mercredi 23 septembre 2020

Oum Kalthoum, ou le parcours d'El-Sitt

 

Ma découverte de Oum Kalthoum était d'abord musicale. C'est l'orchestration moderne de "Enta Omri" qui attira en premier mon attention. Chanson que lui avait composée Mohamed Abdel Wahab qui eut l'idée de "moderniser" son répertoire en incorporant la guitare électrique. Prêtant l'oreille au texte, il m'a plu aussi. Et depuis, j'ai cherché à l'écouter à la radio qui la passait souvent ; alors que jusque-là ses rengaines me rebutaient et la longueur de ses chansons m'agaçait. Et plus je l'écoutais, plus je l'appréciais. Je découvrais dans ses textes et dans sa façon de les chanter, toutes les nuances des sentiments qui submergent l'adolescent que j'étais. Elle chantait l'amour, le désir, la passion, la révolte, l'espoir; qui par la modulation de sa voix, faisaient échos à ceux de son auditeur. 

Selon l'état émotionnel où j'étais, il m’arrivait et m'arrive encore, de fredonner ses chansons qui correspondent le mieux, pour le décrire. 

Petit à petit, j'en suis devenu fan à la recherche de ses disques, de ses cassettes radio et plus tard de ses CD et ses vidéos. Adolescent, je guettais son rendez-vous radiophonique mensuel, celui du fameux premier jeudi du mois, au point que mes proches m'avaient surnommé Abou Kalthoum. 

Lors de sa venue en Tunisie en 1968, invitée par le Président Bourguiba, elle a donné un concert à la coupole d'el Menzah, transmis en direct par la TV nationale tunisienne. Mon père qui n'autorisait ses enfants à regarder la TV que parcimonieusement le samedi soir après leurs devoirs pour ne pas perturber leur scolarité, m'avait fait le cadeau de m'autoriser à regarder son spectacle lors duquel elle avait chanté  « Fakarouni », « El Atlal » et « Enta Omri », qui restent des hymnes à l'amour, rarement égalés. C'était la première fois que je la voyais chanter. Sa prestation m'avait subjuguée à la fois par la voix mais aussi par sa bonne tenue, toute en retenue.


Oum Kalthoum - أم كلثوم, née Fatima Ibrahim Sayed Baltagi, فاطمة إبراهيم السيد البلتاجي - dite « Kawkab Echarq - كوكب الشرق / Étoile de l'Orient », était connue pour sa capacité vocale extraordinaire et son style, qui en faisaient l'une des plus grands chanteurs et des plus influents du 20e siècle. Elle a vendu plus de 80 millions de disques dans le monde entier. Elle est considérée comme une icône nationale dans son Egypte natal. Elle est  surnommée « La Voix de l'Egypte », « La quatrième pyramide égyptienne » et « El-Sitt », l'autre nom de la déesse Isis. Elle reste encore, et longtemps après sa disparition, la plus grande chanteuse; aussi bien en Egypte que dans tout le monde arabophone.

Oum Kalthoum est née dans le village de Tamay Zahayira, aux environs de la ville de Senbellawein, gouvernorat de Dakahlia, dans le delta du Nil. Sa date de naissance est imprécise, l'enregistrement des naissances n'étant pas pratiqué en Egypte à cette époque. Certaines sources affirment qu'elle serait née le 18 décembre 1898, d’autres avancent le 4 mai 1904.

Elle est née dans une famille pauvre, de trois enfants. Sa sœur aînée Sayda est alors âgée de dix ans et son frère Khalid d'un an. Sa mère, Fatma Maaliji, est femme au foyer et son père, le cheikh Ibrahim Saïd Baltaji, est imam. Afin d'améliorer les revenus de la famille, il interprète régulièrement des chants religieux (anachid) lors de mariages et autres cérémonies dans son village et aux alentours.

C'est en écoutant son père enseigner le chant et l’art de psalmodier le coran à son frère aîné qu'Oum Kalthoum apprit à chanter et retint ces chants savants par cœur. Lorsque son père se rendit compte de la puissance de sa voix, il lui demanda de se joindre aux leçons qu'il donnait à son frère. Très jeune, la petite fille montra des talents de chanteuse exceptionnels, au point qu'à dix ans, son père la fit entrer - déguisée en garçon - dans la petite troupe de cheikhs (chanteurs du répertoire religieux musulman) qu'il dirigeait pour y chanter durant les Mawlid (anniversaire du Prophète et des saints locaux) et d'autres fêtes religieuses.

À l'âge de 16 ans, elle est remarquée par le cheikh Abou el-Ala Mohamed, un chanteur célèbre, qui lui a enseigné le répertoire arabe classique. Quelques années plus tard, elle a rencontré le célèbre compositeur et oud-iste, Zakariya Ahmadqui l'a invitée à venir au Caire. Même si elle a fait plusieurs séjours au Caire au début des années 1920, elle a attendu 1923 pour s'y installer définitivement. Elle commença à se produire - toujours habillée en garçon - dans de petits théâtres, fuyant soigneusement toute mondanité. Elle a été invitée à plusieurs reprises à la maison d'Amin Mahdi, qui lui a appris à jouer du oud. Elle a développé une relation étroite avec Rawheya Mahdi, la fille d'Amin, et est devenue son amie proche. Oum Kalthoum a même assisté au mariage de la fille de Rawheya, bien qu'elle préfère normalement éviter d'apparaître en public (en dehors de la scène).

Amin Mahdi lui a fait découvrir les milieux culturels du Caire, où elle a soigneusement évité de succomber aux attraits de la vie de bohème. Tout au long de sa vie, elle était fière de ses origines modestes et des valeurs traditionnelles inculquées par son père. Elle en a fait une force qui a sans doute joué dans son image publique.

À ce stade de sa carrière, Oum Kalthoum a été présentée au célèbre poète Ahmad Rami, qui lui a écrit 137 chansons. Rami va l’initier aussi à la littérature française, qu'il admirait tant depuis ses études à la Sorbonne à Paris. Il finit par devenir son mentor.

Elle a été introduite auprès du célèbre et virtuose oud-iste, le compositeur Mohamed Qasabgi, qui l'a présentée au « Palais de Théâtre arabe », où elle connaîtra son premier vrai succès public. En 1932, sa renommée en tant que chanteuse a augmenté grâce à la vente de ses disques, au point d’entreprendre une grande tournée du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, se produisant dans d'importantes villes, comme Damas, Bagdad, Beyrouth, Rabat, Tunis et Tripoli en Libye.

La place d'Oum Kalthoum dans le milieu artistique égyptien

La place d'Oum Kalthoum comme l'une des plus célèbres et populaires chanteurs du monde arabophone, est due à plusieurs facteurs. Au cours de ses premières années de carrière, elle a dû faire face à la concurrence farouche de deux chanteuses de premier plan : Mounira Mahdiya et Fathiya Ahmad, qui avaient des voix similaires à la sienne. Cependant, Mounira avait un mauvais contrôle de sa voix et manquait à Fathiya l'impact vocal émotif qu’avait la voix d'Oum Kalthoum. La présence de toutes ces caractéristiques vocales, attirait de nombreux compositeurs, musiciens et paroliers qui voulaient tous travailler avec Oum Kalthoum.

Au milieu des années 1920, Mohammad Qasabgi, lui-même joueur de oud et compositeur, a formé son petit orchestre (takht), composé des plus virtuoses instrumentistes. En outre, contrairement à la plupart de ses contemporains artistes qui ont tenu des concerts privés, ceux d'Oum Kalthoum étaient ouverts au grand public, ce qui a contribué à la transition de la chanson classique souvent élitiste, à la musique arabe populaire.

En 1934, Oum Kalthoum a chanté pour la première émission de Radio Le Caire, la station de l'Etat. Au cours de la seconde moitié des années 1930, deux initiatives ont scellé le sort d'Oum Kalthoum comme la plus populaire et célèbre chanteuse du monde arabophone pour deux raisons : ses apparitions dans des films musicaux et la diffusion en direct de ses concerts tous les premiers jeudis de chaque mois durant sa saison musicale d’octobre à Juin. Son influence ne cesse de croître et de s'étendre au-delà de la scène artistique puisque la famille régnante royale, lui demandait des concerts privés et assistait même à ses représentations publiques.

En 1944, le roi Farouk Ier d'Égypte lui décerne la plus haute distinction « nishan el kamal » (Insignes de la perfection), une décoration réservée exclusivement aux membres de la famille royale et aux politiciens. En dépit de cette reconnaissance, la famille royale s’était fermement opposée à son mariage avec l'oncle du roi. Un rejet qui a profondément blessé son orgueil et l'a amenée à prendre ses distances avec la famille royale et à embrasser les causes du peuple, comme sa réponse à la demande de la légion égyptienne piégée dans Faluja en 1948 pendant la guerre israélo-arabe, de chanter une chanson pour les soldats. Parmi les hommes de l'armée pris au piège, des chefs qui allaient mener la révolution sans effusion de sang, celle du 23 Juillet 1952, en bonne place figurait Gamal Abdel Nasser, qui sans doute était fan de Oum Kalthoum et qui deviendra plus tard le président de l'Egypte.

Peu de temps après la révolution, l’Union des musiciens égyptiens dont elle est devenue membre, l'avait exclue parce qu'elle avait chanté pour le roi Farouk qui vient d’être déchu. Quand Nasser a découvert que ses chansons étaient interdites de diffusion par Radio le Caire, il aurait dit aux responsables : « Vous êtes devenus fous ? Voulez-vous que l'Egypte se retourne contre nous ? ». Et depuis, la guilde des musiciens a accepté qu’elle réintègre sa place. Oum Kalthoum assurera la présidence de l’Union des musiciens pendant sept ans. 

De plus, Oum Kalthoum était une patriote depuis l'époque du roi Farouk. Certains prétendent que la popularité de Oum Kalthoum a aidé l'agenda politique de Nasser. Par exemple, les discours de Nasser et autres messages du gouvernement, ont souvent été diffusés immédiatement après les concerts radiophoniques mensuels d’Oum Kalthoum. Elle a chanté beaucoup de chansons pour soutenir Nasser, pour qui elle avait une grande amitié. L'une de ses chansons associées au pan-arabiste Nasser, fut «Wallahi zaman, ya silahi » (Par dieu, il est temps de prendre mon arme), chanson guerrière appelant à la mort des juifs sionistes, qui a été adoptée comme hymne national égyptien de 1960-1979. Le président Anouar al-Sadate va l'abandonner en raison des négociations de la paix avec Israël et la remplacer par la moins guerrière « Biladi, biladi, biladi » (Mon pays, ma patrie), qui continue aujourd'hui d'être l’hymne national de l'Égypte.

Oum Kalthoum était également connue pour ses contributions continues aux œuvres en soutien pour les efforts militaires égyptiens. Ses concerts mensuels du premier jeudi de chaque mois, sont réputés pour leur capacité à désengorger les rues de certaines villes les plus peuplées du monde arabophone, quand les gens se précipitent à la maison pour les écouter.

Ses chansons traitent principalement les thèmes universels de l'amour, du désir et de la perte de l’être aimé. Ils n’ont rien d'épique, d’une durée qui se mesure en heures plutôt qu'en minutes. Un concert typique d'Oum Kalthoum se composait de deux ou trois chansons d’une durée de trois à quatre heures. Dans les années 1960, en raison de son âge et de l’affaiblissement de ses capacités vocales, elle a commencé à réduire ses concerts à deux chansons durant deux ans et demi, à trois heures seulement. Ces concerts s’inspirent de l’opéra, composés de passages vocaux longs, reliés par des interludes plus courts. Cependant, Oum Kalthoum n'a pas été stylistiquement influencée par l'opéra. Elle a chanté en solo une grande partie de sa carrière.

Au cours des années trente, son répertoire était novateur dans plusieurs directions stylistiques. Ses chansons étaient virtuoses grâce à ses capacités vocales, au romantisme de ses textes et à la modernité du style musical, nourries des courants dominants de la culture populaire égyptienne de cette époque. Elle a beaucoup travaillé sur des textes du poète romantique Ahmad Rami et sur les musiques du compositeur Mohammad Qasabgi, qui a introduit les instruments européens, tels que le violoncelle et la contrebasse ainsi que l'harmonie.

Elle éclipse ses rivales, s'habille à l'occidentale, une française lui confectionnant ses tenues de scène. Elle élargit son répertoire avec des chansons sentimentales avec une voix intense, vibrante et fragile dans l'intonation, à la technique parfaite. Sa voix a une étendue horizontale et verticale inouïe. Son public se compose de toutes les classes sociales, touchant aussi bien les masses populaires que les élites et les intellectuels.

Parallèlement à sa carrière de chanteuse, elle s'essaie au cinéma en jouant le rôle principal des films Widad en 1936 de de Fritz Kramb et Gamal Madhkour, d'après un conte des Mille et une nuitsLe chant de l'espoir en 1937 ; Dananir en 1940 ; Aïda en 1942 d'Ahmed Badrakhan, Sallama de Togo Mizrah en 1945; et Fatma en 1947 d'Ahmed Badrakhan. Mais elle délaisse assez vite le septième art, ses yeux atteints de glaucome ne supportant pas l’éclairage des plateaux. 

En 1953, elle épouse son médecin, Hassen Hafnaoui, tout en incluant une clause lui permettant de prendre l’initiative du divorce, le cas échéant.

Sa carrière musicale s'étendant du milieu des années vingt au début des années soixante-dix, illustre la modernisation de la musique orientale dont elle est certainement la représentante la plus importante du XXe siècle. Ayant débuté dans le registre savant moyen-oriental avec des compositions de Zakaria Ahmed, ou du Cheikh Abou el-Ala Mohamed, son style a évolué au fur et à mesure des transformations, modernisations (voire acculturation) du discours musical égyptien entre les années quarante et le début des années soixante-dix. Son ensemble musical (takht) des années trente s’étoffe et se transforme graduellement en orchestre oriental, multipliant les cordes frottées, et introduisant graduellement des percussions empruntées à la musique populaire (tabladarbouka) et des instruments tirés de traditions exogènes tels que guitare, piano, accordéon, saxophone, orgue ... dès les années soixante. 

La transformation du discours mélodique est d’abord discrète avec les créations du compositeur Riadh Sambati, qui monopolise presque la chanteuse entre 1954 et le tournant des années 1960 ; puis, Baligh HamdiMohammed Mougui, ou Mohammed Abdel Wahab, artisans majeurs de ce processus. 

Cette modernisation opérée autour de la personnalité d'Oum Kalthoum a donné naissance à un genre musical oriental nouveau qui a par la suite été largement imité : la chanson longue ou fleuve, en plusieurs parties; dont la structure s'inspire en partie de la wasla classique arabe (suite de chants savants) mais également des opéras ou poèmes symphoniques occidentaux. 

Dans de nombreux concerts, ces œuvres offraient de larges plages d'improvisations bouleversantes qui ont largement participé à fonder le mythe Oum Kalthoum. Certains musicologues considèrent ces œuvres comme une nouvelle étape dans l'histoire de la musique savante arabe; d'autres les opposant à l'héritage khédival (Turc), les considèrent plutôt comme appartenant à un genre hybride, intermédiaire entre le registre savant et la variété populaire, les qualifiant ainsi de "genre classicisant".

Concernant ses textes, alors que la poésie traditionnelle regorgeait de « gazelles » et de « regard perçant, tel une flèche », Oum Kalthoum a inventé, en collaboration avec ses auteurs attitrés Ahmad RamiAhmad Chafiq Kamel et Bayrem Tounsi (le tunisien) principalement, une nouvelle rhétorique révolutionnant l’expression de l’amour dans la littérature arabophone populaire : les longues plaintes classiques ont peu à peu cédé la place à ce qu’on a appelé des « monologues » – œuvres à l’intérieur desquelles l’instance amoureuse explore les nuances de la perception de ses propres sentiments, exprime ses doutes et ses états d’âmes contradictoires. Il n’y a plus du tout un homme et une femme, mais un être et son amour, invoqué par l’éternel vocatif habibi, dont la voyelle intérieure se prête aux multiples modulations permettant d’exprimer les nuances des sentiments éprouvés. Sans compter le fameux ya (équivalent du Ô français) qui le précède habituellement, et qui permet à la chanteuse d’explorer les nuances de son ethos.

L’être aimé est désigné par des substantifs qui peuvent être considérés comme neutres du point de vue du sexe : rouhak (ton esprit), hawak (ta passion), bo’dak (ton éloignement), ’orbak (ta proximité), ’albak (ton cœur), redhak (ta satisfaction). Plus de références physiques bornant l’identification, mais de pures abstractions sentimentales, de purs blocs de désir qui peuvent être investis et accaparés par toutes et tous. Des situations, des épreuves, des réflexions appropriées à tout ce qui compose un monde, offertes à tous ceux et toutes celles qui veulent s’en saisir.

L’être social Oum Kalthoum, est une femme subversive, assumant parfaitement son rôle dominant dans la scène musicale orientale : véritable patronne de l’orchestre et chef de l’entreprise artistique et culturelle qu’elle mène, véritable leader de cette équipe d’hommes qui ont travaillé pour elle, elle assume aussi le fait de dire des sentiments amoureux et d’exprimer des opinions politiques devant des millions d’auditeurs fascinés, hurlant, dénonçant et criant ses révoltes, chuchotant ou susurrant ses doutes et ses secrets les plus intimes. Le caractère subversif d’Oum Kalthoum réside aussi dans le fait qu’elle représente poétiquement, avec sa voix mais aussi son corps sur scène, les aspirations d’hommes et de femmes dans le cadre d’un imaginaire transgenre.

Principalement et largement consacrée au thème de l'amour, son œuvre a également abordé à la marge d'autres thématiques comme la religion ou la politique. Le genre patriotique en effet, à l'époque des décolonisations généralement et du nationalisme arabe (panarabisme) particulièrement, s'est essentiellement illustré dans des chants dénonçant l'oppression coloniale et glorifiant les peuples "arabes".

Multipliant les concerts internationaux, elle effectue sa première prestation dans un pays occidental en France à l'Olympia pour deux prestations devenues mythiques : les 13 et 15 novembre 1967, juste après la défaite de la guerre des 6 jours pour aider Nasser. Elle a été pour le directeur Bruno Coquatrix, l'artiste la mieux payée à se produire à l'Olympia. Elle fera don de son cachet au gouvernement égyptien. Bruno Coquatrix croyait avoir affaire à une danseuse du ventre, pour se rattraper et dire qu'elle est descendante du prophète Mohammed, que tout bon musulman qui va à la Mecque se doit d'écouter Oum Kalthoum; pour dire son ignorance totale du phénomène Oum Kalthoum et du monde dit "arabo-musulman" ! Quand elle lui a proposé d'interpréter deux chansons, il lui a dit que cela ne fait pas un spectacle, habitué aux chansons de 6 minutes tout au plus !  

Revendiquant ses propres origines paysannes, la chanteuse a toujours vécu sans ostentation, souhaitant rester proche de la majorité de ses compatriotes. Sur scène elle était d’une bonne tenue à la fois vestimentaire et comportementale. Bien que son public touche à l’extase par ses variations, elle reste toujours digne et ne tombe jamais dans la familiarité ni dans la vulgarité pour le séduire. Ce qui lui vaut l’amour dans le respect de la part de son public.

L'apogée d'Oum Kalthoum

Les directions musicales des années quarante jusqu’au début des années cinquante et le style d'interprétation mature d’Oum Kalthoum, ont fait de cette période son « âge d'or ». Conformément à l'évolution des goûts populaires, ainsi que ses propres penchants artistiques, au début des années quarante, elle a demandé des chansons au compositeur Zakariya Ahmad et au poète Mahmoud Bayram Tounsi qui puisait dans des styles typiquement égyptiens. Cela représente le début des chansons romantiques modernistes. 

Oum Kalthoum n’a plus chanté la musique de Mohammad Qasabgi depuis le début des années 1940. Leur dernière collaboration étant « Raq el Habib » (Mon bien aimé, redevient tendre) en 1941, l'une de ses plus populaires chansons, de grand niveau de virtuosité. La raison de leur séparation n’est pas claire. On dit que cela était dû en partie à l'échec populaire du film Aida, où Oum Kalthoum chante la plupart des compositions de Qasabgi, y compris la première partie de l'opéra. Qasabgi expérimentait la musique orientale, avec des influences de la musique classique européenne et composait aussi beaucoup pour Asmahan, une chanteuse syrienne qui a émigré en Egypte, unique concurrente sérieuse pour Oum Kalthoum et qui va mourir dans un accident de voiture en 1944.

Dans le même temps, Oum Kalthoum a commencé à collaborer avec un compositeur plus jeune qui a rejoint son équipe artistique quelques années plus tôt : Riadh Sambati. Alors que Sambati était influencé par Qasabgi dans ces premières années, les lignes mélodiques qu'il composa étaient plus lyriques; et en plus, répondent mieux aux attentes du public d'Oum Kalthoum.

Résultat de ses collaborations avec Rami / Sambati et Tounsi / Ahmad : un répertoire populaire au succès durable pour le public égyptien.

En 1946, contre toute attente, Oum Kalthoum chante un poème religieux en arabe classique au cours de l'un de ses concerts mensuels, « Salou qalbi » (Interrogez mon cœur), écrit par Ahmed Chawki et composé par Riadh Sambati. Le succès est immédiat. Il a reconnecté Oum Kalthoum avec ses débuts ; et le style unique de Riadh Sambati dans la composition, fera de lui le meilleur compositeur pour les poèmes en arabe classique, dépassant Mohammed Abdel Wahab. Des poèmes semblables écrits par Chawki ont ensuite été composées par Sambati et chantés par Oum Kalthoum, y compris « Woulida el Houda » (1949) (Il est né le Guide), dans lequel elle a fait sourciller les royalistes en chantant un verset qui décrit le prophète Mohammad comme « l'imam des socialistes ».

Au sommet de sa carrière, en 1950, Oum Kalthoum a chanté une composition de Riadh Sambati à partir d'extraits, de ce que Ahmad Rami considérait comme l'accomplissement de sa carrière : la traduction du persan à l'arabe classique, des quatrains d'Omar Khayyam, « Roubayiat el Khayyam ». Une chanson qui mêle épicurisme et rédemption

Composée en 1966 par Riadh Sambati sur un poème en arabe classique de Ibrahim Naji« El-Atlal » (Les Ruines) est la chanson d’amour la plus célèbre d’Oum Kalthoum. Une allégorie politique selon certains : une évocation de la défaite égyptienne. « Quand, en 1982, Yasser Arafat quitta Beyrouth assiégé, il s'écria: « D'un pas assuré, je marche tel un roi », un vers emprunté à El Atlal ! Cette mélopée immortalisée par Oum Kalthoum, dure une heure et demie. 

Bien que cela soit discutable, les capacités vocales d'Oum Kalthoum ayant considérablement baissé, la chanson peut être considérée comme le dernier exemple de la musique authentique arabe à un moment où même Oum Kalthoum a commencé à faire des compromis en chantant des morceaux d'influence occidentale, composés par son ancien rival, Mohammed Abdel Wahab.

La durée des chansons de Oum Kalthoum lors de ses concerts publics, n'est pas fixe. Elle variait en fonction du niveau d'interaction émotionnelle de la chanteuse avec son public et de sa propre inspiration créative. La technique d’improvisation typique du vieux chant arabe classique, elle l’a pratiquée aussi longtemps qu'elle pouvait le faire ; limitée toute fois par la baisse de ses qualités vocales due à l’âge mais aussi à l'occidentalisation accrue de la musique orientale, devenue un obstacle à cet art.

Elle répétait parfois un ver ou plusieurs, en modifiant subtilement l'accent et l'intensité émotionnelle en explorant une ou plusieurs échelles modales musicales (maqâm) entraînant son public dans un état extatique, dit « tarab / طرب ». Par exemple, la durée live disponibles de « Ya Zalemni » (Tu es injuste avec moi), une de ses chansons des plus populaires, est d’environ 30 minutes, durée qui passe à 45 voire 90 minutes, selon son humeur créative pour des improvisations et selon la demande de son public pour d’avantage de reprises. Ce qui illustre la dynamique relationnelle entre la chanteuse et son public et alimente l'énergie émotionnelle de l'un et de l’autre.

La créativité spontanée d'Oum Kalthoum en tant que chanteuse, est impressionnante quand on écoute ses nombreuses interprétations d’une même chanson sur une période de cinq ans (1954-1959). L'auditeur se voit offrir une interprétation tout à fait unique et différente chaque fois. Cette relation personnalisée entre lui et la chanteuse, est sans aucun doute l'une des raisons de l’immense succès d'Oum Kalthoum en tant qu'artiste. A noter cependant, que la durée d'un récital, ne reflète pas nécessairement la qualité d'improvisatrice d’Oum Kalthoum. Certaines de ses meilleures performances duraient 25-45 minutes, comme les trois interprétations disponibles, y compris la version commerciale de mars 1955, d' « El awila fil gharam » (La première chose en amour) et de « Ana fi intizarak » (Je suis dans ton attente). D'autre part, ses chansons du milieu des années soixante, se prolongeaient parfois d’une durée de deux heures, comme lors de la première de « Enta Omri » (Tu es ma vie), « Enta el Hob » (Tu es l'Amour), etc. Cependant, les répétitions, la plupart du temps exécutées à la demande du public, étaient souvent dépourvues d'improvisations musicales. Elles se limitaient aux variations colorées vocales d’Oum Kalthoum, sur une syllabe, une lettre ou un mot.

Oum Kalthoum et ses musiciens en studio sous la direction du compositeur Baligh Hamdi – 1964. 

Oum Kalthoum avait l'habitude lors de ses récitals de tenir un foulard dont elle se servait pour s'éponger le front mais dont elle se servait aussi comme d'une baguette de chef d'orchestre pour demander au chef de sa troupe de moduler en fonction de son interprétation et de ses improvisations, ou de reprendre un couplet ou tout un passage en fonction de la réaction de son public. 

Longtemps, ce ne fut qu'une voix. Une voix prenante. Une voix de plaintes et d'envolées, de soupirs et d'arrachements. Une voix d'entrain et d'ensorcellement. Une voix d'avant les voix : une voix "première". Une voix de sable et d'air lourd, de terre et de lumière, une voix d'éclat, une voix de joie et de tristesse, une voix toujours pleine et grave y compris dans l'enthousiasme.

Oui, au plus profond de cette voix, il y a comme le parfum de l'histoire des hommes. Mais un parfum entêtant et déchirant. Car cette voix offre à ses auditeurs une mélopée en rupture permanente, en soubresauts savants, en retenues singulières. Une voix sûre d'elle-même, courant son risque, sévère, rugueuse, sans artifice. Ce n'est pas ici une question de timbre, de vibration. Ce n'est pas non plus une question d'intonation, de silences ou de technique. Non, c'est un précipité de tout cela, une combinaison unique, une alchimie. 

Quand elle se lève, un foulard de mousseline à la main, son collier de perles autour du cou, sa voix subjugue d'entrée. Elle s'aide parfois de l'avant-bras au terme d'une envolée. C'est tout. Oum Kalthoum chante; et la ferveur se lit sur les visages. Le respect et l'extase aussi quand elle improvise avec maestria. Des mots d'amour, souvent. Des complaintes pudiques où l'on s'aime et où l'on se quitte, où l'on espère et où l'on se torture. Des mots qui convoquent le destin et Dieu tout-puissant. Des mots qui puisent encore dans le nationalisme le plus réaliste pour ne pas parler de réalisme socialiste. Et pourtant, la magie reste entière. L'intensité intacte. Sa voix emporte tout.

Vers 1965, Oum Kalthoum a commencé à collaborer avec le compositeur Mohammed Abdel Wahab après que le raïs Gamel Abdel Nasser les ait rapprochés pour porter encore plus haut la chanson "arabe". Pour le pan-arabiste qu'il était, on peut dire que c'était sa seule réussite, le panarabisme ayant échoué partout, aussi bien en Iraq, en Syrie qu'au Soudan et en Libye ... faute d'un chef unique pour la "Oumma el-arabiya" (le monde arabe) que ces pays prétendaient former; en faisant de ces deux monuments égyptiens les rois de la chanson orientale à travers tout le monde arabophone. La première chanson composée par Abdel Wahab, « Enta Omri », était considérée comme la « réunion au sommet » des deux monuments de la chanson orientale. Plusieurs belles chansons composées par Abdel Wahab ont suivi, comme « Amal hayati » (Espoir de ma vie), « Fakkarouni » (Ils m'ont ravivé ton souvenir), et bien d'autres.

En mai 1967, juste avant la guerre des Six jours, on l’entendait chanter à la radio du Caire et à la radio de Damas « L'abattage, l'abattage, l'abattage et sans pitié ... » condamnant le sionisme israélien. Plusieurs autres chants guerriers ont été créés pour elle à cette époque. En 1969, elle a chanté « Indi boundoukiya » (J'ai un fusil).

Ses chansons ont pris plus d'âme et de recherche de qualité en 1967, après la défaite de l'Egypte pendant la guerre des Six Jours. « Hadith el rouh » (Dialogue de l'âme), une traduction du poète de Mohamad Iqbal qui a mis en place un ton incitant à la réflexion. Des généraux dans le public, auraient été en larmes.

Oum Kalthoum a également chanté pour les compositeurs Mouhamad Mougui, Sayed Mekawi et Baligh Hamdi.

Décès d'Oum Kalthoum

Oum Kalthoum décède le 3 Février 1975, à l'âge de 76 ans d'une insuffisance rénale. Son cortège funèbre est devenu un événement national, avec environ 4 millions d'Égyptiens éplorés le long des rues pour apercevoir son cortège passer. On dit que ses funérailles avaient attiré un public plus grand que celui du défunt Nasser.

Texte repris et complété par Rachid Barnat 


 رياض السنباطي - ام كلثوم - فريد الأطرش - زكريا أحمد - محمد القصبجي 

Titre

Traduction du titre

Auteur

Compositeur

Premier concert

سلوا كؤوي الطلا

Interrogez nos coupes de vin

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

1937

افرح يا قلبي

Réjouis-toi ô mon cœur

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1937

فاكر لما كنت جنبي

Te souviens-tu quand tu étais à mes côtés?

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1937

كيف مرت على هواك القلوب

Combien de cœurs pour toi se sont passionnés

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

1938

أتعجل العمر

Je presse le temps tant j’aspire à te revoir

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

1938

مقادير من جفنيك حولن حالي

Il a suffit d'un regard pour connaître le coup de foudre

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

1938?

يا قلبي بكرة السفر

Ô mon cœur, demain est jour du départ

Ahmed Rami

Mohamad Qasabji

1938

اذكريني

Souviens-toi de moi

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1939

يا طول عذابي

Je souffre depuis longtemps

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1940

يا ليلة العيد

Veille d’aïd

Ahmed Rami

Riadh Sambati

22-09-44

هلت ليالي القمر

Les nuits de pleine lune

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1940,

الأمل

L’espoir

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1940 (1946?)

رق الحبيب

Mon bien aimé redevient tendre

Aḥmad Raai

Mohamad Qasabji

1940

غنى الربيع

Le printemps chante

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1943?

حبيبي يسعد أوقاته

Que mon bien aimé, soit heureux

Bayrem Tounsi

Zakariya Aḥmad

1940

الآهات

Les soupirs

Bayrem Tounsi

Zakariya Aḥmad

1940 (1943?)

أنا في انتظارك

Je suis dans ton attente

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1940 (1943?)

أهل الهوى

Les amoureux

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1940 (1944?)

الأولة في الغرام

La première chose en amour

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1944? 1945?

عيني يا عيني

Pauvres amoureux

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1945-1946

غنيلي شوي

Chantes pour moi

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1945-1946

سلوا قلبي

Interrogez mon cœur

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

1945-1946

غلبت أصالح في روحي

Je me  réconcilie avec moi-même

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1946?

ظلموني الناس

On a été injuste envers moi

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

01-01-53

حلم

Rêve

Bayrem Tounsi

Zakaria Aḥmad

1947?

نهج البردة

La voie pour la Burda

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

1949?

سهران لوحدي

Je veille seule

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1949-1950

ولد الهدى

Il est né le Guide

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

nov-49

ياللي كان يشجيك أنيني

Toi que ma plainte comblait d’aise

Ahmed Rami

Riadh Sambati

saison 1950-1951?

رباعيات الخيام

Quatrains d’Omar Khayyam

Omar Khayyam, traduction et adaptation, Ahmed Rami

Riadh Sambati

1950?

جددت حبك ليه

Pourquoi renouvelles-tu ton amour ?

Ahmed Rami

Riadh Sambati

03-01-52

إلى عرفات الله

Au mont Arafat

Ahmed Chawki

Riadh Sambati

06-12-51

يا ظالمني

Toi qui es si injuste avec moi  

Ahmed Rami

Riadh Sambati

1951-1952?

ذكريات

Souvenirs

Ahmed Rami

Riadh Sambati

03-02-1955

شمس الأصيل

Soleil du couchant

Bayrem Tounsi

Riadh Sambati

05-05-1955

دليلي احتار

Je suis perplexe

Ahmed Rami

Riadh Sambati

01-12-55

أغار من نسمة الجنوب

Je jalouse la brise du sud

Ahmed Rami

Riadh Sambati

17-01-57

عودت عيني على رؤياك

Tu m'as habituée à te voir

Ahmed Rami

Riadh Sambati

05-12-57

قصة الأمس

Histoire ancienne

Ahmed Rami

Riadh Sambati

06-02-58

بعد الصبر ما طال

Après avoir patienté

Bayrem Tounsi

Riadh Sambati

06-03-58

ثورة الشك

Affres du doute

Prince Abdallah Fayçal

Riadh Sambati

04-12-58

أروح لمين

A qui me vouer ?

Ahmed Rami

Riadh Sambati

04-12-58

هجرتك

Je t’ai quitté

Ahmed Rami

Riadh Sambati

05-12-59

الحب كده

L’amour est ainsi

Bayrem Tounsi

Riadh Sambati

05-11-59

لسه فاكر

T’en souviens-tu encore ?

Abdel Fatah Mustapha

Riadh Sambati

07-01-60

حب إيه

Que connais-tu de l’amour ?

Mohamed Abdel Wahab

Baligh Hamdi

01-12-60

هو صحيح الهوى غلاب

Est-il vrai que l’amour rend malheureux ?

Bayrem Tounsi

Zakaria Ahmed

01-12-60

حيرت قلبي معاك

Tu as troublé mon cœur

Ahmed Rami

Riadh Sambati

07-12-61

أنساك ده كلام

 مش ممكن أبدا

T’oublier ? Impossible

Maamoun  Chenawi

Baligh Hamdi

(refrain Zakaria Aḥmad)

07-12-61

ليلي ونهاري

 لا يا حبيبي

De jour comme de nuit, je ne pense qu'à toi

Abdel Fatah Moustapha

Riadh Sambati

01-03-62

ح اسيبك للزمن

Je vais t’abandonner à ton destin

Mohamed Abdel Wahab

Riadh Sambati

06-12-62

ظلمنا الحب

Nous avons été injustes envers l’amour

Mohamed Abdel Wahab

Baligh Hamdi

06-12-62

أقولك إيه

Que te dire de l’amour que j’ai pour toi ?

Abdel Fatah Moustapha

Riadh Sambati

05-12-63

كل ليلة وكل يوم

 بتفكر في مين

Jour et nuit, à qui penses-tu?

Maamoun      Chenawi

Baligh Hamdi

05-12-63

للصبر حدود

La patience a ses limites

Mohamed Abdel Wahab

Moḥamed Mawgi

02-01-64

إنت عمري

Tu es ma vie

Aḥmad Chafik Kamel

Mohamed Abdel Wahab

06-02-64

سيرة الحب

Les règles en amour

Morsi Gamil Aziz

Baligh Hamdi

03-12-64

أراك اعصي لدمع

Je te vois rétif aux larmes

Abou Firas Ḥamdani

Riadh Sambati

03-12-64

إنت الحب

Tu es l’amour

Ahmed Rami

Mohamed Abdel Wahab

04-03-65

يا حبنا الكبير

Notre grand amour

Abdel Fatah Moustapha

Riadh Sambati

23-07-65

بعيد عنك

Loin de toi

Maamoun Chenawi

Baligh Hamdi

23-07-65

أمل حياتي

Espoir de ma vie

Aḥmad  Chafiq Kamel

Mohamed Abdel Wahab

02-12-65

الأطلال

Les ruines

Ibrahim Nagui

Riadh Sambati

07-04-66

فكروني

Ils m’ont ravivé ton souvenir

Mohamed Abdel Wahab

Mohamed Abdel Wahab

01-12-66

فات المعاد

Trop tard, tu as raté l'occasion !

Morsi Gamil Aziz

Baligh Hamdi

02-02-67

حديث الروح

Discours de l’âme

Mouḥammad Iqbal

Riadh Sambati

04-05-67

هذه ليلتي

Cette nuit est la mienne

Georges Jardaq

Mohamed Abdel Wahab

05-12-68

ألف ليلة وليلة

Mille et une nuits

Mursi Gamil Aziz

Baligh Hamdi

06-02-69

أقبل الليل

La nuit va tomber

Ahmed Rami

Riadh Sambaṭi

04-12-69

إسأل روحك

Interroges-ton cœur 

Mohamed Abdel Wahab

Muḥammad al-Mawgī

01-01-70

ودارت الأيام

La roue du temps tourne

Maamoun      Chenawi

Mohamed Abdel Wahab

05-03-70

الحب كله

Tout l’amour

Aḥmad Chafik Kamel

Baligh Hamdi

07-01-71

القلب يعشق كل جميل

Le cœur aime tout ce qui est beau

Bayrem Tounsi

Riadh Sambati

04-02-71

أغداً ألقاك

Te reverrai-je demain ?

Hadi Adam

Mohamed Abdel Wahab

06-05-71

من أجل عينيك

Pour tes yeux

Prince Abdallah Fayçal

Riadh Sambati

06-01-72

يا مسهرني

Tu me fais veiller

Ahmed Rami

Sayyid Makawi

06-04-72

ليلة حب

Nuit d’amour

Aḥmad Chafiq Kamel

Mohamed Abdel Wahab

07-12-72