C'est l'histoire d'une meuf qui a de beaux yeux. Elle a aussi une belle coupe de cheveux, une belle démarche, un beau sourire, met souvent des souliers branchés avec de beaux talons aiguilles et, comme le diable, elle s'habille en Dior ou en Prada.
Arrivée en politique comme le pique-assiette qui s'invite à une table à laquelle personne ne l'avait convié, elle est d'abord utilisée comme symbole de la "diversité", tout comme ses "copines" Fadela Amara et Rama Yade, par un Nicolas Sarkozy, adepte de la "discrimination positive" et champion de la communication par l'image choc. Parachutée au ministère de la Justice, parachutée, ensuite, comme maire, dans le 7e arrondissement parisien, écartée du gouvernement, mais remerciée, donc re-parachutée, enfin, en position éligible comme député européen, celle qui n'a jamais eu un autre mérite que celui d'être dix fois plus ambitieuse que la moyenne (c'est plutôt une qualité) et qui a su choisir ses amis comme on choisit un bon plan marketing, se démène ces jours-ci, s'érigeant en porte-flingue pour défendre "son" candidat, certes sans goût, mais avec beaucoup de verve. C'est évidemment son droit et, au regard de son parcours en politique, je dirais, peut-être même son rôle. La nana, c'est Rachida Dati. Et, ces jours-ci, Rachida fait le job! Ses détracteurs de droite, ne pourront pas dire d'elle, qu'elle se serait montrée ingrate.
Son billet, paru sur le Huffington Post, est, en revanche, le reflet de sa propre caricature. Elle explique en substance que Nicolas Sarkozy serait un éternel incompris et que François Hollande n'aurait rien d'autre à proposer, sinon de l'antisarkozysme. Tout en lançant ces expressions "bateaux" usitées généralement par celles et par ceux qui pensent qu'il suffit de pérorer devant le peuple pour le convaincre, Rachida Dati nous dégaine une panoplie de caricatures pour stigmatiser l'adversaire de son patron et une kyrielle d'aquarelles pour nous présenter un autre Nicolas Sarkozy, bien différent du président sortant.
Du haut de ses talons aiguilles, et comme si les Français ne connaissaient rien du président sortant, elle nous dépeint son "leader naturel" en "meilleur d'entre nous" allant jusqu'à reprendre, en des termes à peine voilés, l'un des éléments de langage préférés du moment du côté de l'UMP: après Sarkozy ce serait soit le chaos, soit le déluge. Aux abris! La gauche risque de revenir.
Je ne me ferai pas ici le défenseur du candidat socialiste qui a probablement des avocats et une équipe de campagne beaucoup plus compétents que moi en la matière, sauf pour dire peut-être que le programme de François Hollande est loin d'être un concentré d'anti-sarkozysme comme tend à le présenter cette "meuf", la Miss alibi "diversité", de Nicolas Sarkozy. Celle qui dénonce, dans son texte, la "caricature" n'a pas peur d'en user et d'en abuser jusqu'au ridicule. Mais les ambitieux et les opportunistes n'ont jamais peur du ridicule.
Je m'autorise donc, au risque de susciter l'ire de toutes les "meufs" et de tous les talons aiguilles qui s'accommodent du sarkozysme, à exprimer le fond de ma pensée sur ce que Rachida Dati appelle "l'anti-sarkozysme".
De prime abord, et dans l'absolu, ayons conscience qu'il est légitime d'avoir une attitude anti-sarkozyste puisque le sarkozysme a instauré une pensée, un état d'esprit qu'il faudra forcément déconstruire. Je suis de ceux qui pensent, disent et écrivent qu'être anti-sarkozyste est aujourd'hui un devoir républicain. Encore une fois, il n'est pas question de "sanctionner" un président sortant parce qu'il aurait seulement fait des erreurs de gouvernance, de choix ou qu'il aurait eu une attitude atypique ou iconoclaste, il est nécessaire, à mes yeux, de le "sanctionner" parce qu'il s'est attaqué et a trainé dans la boue des questions essentielles qui font la République françaises: ses valeurs.
En voulant siphonner les voix du FN, Nicolas Sarkozy s'était engagé, dès le milieu des années 2000, dans une logique qui avait pour objectif de banaliser la parole stigmatisante et de décomplexer, en définitive, tous les tenants de la xénophobie et du repli sur soi. Certes, de l'aveu de tous ceux qui le connaissent, le candidat-président ne serait, en privé, ni raciste ni xénophobe. Je le crois aussi! Mais justement, c'est pire: il n'a rien fait par conviction, mais par calcul. Et ce n'est pas un hasard si d'anciennes figures de l'extrême droite, Patrick Buisson, Guillaume Peltier ou Bruno Larebière, ancien rédacteur en chef de Minute, se retrouvent sinon conseillers, des inconditionnels du sarkozysme et comme des poissons dans ce marécage de xénophobie non-assumée.
Lorsque par calcul politique, par cynisme électoraliste, on est capable de brader les valeurs essentielles de la République, on abaisse l'image de la fonction présidentielle et on ne montre rien d'autre qu'un visage d'homme de pouvoir, là où il est plus que nécessaire d'incarner une stature d'homme d'État rassembleur et garant de la préservation des principes universels, nés en France, au lendemain de la Révolution.
Lorsque l'on développe un discours très discutable, lorsque, dans son propre camp, on laisse s'installer le dérapage sexiste qui succède à l'envolée homophobe, lorsque l'on tente de rabaisser,d'humilier "l'homme africain" en brandissant de pseudos "arguments" historiques, rédigés par une plume, connue pour son encre arrogante et méprisante, lorsqu'on oppose les quartiers populaires aux quartiers huppés, lorsqu'on laisse entendre que ceux qui viennent d'ailleurs seraient de fait des "tricheurs" ou des "fainéants" qui profiteraient des largesses d'une France fraternelle et généreuse et lorsqu'enfin on malmène la laïcité et qu'on met en avant une politique communautariste tout en condamnant le communautarisme, je le dis clairement, on n'est pas digne de diriger la République.
"Bien-pensance!", "Politiquement correct!", "Bobo!", pourrait-on me rétorquer, dans ce royaume où la défense des valeurs fondamentales est assimilée à un acte anti-France. Si c'est ainsi, cette "bien-pensance", je l'assume, car, contrairement aux tenants du sarkozysme ou aux adeptes de Marine Le Pen, je préfère, de loin, bien penser les valeurs de la République et être politiquement correct à leur égard que les malmener en m'appropriant ces réflexions de beaufs qui font de la parole sexiste, homophobe ou, du propos raciste, une tendance à la mode, parfois un élément du triste spectacle. Certes, la liberté, l'égalité, la fraternité et la laïcité ne sont pas cotées en bourse. Heureusement pour la France! Car sous Nicolas Sarkozy, elle aurait perdu, non seulement son triple A, mes tous ses A, tant ces valeurs furent violentées par une logique décomplexée visant à considérer que tous les principes garantissant le "vivre-ensemble" et toutes les pensées républicaines devaient être déconstruits au profit d'une approche communautariste où la société serait divisée, non seulement en "communauté", mais en segments, représentant chacun, une clientèle électorale.
Que cette nana se sente proche de la droite, c'est un choix qui est, en soi, respectable. Le gaullisme a écrit de belles pages dans l'histoire de France. Mais que Rachida Dati vienne nous vanter les mérites de cette droite là, la droite sarkozyste, qu'il faudra désormais bien distinguer de la droite gaulliste ou chiraquienne, en somme de la vraie droite républicaine, il y a manifestation d'une contradiction que la "meuf" ne reconnaîtra jamais.
Qui a stigmatisé des quartiers similaires à celui qui a vu naître l'ancienne Garde des Sceaux? Qui a montré du doigt des parents et des familles semblables à ceux d'où est issue l'élue du 7e arrondissement parisien? Qui a caricaturé l'histoire de ces populations immigrées ne retenant d'elles que des images de faits divers allant parfois jusqu'à vouloir ethniciser le crime et la délinquance? Qui, enfin, a mis à l'index tout ce que peux symboliser Rachida Dati?
Certes, la gauche n'a jamais su, au-delà d'une certaine attitude paternaliste, se comporter comme il se doit avec les personnes issues de l'immigration. Elle n'a pas su inventer des Rachida Dati ou des Rama Yade. Elle n'a pas su faire une place au soleil à Fadela Amara. De ce point de vue, la gauche a certainement intérêt à faire son examen de conscience et son introspection. Mais la gauche, cette gauche incarnée aujourd'hui par Hollande, n'a jamais fait de la parole graveleuse, du propos stigmatisant, du dérapage xénophobe et de la désignation de boucs émissaires, un fond de commerce politique.
De plus! On n'affaiblit pas l'extrême-droite en s'appropriant son propos et sa logique discriminante. On affaiblit ce qui est de nature à se comporter de manière antirépublicaine en combattant ses idées. C'est ce que cette "meuf" n'a pas compris. À l'évidence! Plus soucieuse de son avenir personnel que de celui de millions de français, elle brade, elle aussi, les valeurs qui font l'âme de la France. Certes, de belles chaussures Louboutin, même frappées de cette couleur maudite qu'est le rouge, sont plus à la mode que le bonnet phrygien de Marianne, mais il ne faut pas solder à ce point, l'âme et l'esprit de cette dernière.
Dans son billet, elle a néanmoins vu juste sur un point. "C'est l'intérêt, la grandeur et l'avenir de la France qui sont en jeu", écrit-elle. Rachida Dati a entièrement raison, c'est pourquoi, ne pas permettre à Sarkozy de briguer un second mandat, c'est aussi préserver l'intérêt, la grandeur et l'avenir de la France, car la France, celle que nous aimons, celle qui est montrée en modèle aux quatre coins du monde, celle qui continue d'inspirer les auteurs et les humanistes, ce n'est pas une France qui stigmatise et qui laisse la xénophobie s'installer, mais c'est celle qui est fidèle aux valeurs qu'elle se doit d'incarner. Toujours !
Blog : www.mohamed-sifaoui.com
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