vendredi 30 décembre 2011

LA TUNISIE DANS LE JEU GÉOPOLITIQUE DE L’ISLAM : ENTRE ARABIE, IRAN …. et QATAR.

Cet article a été publié dans : 
Le Nouvel Observateur Plus 
Kapitali
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... article réactualisé.

L’agitation introduite avec violence et rapidité par Ghannouchi dans la société tunisienne depuis son retour de son exil doré londonien en janvier 2011, et qui s’est soldée par l’installation au pouvoir de son parti Ennahdha (branche des Frères musulmans en Tunisie), a son origine dans une guerre d’influence entre deux tendances diamétralement opposées entre sunnites et chiites.

Un rappel historique :
A la mort du prophète Mohammad, son compagnon et beau père Abou Bakr esseddiq, qui sera le premier calife a dit : " Que ceux qui ont adoré Mohammad, sachent qu’il est mort, et que ceux qui ont adoré Dieu, sachent qu’il est éternel ".
Ce qui n’a pas plu à la famille de Mohammad qui prétend que le pouvoir que détenait le prophète comme chef temporel, lui revient. Mohammad n’ayant aucun fils vivant, elle décide que ce pouvoir échoit à son gendre Ali.

Ceux qui ont suivi Ali ont crée une scission appelée "chi'â" parce qu’ils lui ont fait allégeance (« châya’oû Ali »). Une guerre de succession aura lieu avec batailles sanglantes entre les deux clans : les héritiers de Mohammad d'un coté et ses successeurs les « sa’haba » (les compagnons), de l'autre.

Ali, sa famille et ses sympathisants se sont finalement réfugiés dans l’actuel Irak. Où les fils d’Ali, El Hassan et El Hussein seront assassinés. Ainsi il ne reste plus de descendant mâle au prophète Mohammad.
Depuis, deux mouvements islamiques mèneront le monde musulman avec tantôt la domination de l’un, tantôt la domination de l’autre.

Ces deux courants de l’Islam se distinguent par les sources utilisées pour écrire le droit musulman :

1 - les Sunnites : dont la doctrine s’appuie sur 4 sources :
-  sur le Coran, puis pour les cas non directement évoqués dans le Coran, ils utilisent
-  la « sunna » qui est la conduite du prophète, dont les actes ont valeur de loi. D’où l'appellation « sunnites » pour les adeptes de la « sunna ». La « sunna » étant elle-même l’ensemble des « hadiths » du prophète (somme de ses commentaires) + « es’sira » du prophète (ses faits et gestes). Puis
-  le consensus des jurisconsultes musulmans « Al ijma’â ». Puis finalement
- la déduction juridique : « Qiyas » des jurisconsultes, à condition qu’elle ne contredise pas les 3 références précédentes.

Il existe d’autres sources de références selon les écoles sunnites, ou « madhhab » (obédience). Les 4 principales écoles étant :
- le malékisme, 
- le hanafisme, 
- le chafiisme, et 
- le hanbalisme dont une manifestation récente est le wahhabisme. (Adeptes de l'école sunnite de l'imam Ibn Hanbal (Amad ibn Mohammed) né et mort à Baghdâd (780 - 855). Rejetant en matière de religion tout raisonnement et recherche personnelle, il ne prône pratiquement que la pure tradition. En opposition avec la doctrine de l'ascèse Wacil ibn'Ata (mort en 670), les membres de sa secte (les mu'tazilites) se dressèrent contre les docteurs orthodoxes de l'Islam en privilégiant la raison par rapport à la tradition. Ils argumentaient que l'homme peut choisir entre le bien et le mal, et qu'en conséquence il sera jugé bon ou condamné par Allah selon ses actes. Egalement selon leur thèse le Coran créé, ne peut être éternel comme Allah. Cette théorie fut imposée par le calife abbsasside Mâmùn en 833 et la secte des dissidents hanbalites dut subir les effets d'une rigoureuse inquisition. L'orthodoxie reprit sa prépondérance en 847 avec l'arrivée au pouvoir d'al-Mûtawakkil.)

2 - les « chi’ites » : après l’assassinat d’El Hassan et d’El Hussein, ceux-ci devenant leurs martyres emblématiques, le pouvoir spirituel dont bénéficiait la famille du prophète, selon eux se transmet par Dieu à des Ayatollah ("aya" = preuve) dont le nom se traduit par « preuve de Dieu sur terre ». Ce qui leur donne un pouvoir spirituel d’essence divine.

Et ayant rappelé cela, il est clair que « Ayatollahs et fatwas » ne sont que de pures créations humaines, ce qui choque profondément les sunnites.


Ces deux tendances se considèrent mutuellement comme « illicites et impies » par leur idéologie fondatrice même. D’où les guerres qu’ils se font depuis toujours au nom d’Allah et qui ne sont, de toute évidence, que des guerres humaines pour le pouvoir.

L’aire d’influence de ces deux tendances religieuses se traduit géographiquement depuis quelques siècles par la répartition suivante :
-  Sunnites : au Moyen Orient, en Afrique de l’Est et en Afrique du nord jusqu’en Espagne.
-  Chi’ites : en Iran, une partie de l’actuel Irak et un peu tout autour (Syrie, Liban…).
Pourcentage de musulmans par pays


vert : sunnisme, rouge : chiismebleu : ibadisme

Pour les sunnites il y aura plusieurs écoles d’interprétation du Coran sur la base des « hadith + sira du prophète » (commentaires du prophète et sa biographie), qui donneront le droit musulman sunnite. Dont voici les plus importantes :
-  Ecole malékite  école suivant l’Imam Malik Ibn Anas : très dominante en Afrique du Nord, basée sur " l'ijtihad " (l'exégèse) permanent et utilisant pour cela la dialectique des "philosophes grecs";
-  Ecole hanbalite, école de l'imam Ahmed Ibn Hambal, qui prône l’origine divine du droit : très dominante en Arabie et tout autour, excluant la dialectique philosophique, préfère la rigueur textuelle et une lecture littéraliste du Coran.

Pour l’Imam Malek, en gros, il préfère légiférer au cas par cas et « philosopher » à la manière des philosophes grecs pour trouver la solution à ce qui n’est pas clairement exprimé….
Le malékisme est ancré en Tunisie depuis des siècles. 
La Grande Mosquée de Kairouan, appelée aussi mosquée d’Oqba Ibn Nafiî, était réputée depuis le IX éme siècle pour être l’un des plus important centres d’enseignement de la jurisprudence malékite.

Tandis que pour l’Imam Ahmed Ibn Hambal, au contraire il veut tout anticiper et réguler; en ne se basant que sur une interprétation « textuelle » du Coran et de la sunna, sans « philosopher ».

L’école hanbalite donnera naissance à un mouvement plus rigoriste « les salafistes qui prennent pour modèles les salafyouns » (prédécesseurs qui ne sont autres que les compagnons du prophète dont les 4 premiers califes "er-rachidoun", ou les sages) qui ont décidé qu’il n’est plus nécessaire de faire d’exégèse (ijtihad) puisque tout a été dit, tout a été commenté et tout a été légiféré … il ne reste au souverain, qu’à appliquer la chariâa (le Droit) somme de tout le travail fait par les « salafiyuons ».

Un imam d’Arabie du nom de Mohamed Ibn Abdel Waheb va encore durcir le salafisme, puisqu’il va le rigidifier par une lecture encore plus stricte et « textuelle » du Coran et de la sunna, mais aussi de la chariâa. L'intention de cet Imam était de ramener l'islam à sa pureté d'origine. Ses fidèles rejettent toute tradition extérieure au Coran et à la sunna et refusent le culte des saints. D’ailleurs la plupart des musulmans se désolidarisent de ce mouvement qu'ils considèrent comme sectaire et extrémiste.

Ce qui fut le cas du Bey Hafside de Tunis, du Dey d'Alger et du Sultan du Maroc : tous ont répondu par la négative à la demande de Mohamed Ibn Abdl Waheb d'adopter le wahhabisme, refusant sa doctrine. 
Le Bey de Tunis motivera son refus dans une lettre, en précisant à ce prédicateur d'Arabie, qu'après consultation des Imams de l'université Ezziouna, ceux-ci l'ont mis en garde contre le wahhabisme le jugeant obscurantiste, rétrograde et dangereux pour la Tunisie. Par conséquent, lui écrira-t-il, il n'a pas de leçon à donner aux tunisiens. 
(lettre dans les archives nationales de Tunis).

Il va codifier tout du comportement que doit avoir un musulman, au quotidien ! (Conduite, tenues vestimentaires, burqa, niqab, barbes pour les hommes, au henné si possible pour reprendre le critère de beauté masculine répandu à la Mecque et adopté par le prophète Mohammad lui même …. jusqu’à s’immiscer dans les rapports intimes du couple pour lui dicter sa conduite).

En somme.... il compose un pack d'utilisant de l'islam prêt à l'emploi à destination des pratiquants !

Il fera un pacte avec le roi Abdel Aziz Ibn Saoud : il soutiendra le pouvoir temporel du roi Ibn Saoud en contre partie il aura le pouvoir spirituel du royaume. Il décrétera que toute atteinte ou contestation de la famille Ibn Saoud gardienne des lieux saints (Médine et la Kaaba…) sera assimilée à la « fitna » (zizanie, dissension), donc à un sacrilège punissable parfois par ma peine de mort, assurant à cette monarchie l'intouchabilité. Ce qui fut convenu et que la famille royale perpétue encore en propageant le wahhabisme par tous les moyens, TV comprises; et en le finançant

Après la mort de Abdelwahhab le roi Ibn Saoud cumulera les deux rôles : chef temporel mais aussi chef spirituel, ce que traduit le qualificatif "khadimo'l haramein" (serviteur des deux lieux saints de l'Islam, que sont la Kaaba à la Mecque et la mosquée de Mohammad à Médine), d'où un nouveau pouvoir absolu d'essence divine, pour le monarque !

Sauf que les guerres de ces deux tendances religieuses vont reprendre de plus belle pour une hégémonie la plus étendue possible. Ce sera à qui mieux mieux….
Le pétrole et le gaz naturel; et la richesse qu’ils vont induire, vont faire que la puissance financière et hégémonique :
-  du sunnisme, sera l’Arabie Saoudite,
-  du chiisme, ce sera l’Iran.

La guerre en Afghanistan va donner l’occasion au wahhabisme de se propager dans la région grâce à "Al Qaïda"  (La Base). Il faut rappeler que Oussama Ben Laden est saoudien et de culture wahhabite. 
De retour chez eux, beaucoup de combattants venus aider les afghans, venant entre autres d’Afrique du nord, vont importer le wahhabisme dont ils se sont imprégnés là-bas, aussi bien en Algérie qu’en Tunisie.
Le salafisme wahhabite se propagera plus facilement dans les pays déstabilisés ou en guerre comme le Pakistan, l'Afghanistan, le Soudan, la Somalie, le Niger, les pays balkaniques ... jusqu'en Tchétchénie, financé toujours par les pays du Golfe et d'Arabie.
Mais aussi en Europe dans les quartiers dits "difficiles" parmi les populations "délaissées" et plus particulièrement parmi des jeunes en perte de repère, contents de "recouvrer", pensent-ils, leur identité musulmane.... dans un salafisme complètement étranger au rite de leur parents, mais seule "disponible" sur le terrain grâce à un prosélytisme agressif et au financement de l'Arabie Saoudite, du Qatar et autres pays du Golfe; leur livrant un pack prêt à l'emploi d'un islam dont ils ignorent tout !

Et depuis l’étranger, ils n’ont cessé de faire du prosélytisme au wahhabisme.
La guerre en Irak va donner l’occasion au « chiisme » de se propager au Moyen Orient mais aussi au Liban, en Syrie et en Palestine (Hisb’Allah….)

Sous Bourguiba puis sous Ben Ali, un mouvement d’opposition religieux s’est installé petit à petit en Tunisie. Il se radicalisera suite aux répressions dues aux deux présidents, en adhérant à l'organisation mondiale des Frères musulmans que fonde le wahhabisme.
Certains des fondateurs de ces partis religieux partiront en exil en Angleterre ou en Arabie Saoudite.
Financés et soutenus par les pays du Golfe et plus particulièrement par le Qatar et l'Arabie des Ibn Saoud, où séjournera durant son exil Abdel Fatah Mourou, cofondateur d'Ennahdha. 
En retour, ils ont adopté le salafisme de ces pays, et plus particulièrement le wahhabisme, son expression la plus radicale, pour l'importer en Tunisie.

Après la révolution des jeunes tunisiens le 14 janvier 2011, ils sont rentrés en masse avec à leur tête le fondateur de leur mouvement Rached Ghannouchi. Opportunistes, ils se sont emparés de la révolution, qui nous le savons n’a jamais été « religieuse », pour tenter d'instaurer un régime théocratique, comme dans la péninsule arabique; toujours financés par les pétro monarques.




Or dans la lutte pour l’hégémonie entre l'Iran et l'Arabie, un intrus veut se faire sa place dans le concert des nations : le Qatar, un pays pas plus grand que la Corse, peuplé d’à peine 1,700 million habitants; mais dont le revenu annuel avoisine les 100 milliards de dollars.


Ce jeune État, indépendant depuis 1971, son chef actuel, l'émir Hamad Bin Khalifa Al Thani, a compris que pour se faire une place au soleil et soustraire son pays à l’influence de ses deux grands voisins toujours menaçants, que sont l’Iran et l’Arabie; il lui faut exister "autrement" : acheter les amitiés des démocrates en Occident et jouer la carte des médias à outrance.

Et grâce aux pétrodollars qu’il dépense sans compter, il a pu faire l’un et l’autre puisque Aljazeera-TV se targue d’avoir ravi 50 millions de téléspectateurs à ses concurrents américains et anglais.

Et pour couper l‘herbe sous les pieds des saoudiens, il sera sur tous les terrains : diplomatiques, médiatiques, financiers et même militaires; puisqu’il sera la caution "arabe" pour l’intervention de l’OTAN en Libye ! 
Il entretient de bonnes relations avec les américains à qui il accordera la plus grande base d’aviation militaire dans la région, mais aussi avec leur ami et protégé Israël; comme avec leur ennemi commun à l’Arabie : l’Iran !

Il était le premier à avoir réagi pour récupérer les révoltes arabes :
- il a aidé Ghannouchi et son parti Ennahdha filiale des Frères musulmans, dans la prise du pouvoir en Tunisie.
- Comme il essaie d’installer un ancien d’Al Qaïda, terroriste notoire, dans l’équipe de transition libyenne !
- De même qu’il soutient les "Frères musulmans" en Egypte pour damer le pion aux Ibn Saoud qui soutiennent un parti « Nour » crée de toute pièce et qui prône un salafisme pur et dur, c'est à dire le wahhabisme des Ibn Saoud !   

Si les tunisiens se laissent faire, la Tunisie passera sous influence du Qatar et des Ibn Saoud qui ont infiltré le pays par des salafistes qui veulent diffuser le wahhabisme. 
Les deux nous exporteront leur mode de vie, leur mode de pensée et leur mode vestimentaire …. en échange des aides économiques qu’ils proposent pour notre pays. 
Les tunisiens accepteront-ils d'en payer le prix ?

Or nous savons ce qu’est le wahhabisme dont souffrent en premier les saoudiennes mais aussi les femmes du Golfe ! Comme nous savons à quel point cette obédience est liberticide !

Et voilà comment notre Tunisie d’obédience malékite, c'est-à-dire tolérante, pacifiste, pratiquant l’exégèse permanente voulue par le Coran et ne donnant aucun pouvoir à un clergé autoproclamé de réguler sa foi, va tomber dans le salafisme des islamistes, connu pour son intolérance, son dirigisme et sa violence au point de heurter nos traditions religieuses par leurs comportements et leurs tenues vestimentaires d'importation saoudienne qui font injure aux tenues traditionnelles des tunisiens (la jebba) et des tunisiennes (le safsari, la lahfa, la foute, la tagrita….).

C’est à tous les tunisiens de faire barrage au salafisme envahissant et surtout liberticide, qui n’a aucun fondement divin mais résulte uniquement d’un combat humain pour le pouvoir et ne correspond en aucune manière à la longue tradition tunisienne. Car sous couvert de religion, les salafistes font de la politique.
Derrière ces partis islamistes se cache une volonté d'hégémonie du Qatar et des Ibn Saoud sur notre pays.

Rachid Barnat

Voir Le Ressentimentdocumentaire qui illustre le propos. 
Et pour 4,99 euros on peut télécharger Le film du documentaire


Voir aussi :  "Voilà comment on endort les peuples avec la religion " pour les détourner de leurs vrais problèmes : Ce monsieur dénonce la main mise du monarque saoudien sur les médias qu'il finance pour diffuser par parabole dans tout le monde arabophone et musulman, des émissions religieuses à longueur de journée, animées par des pseudos cheikhs recrutés il ne sait où, et dont la " starisation " en fait de riches millionnaires. Le but de telles émissions est d'abrutir les téléspectateurs de " conseils " sur leur vie quotidienne, pour les conformer à la chariâa afin de distinguer entre le " h'ram " (illicite) et le " h'lal " (l'illicite) dans tous leurs actes, en faisant de la religion le nouvel opium des peuples. Le but ultime de telles émissions, est de soumettre tous les téléspectateurs à une seule vision de l'Islam : celle que prône le monarque saoudien : " le WAHHABISME " et de permettre ainsi à L’Arabie Saoudite d’étendre son hégémonie sur ces peuples. Or nous savons que cette obédience salafiste lui est favorable, puisqu'elle le reconnaît comme étant le légitime gardien des lieux saints, donc le légitime chef spirituel de tous les musulmans ! Inondés  par de telles émissions depuis les années 60 grâce aux paraboles, l'effet dévastateur sur les peuples est dramatique : une léthargie endémique doublée d'un obscurantisme grave. Avec une absence totale de vie culturelle et intellectuelle autrement plus utile pour ces peuples.







lundi 19 décembre 2011

L'EXPLOITATION DU MARTYRE : LA TUNISIE PRENDRAIT-ELLE EXEMPLE SUR L’ALGÉRIE ?

Il est choquant qu’Ennahdha pour se légitimer et légitimer Ghannouchi et Jebali, nous ressasse leur "martyre" subi sous Ben Ali.
Pourquoi Hamma Hammami du parti communiste tunisien, n'en ferait-il pas de même, alors que nous connaissons aussi son "martyre" et celui de sa famille ?

Mais voilà certains, par honnêteté intellectuelle, n'en font pas un fonds de commerce !

De même que cette notion de martyre devient un fourre-tout pour adjoindre aux martyrs de la révolution tunisienne les migrants clandestins sur les boat-people, dont la mort et les souffrances, aussi révoltantes qu'elles soient, n'en font pas pour autant des martyrs. 

Sinon le mot finira par être galvaudé et perdra son sens premier : un martyr est celui qui consent à aller jusqu’à se laisser tuer pour témoigner de sa foi.

A propos de l'exploitation faite par les Frères musulmans nahdhaouis des martyrs, il me revient une question pertinente de Wassyla Tamzali, mon e-amie sur Facebook, quand elle me demandait mon avis sur la question. Je n'avais pas saisi alors la question sous-jacente d'ordre politique de sa question !
Ma réponse était théorique, parce que j'ignorais l'étendu de ce phénomène en Algérie ; et à quel point le pouvoir central en avait fait un fonds de commerce pour séduire les Frères musulmans du FIS, trahissant sa propre proximité avec eux; puisque certains membres "historiques" du FLN faisaient partie de cette confrérie. Ceux-là même qui ont rejeté d'un revers de la main les accords d'Evian, signé par les plus "laïcisants" d'entre eux, et ont imposé leur politique d'arabisation & d'islamisation (wahhabisation) de la société algérienne ! 
Ce qui explique la loi d’amnistie pour les "islamistes" des années noires de l'Algérie indépendante, imposée par Bouteflika, dernier des dinosaures vivants, du FLN canal historique.

La Tunisie finira-t-elle comme l'Algérie par ériger le martyre en système politique de gouvernance du pays ? Car nous voyons comment le FLN au pouvoir s'est accaparé les "martyrs" pour s'en revendiquer et se donner une légitimité qu'il n'a plus !
Et tel la papauté du Vatican, la liste des martyrs algériens s'allonge d'année en année comme la listes des saints de l’église catholique ! 

Il suffit de passer de villes en villages en Algérie pour constater ce phénomène de martyrologie, où des monuments aux morts, pardon aux martyrs, se multiplient comme des champignons, le plus monumental, étant celui d’Alger ; où la liste des martyrs s'allonge régulièrement, les nouveaux élus au martyrologe alimentant un clientélisme de la part du pouvoir pour honorer telle famille, telle tribu, tel village ... dont un membre a pu accéder à un niveau important du pouvoir : ministre, député, gouverneur .... 

Et quand on sait que la famille du martyr est dispensée d'impôt et autres taxes, on comprend mieux la multiplication des martyrs !
Monuments aux martyrs dominant la ville d'Alger

Certains algériens, pas dupes du manège du pouvoir central, ironisent à propos de certains "nouveaux martyrs" dont ils connaissaient parfaitement le parcours, souvent bien connu par les villageois, voir par leurs propres parents pour les avoir côtoyés ! 
Ils s'étonnent de découvrir tant de résistants à l'occupant français, alors que le peuple algérien dans son immense majorité se résignait à être colonisé, comme il le fit sous les Ottomans !
Ils assimilent ces nouveaux martyrs, aux résistants de la 25éme heure en France, quand à la libération les français découvrent de nouveaux résistants chaque jour ... ce qui faisait dire à certains, que les français étaient tous résistants !

Rachid Barnat

LA GUÉGUERRE ENTRE LE QATAR ET L’ARABIE POUR LA RECUPERATION DES REVOLUTIONS DU PRINTEMPS ARABE SE POURSUIT

Publié dans : Kapitalis

Entre le Qatar et l'Arabie : les peuples dits "arabes", resteront-ils indépendants ?
La guéguerre Arabo/Qarari, pour la récupération des révolutions du printemps arabe, avec leurs monarques faisant la course à l’hégémonie sur ces peuples, se poursuit sur le terrain dans les pays en révolte. 

Voilà deux pétromonarchies qui, à coup de pétrodollars et de médias personnels, veulent récupérer les révolutions du printemps arabe pour se prémunir d’une probable contagion parmi leurs propres peuples, sous couvert de "rééducation" des populations en révolte à l'Islam. Quelle prétention ! 

Qu'ils commencent par éduquer leurs propres peuples pour les sortir du moyen âge où ils les maintiennent sous perfusion de religiosité obscurantiste, diffusée quotidiennement sur leurs chaines TV, en se servant de la religion comme d'un opium pour mieux les endormir et les dominer ! Qu'ils instaurent un minimum de démocratie et de liberté chez eux, avant de s'occuper des autres pour les "aider" à l'instauration de la démocratie

Après la Tunisie, tombée dans l’escarcelle de l'émir du Qatar avec la complicité de Ghannouchi; depuis que l’émir a misé sur ce Frère musulman, en finançant royalement son parti Ennahdha et en lui faisant une propagande quasi quotidienne, mettant à sa disposition sa chaîne de télévision personnelle Al Jazeera ... la lutte reprend de plus belle en Egypte où l'émir du Qatar fait tout pour son poulain le Frère Musulman Morsi, grâce aussi à sa TV personnelle qui passe en boucle des émissions entièrement consacrées à ce mouvement, reproduisant le même modèle de propagande déjà utilisée avec succès pour Ghannouchi et son parti Ennahdha, en Tunisie. 

Alors que son rival, le roi d'Arabie qui a eu du mal à s’implanter en Tunisie, s’est retourné vers l’Egypte, où il a mis le paquet pour permettre l'émergence subite dans le paysage politique égyptien d'un salafisme pur et dur qu'il est entrain d’implanter dans tout le pays, à coup de pétrodollars à travers les "œuvres caritatives". 
Bon moyen pour « convertir spontanément » au wahhabisme, les masses populaires démunies, comme l’a fait l’émir du Qatar en Tunisie en pratiquant la « business-charity ». Mais aussi par l’envoi en masse de cheikhs et imams pour diffuser le wahhabisme sur place, comme il l’a fait en Somalie et au Soudan !

Pour mieux marquer les esprits, quel meilleur message pouvait envoyer le roi d’Arabie aux égyptiens et au monde entier, que de convertir une ville entière au salafisme wahhabite et obtenir pour son poulain la majorité écrasante lors du premier scrutin « libre » et « transparent », sortant du néant le parti salafiste "Nour", et le classant deuxième parti du pays avec 24,36% des voix, talonnant ainsi les Frères musulmans avec 36,62% des voix ; et çà dans une ville emblématique connue pour être la plus "occidentale" de tout le pays : Alexandrie !

Et dire que ces pétro-monarques prétendent éduquer les tunisiens et les égyptiens qui ont été depuis longtemps les phares du savoir et de la modernité du monde dit "arabo-musulman" !

Les tunisiens, mais aussi les égyptiens, vont-ils admettre de recevoir des leçons de ces monarques dont les peuples n'ont brillé sur la scène internationale que par leur obscurantisme; et eux que par leur cupidité
Sont-ce des modèles pour les peuples qui veulent avancer ?
Ou cachent-ils leur peur des révolutions du printemps arabe pour vouloir tout simplement étouffer dans l'œuf leur désir de liberté et de progrès ? 
C'est cette dernière interprétation qui me semble la bonne. 
Ne soyons donc pas dupes et résistons au wahhabisme envahissant !

Il faut lutter de toutes nos forces pour que Rafik Abdessalam Bouchlaka, gendre de Ghannouchi, ne soit pas nommé Ministre des Affaires Etrangères. C’est d’abord un népotisme scandaleux, un retour évident aux pratiques de Ben Ali qui ont été combattues par les Tunisiens; mais c’est aussi extrêmement grave car ce monsieur est de toute évidence inféodé au Qatar; puisqu’il a eu de grandes responsabilités dans la chaîne privée Al Jazeera de l’Emir du Qatar.
Et voilà le Ministre des Affaires étrangères que l’on voudrait imposer à la Tunisie !

Si le Qatar veut mettre la main sur la Tunisie grâce à Ghannouchi, les Ibn Saoud prennent leur revanche en mettant la main sur l'Egypte.
La Tunisie aurait-elle vocation à subir une nouvelle colonisation ? Après les Français et leurs "lumières", serait-ce le tour des bédouins d'Arabie et leur obscurantisme ?

Rachid Barnat

Lire aussi : Comment le Qatar est devenu la nouvelle voix arabe.

samedi 17 décembre 2011

IL Y A UN AN, S'IMMOLAIT Mohamed BOUAZIZI.

 « Un homme simple, comme il y en a des millions, 
qui, à force d'être écrasé, humilié, nié dans sa vie, 
a fini par devenir l'étincelle qui embrase le monde »3
Tahar Ben Jelloun0.

Article paru dans : Kapitalis et Ifriqiya Magazine
et dans : Palestine Solidarité

17 décembre 2010, date du déclenchement d'une révolte sans précédent en Tunisie et qui se terminera le 14 janvier 2011 par la fuite du dictateur Ben Ali à qui la foule demandait de "dégager" !
Depuis, la révolution a fait son chemin.
Un an après on peut dire que le bilan est globalement positif comparé à ce que d'autres peuples inspirés par la révolution tunisienne, ont fait ou sont entrain de faire pour se débarrasser eux aussi de leur tyran. 
- Moins d'un mois du début de la révolution, le tyran est chassé du pouvoir.
- Peu de morts (environs 300 martyres), en comparaison avec d'autres révolutions,
- Il n'y a pas eu de vacation du pouvoir grâce à une constitution existante,
- L'armée a eu une attitude républicaine ; et l'a prouvée en protégeant le peuple, 
- Le pays a continué à fonctionner, grâce à des institutions solidement encrées dans le pays.
- Malgré quelques couacs, les deux premiers ministres provisoires ont aidé à la mise en place du processus démocratique; qui a aboutit 
- 10 mois après, à des élections transparentes qui ont eu lieu le 23 octobre 2011,
- Les élus du peuple, à leur tour, ont désigné un président du parlement,
- Dans la foulée, la constituante a promulgué une "mini constitution" ou règlement interne pour le fonctionnement du parlement de transition ainsi que celui du gouvernement de transition,
- Un président de la République, un premier ministre et un gouvernement furent nommés, à peine un an après l'immolation de Mohamed Bouazizi.

Tout çà, comparé dans le cadre du printemps arabe, à d'autres pays, reste unique à tout point de vue ! La démocratie, quoiqu'on dise sur son imperfection, fonctionne et s'installe petit à petit dans le paysage tunisien.

- L'Egypte : la révolution a été plus longue et le tyran Hosni Moubarak n'a fini par se retirer qu'au prix de millier de morts. Des élections ont eu lieu, mais la démocratie reste incertaine, les militaires tirant les ficelles....
- En Libye : la révolution a duré plusieurs mois avant que le dictateur Mouammar El Gueddefi ne soit assassiné. Avec des milliers de morts et un pays quasi détruit par les bombardements en tous genres, ceux d’un tyran fou tirant sur son peuple avec la réplique des révolutionnaires, puis ceux des mercenaires de Gueddefi et enfin ceux de l'OTAN, venu assister et protéger un peuple en danger...
Tout est à reconstruire et tout est à créer puisque le pays ne possède aucune institution, tout étant dicté et décidé par le "Guide"....
- En Syrie : malgré plus 5000 morts, le tyran Bachar El ASSAD est toujours en place,  avec un pays saccagé à feu et à sang par un régime devenu fou mais qui s'obstine à demeurer au pouvoir, et une armée divisée s’entre-tuant ...
- Le Yémen : malgré des milliers de morts, le tyran Ali Abdullah Saleh ne se décide toujours pas à dégager. 
Les institutions sont paralysées et le pays est à feu et à sang...
- Au Bahreïn : le roi d'Arabie a très vite étouffé la révolte par l'envoi de ses chars...
- Le Maroc : le roi MVI a su anticiper la révolte du peuple, en acceptant quelques sacrifices. Un semblant de démocratie se met en place.
- En Jordanie : le roi veut bien mais ne peut rien, coincé entre des traditions tribales et un parlement qui ne veut pas céder sur ses prérogatives...
- En Mauritanie : çà bouge, mais rien ne vient.
- En Algérie : des velléités de révolte de la part des algériens, que les dinosaures en place calment (pour combien de temps encore ?), en ouvrant la bourse (réduction du prix de matières premières, augmentation de salaires....
Mais l'armée reste toujours omniprésente. La démocratie pour le moment n'est qu'un slogan "officiel" mais creux, définissant la république algérienne.

Et tout çà, les tunisiens le doivent à ce jeune homme qui a stigmatisé dans son geste désespéré l'injustice et la corruption qui gangrenaient le pays ! 
Mais avant tout, pour clamer son droit à la dignité.
Message très vite relayé par tout un peuple en communion avec lui, qui a abouti à la chute du dictateur Ben Ali. Son immolation sera l’étincelle qui déclenchera la révolution tunisienne et bien au-delà.
Puisque les indignations vont gagner les jeunes des pays arabophones : Egypte, Libye, Yémen, Bahreïn, Syrie, Jordanie, Maroc, Algérie, Mauritanie, Palestine, Irak… 
Mais aussi dans beaucoup d’autres pays du monde : Iran, Chine, Espagne, Belgique, Russie, USA, Israël…
Une ère nouvelle s’est ouverte. Elle est aussi importante que fut celle de la « chute du mur de Berlin » le 9 novembre 1989 ! Désormais les peuples s’expriment et veulent influer sur leur destin.

De là où il est, Mohamed Bouazizi a pris sa revanche sur la tyrannie quand par son geste désespéré il a aidé à faire « dégager » celui qui le tyrannisait. Il a redonné espoir aux peuples qu’il est possible d’influer sur leur destin, s’ils le veulent bien comme dit notre poète national Abou El Kacem Echabi.    
Qu’il repose en paix.

Rachid Barnat


vendredi 16 décembre 2011

POURQUOI LES ISLAMISTES SONT-ILS OBSÉDÉS PAR LES FEMMES ?

«Dans le cerveau d’un salafiste, y a-t-il autre chose que les femmes?», se demande l’écrivain et journaliste égyptienne Fatma Naout dans sa «Lettre aux salafistes égyptiens: Que n’enterrez-vous vives les femmes pour avoir la paix?», publiée dans le quotidien Al Masri El Youm et traduite par le site Maghreb Emergent.
Après ce que beaucoup appelle «la déferlante islamiste»des élections législatives du 28 novembre dernier en Egypte, les préoccupations sur la place et la liberté des femmes dans la société égyptienne se font sentir. Dans la première phase de ces élections, dont les résultats définitifs ne seront connus qu’en janvier 2012, les salafistes ont été propulsés au rang de deuxième force politique du pays avec 24% des voix, derrrière les Frères Musulmans. C’est pourquoi Fatma Naout s’attaque à «l’obsession du corps féminin» de ces islamistes radicaux.
«Toutes les fatwas salafistes consacrent une idée et une seule, que les femmes —et le simple bon sens— rejettent, à savoir qu’une femme n’est qu’un corps, une enveloppe charnelle non douée de raison, un instrument de plaisir, un foyer de tentation ambulant (…). Allumez la télévision, sélectionnez n’importe quelle chaîne, à n’importe quel moment de la journée et vous verrez un salafiste épiloguer sur les bikinis, les shorts, les cheveux, et promettre d’apprendre aux touristes étrangères les bonnes mœurs, les vertus du voile sur cette terre vertueuse, notre terre», déplore l’Egyptienne.
Lassée de cette «conscience hypertrophique du corps (féminin)», elle critique avec force ce mouvement qui prône une pratique de l’islam fondée rigoureusement sur les textes, mais qui, pour elle, déforme totalement cette religion: 
«Pourquoi vous échinez-vous à défigurer l’islam (…), à en donner une image aussi réductrice, comme si son message ne portait que sur les femmes, leurs cheveux et leurs corps? Taisez-vous donc un peu, vos paroles vous condamnent et font offense à la vie. Ou alors enterrez vives les femmes pour que le monde n’appartienne plus qu’à vous. Ainsi, trouveriez-vous la paix, enfin, et nous aussi», conclut-elle.
A lire aussi

NB : Selon les salafistes, la femme est source de tous les maux d'une société ! 
C'est le péché originel repris par les salafistes pour stigmatiser la femme. 
Alors que cette notion n'existe nulle part dans le coran. R. Barnat

mercredi 14 décembre 2011

PREMIÈRE INTERVIEW DU PRESIDENT MONCEF MARZOUKI

Article paru dans : Kapitalis et Ifriqiya Magazine


Palais présidentiel de Carthage 15/12/11.


Voici l'homme qui rassure les tunisiens sur le respect des droits de l'homme, et qui veillera à ce que Ennahdha ne franchisse pas la ligne rouge.

Je veux lui faire confiance, en restant critique sur toute action qu'entreprendra son premier ministre....avec un RV dans 6 mois, pour faire un premier bilan. 
Wait and see.


Tout le long de l'interview, le président Moncef Marzouki s'est montré humain, simple, sincère et émouvant ! 
Son éloquence, que ce soit en arabe littéraire ou dialectal, tranche avec celui que les tunisiens ont "dégagé" le 14 janvier 2011, qui n'a jamais brillé sur ce plan. Ce qui confirme sa bonne maîtrise de deux cultures en bon sadikien, puisqu'il s'exprimait parfaitement aussi en français. Langue que Ben Ali ne maîtrisait pas.
Les 2 journalistes étaient quant à eux, totalement à l'aise. Ils ont pu lui poser toutes les questions que les tunisiens se posaient et lui rapporter toutes leurs inquiétudes. 
Sans la flagornerie à laquelle leurs confrères nous avaient habituée du temps de Ben Ali et qui choquaient tant les tunisiens !

- Sur les libertés, en tant qu'un militant des droits de l'homme, ses propos sont rassurants. Il a bien insisté aussi sur les droits de la femme et sur le respect des acquis qu'elle a eu depuis l'indépendance. En précisant la nécessité de l'accès au travail, pour les femmes, ce qui doit être le premier de leurs droits.
- il rappelle que son mandat, comme celui du gouvernement, n’excéderont pas 1 an, voir quelques mois tout au plus, le temps pour la constituante de parachever la rédaction de la nouvelle constitution.
- Il assure qu'il veillera à ce que l'attribution des postes se fasse au mérite sur CV. Il prône la méritocratie par la compétence pour rompre avec le système  "du piston" que l'ancien régime avait érigé en système, avec ses dérives, dont le clientélisme qui s’était généralisé.
- Quant à la polémique à propos du terme "essafirat", qu'il avait utilisé lors de sa prestation de serment à la chambre des députés, pour désigner les tunisiennes qui font le choix de ne pas se couvrir le chef, il en est étonné; d'autant plus qu'il n'a aucunement l'intention de les blesser ou de les choquer. Qui pourrait lui reprocher la réhabilitation d’un mot de la langue arabe dans son acception d’origine que certains voudraient dévoyer en le connotant péjorativement ?
- Il redit son intention d'envoyer un message clair quant à la liberté vestimentaire dans le respect des lois. En précisant que celles qui veulent se couvrir le visage, ne peuvent se soustraire au contrôle à l'intérieur de l'administration tunisienne....
- Il demande une trêve de 6 mois à toutes les actions corporatistes, politiques..... pour ramener le calme et la sécurité afin de redémarrer la machine économique d'une Tunisie exsangue.
- Il insiste sur le retour de la sécurité et reconnait que la police nationale a été elle-même victime du régime de Ben Ali. Si certains policiers corrompus ont abusé de la situation, d’autres intègres ont souffert du système et ont subit l’injustice à l’intérieur même de l’institution.
- Il a espoir que l'économie redémarre si tout le monde participe de l'effort national, et si le patriotisme primait sur les revendications personnelles et corporatistes. 
- Il compte bien sur l'entraide entre les tunisiens et les libyens, les deux complémentaires pour se sortir de leurs difficultés post révolutionnaires...
- L'insigne qu'il porte sur le revers de sa veste, n’est autre qu’un pin’s représentant le portrait d’un martyr de la révolution, que lui avait accroché publiquement la mère du défunt, contre la promesse qu'il n'oubliera pas les martyres de la révolution.
Il assure qu'il s'occupera personnellement du dossier des martyres, et que le jour où nous le verrons plus arborer la photo que lui avait confiée cette mère, c'est qu'il aura réglé cette question ô combien douloureuse pour les familles des martyres.
- Lors de son investiture il portait un burnous en poil de chameau. Ce qui a interpellé beaucoup de tunisiens. Il dit qu'il provient du village d'origine de sa famille dans le sud tunisien Marzoukia. Il l'a porté pour rendre hommage aux traditions de notre pays en affirmant son identité, mais aussi parce que cela lui avait beaucoup manqué dans son exil en France.
- Devant son refus de porter la cravate : il reconnait que c'est devenu un dilemme pour lui, qui croit que l'élégance est intérieure, dans la personnalité, dans l'éducation et le savoir d'un être....mais nullement dans une cravate. Ceci dit, ses filles la lui recommandent pour le respect de la fonction. Il promet d'en mettre, si Ghannouchi acceptait d'en mettre lui aussi. Rire sur le plateau.

J'espère que son appel pour la trêve sera entendu par tous les tunisiens.
Il nous faut lui faire confiance, tout en restant vigilants bien évidemment sur les actions qu'il mènera avec son ami le premier ministre Hammadi Jebali.

Je sais qu'il faut se méfier des discours qui peuvent être parfaits et la réalité plus contestable.
Ben Ali, lui aussi, lors de sa prise du pouvoir avait fait un discours magnifique. Nous étions nombreux à lui avoir pardonné son coup d'état en blouse blanche du 7/11/87, pour nous avoir débarrassés d'un régime dictatorial dont le chef est devenu sénile. On a vu la suite, hélas ! 
Il faudra donc veiller à la réalité de l'exercice du pouvoir mais il n'y a, aucune raison à priori de ne pas faire confiance à quelqu'un qui a été dans sa vie un ardent défenseur des droits de l'homme.
Je rajoute que Moncef Marzouki, doit être conscient que la seule manière d'entrer dans l'histoire c'est de conduire ce pays vers une réelle démocratie et vers un dynamisme économique.
Enfin je crois fortement que la fonction dans certain cas élève la personne et je pense que nous sommes dans ce cas.
Bon vent monsieur le président.

Rachid Barnat