle, sa modernité, l'avenir de ses enfants et sa place dans le monde.
Tu es de celles et de ceux qui la regardent se faire violenter et restent les bras croisés, au risque de devenir une alliée objective de ses ennemis devant l’Histoire.
Alors, lève toi.
Lève-toi contre ceux qui manient l’orgueil et le mépris à son égard, et dis leur qu'ils ne sont pas les aristocrates de la pensée et elle la petite pauvresse venue de nulle part.
Qu'ils ne peuvent pas faire la fine bouche comme s'ils avaient une autre alternative à proposer.
Dénonce ceux qui, tous les jours lui lancent une accusation, lui inventent une tare, un manquement, une dérive, l'injurient et la moquent.
Dis leur que si elle les dérange, qu'ils ne se rallient pas à elle, mais qu'ils ne l'attaquent par sans raison ou par pur machisme.
Son programme ne les convainc pas ?
Qu'ils en débattent avec ses troupes. Elle ne correspond pas à leurs critères intellectuels ?
Qu'ils lui concèdent la stature d'une Mère Courage qui jamais ne faiblit ni ne baisse les bras.
Son physique et sa dégaine ne correspondent pas à leurs goûts ?
Qu'ils essaient d’avoir un peu, mais vraiment un peu, de la clarté de son discours, l’indéniable de son raisonnement, ses vraies qualités de tribun.
Elle passe le plus clair de son temps à dire non aux projets obscurantistes, au terrorisme, à la corruption, à la déliquescence de l’État, et vous râlez ?
Elle veut extraire le mal et son origine et vous lui demandez de l’occulter, de tourner autour comme tant d’autres qui nous gavent de formules d'« entente nationale » visant à noyer le poisson et frisant l'imposture, ou de vœux pieux de justice et de dignité, ces arlésiennes de la Révolution...
Qu'on prenne garde au jour où l’on ne nous traitera plus en citoyens mais en croyants uniquement ; où l’on fera de nos enfants les contingents de soldats daéchiens, et alors, ne venons pas pleurer.
Ce jour où notre liberté d’être et de penser, notre création, notre art, notre désir du monde seront frappés d’anathèmes et considérés comme blasphématoires.
Ce jour, Mesdames, où l’on nous assignera de nouveau au régime de tutorat et à la polygamie, où nous reviendrons contraintes et forcées au patriarcat et n'aurions d'autres missions que de servir de « moule » à procréer.
Nous aurons alors tout le temps de méditer dans nos cuisines ce que nous n'avons pas fait et aurions du.
J'exagère ?
J'espère bien.
Je me trompe ?
C'est un risque à prendre. Est-ce que je fais l'impasse sur l'absolue nécessité de la démocratie, de la liberté individuelle et de l'égalité des sexes, y compris dans l'héritage ?
Certainement pas.
Celle que je défends dans ces lignes doit nous en donner les gages.
Si toute son énergie se concentre aujourd'hui sur son adversaire, il y aura un moment où elle se prononcera sur les valeurs universelles.
Et si elle a le mérite de ne pas tomber dans le consensus à tout prix, le bons sens politique lui dictera de nous rassembler.
Ce jour là, nous aurons gagné.
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