Non seulement il avait quitté les Frères musulmans, il s'est donné aussi pour mission de les dénoncer et de critiquer leur mauvaise lecture de l'islam, cette religion qu'ils ont transformée en instrument de répression féroce particulièrement pour les femmes, que le wahhabisme abhorre, méprise et diabolise en tant qu'origine du mal !
Mais on ne quitte pas facilement l'organisation des Frères musulmans : "Frère" un jour, "Frère" pour toujours; et celui qui veut s'émanciper de la confrérie, est condamné à mort pour traitrise !
Kamel Daoud a vécu en Algérie durant la décennie noire. S'il avait choisi d'y rester, c'était pour mieux dénoncer les islamistes au risque de sa vie; puisqu'une fatwa est prononcée contre lui, pour le tuer !
Quand Abdel Aziz Bouteflika, ex-Frère musulman lors de la lutte armée du FLN pour libérer l'Algérie, avait décrété l'amnistie générale pour clore les années noires, trahissant sa proximité idéologique avec les jihadistes qui lui rappelaient sans doute son jihadisme à leur âge, comme les jihadistes tunisiens rappelaient sa jeunesse à Ghannouchi l'autre Frère musulman, cela avait scandalisé Kamel Daoud qui s'étonne que le FLN veuille effacer de la mémoire collective ce pan d'histoire, lui qui a fait de l'histoire de la colonisation française son fonds de commerce pour imputer à la France tous les échecs de l'Algérie depuis son indépendance !
Une loi même était promulguée punissant de prison et d'amandes lourdes toutes personnes qui évoquerait cette guerre civile qui a fait prés de 150 000 morts en 10 ans !
D'ailleurs le FLN interdit le livre "Houris" en Algérie, comme il interdit à son éditeur Gallimard de participer à la foire du livre en Algérie.
Dans son livre "Houris", titre on ne peut plus stigmatisant pour les islamistes puisqu'il renvoie aux 72 houris/ces vierges éternellement vierges qui les attendent au paradis, Kamel Daoud brave le pouvoir en place; et pour écrire son livre-chronique de ces années noires, il a du se réfugier en France, pays de liberté.
Et qui mieux que cet ex-Frère musulman pour dénoncer la mauvaise lecture de l'Islam par les obscurantistes ?
Son livre est truffé de références au coran, aux hadiths, aux pratiques de cette religion détournée et instrumentalisée par les illettrés que sont les "émirs" et autres "imams" autoproclamés rentrés d'Afghanistan où ils sont partis donner un coup de main à Oussama Ben Laden !
Avec le prix Goncourt bien mérité par cet écrivain courageux, ce sont bien Kamel Daoud et la France qui font un pied de nez au FLN.
R.B
Jean Pierre Ryf Kamel Daoud : Houris
Je viens
de terminer la lecture du dernier roman de Kamel Daoud :
« Houris ». Ce livre figure parmi les finalistes pour le prix Goncourt
et cela me paraît tout à fait justifié.
Ce roman
est l’histoire d’Aube, une jeune femme qui a été victime d’une très grave
attaque des islamistes pendant la décennie noire en Algérie dans les années 90.
Victime
d’une tentative d’égorgement, elle ne peut plus parler. Elle ne peut respirer que
grâce à une canule installée dans sa gorge et elle a une horrible trace de sa
blessure sur la gorge qui fait peur aux enfants et détourne le regard des
adultes.
C’est,
cependant, une femme libre. Elle n’est pas mariée et subvient à ses besoins en
tenant un salon de coiffure. Elle est, ce faisant, une anomalie pour les
milieux conservateurs en Algérie.
Au moment
où débute le roman, Aube est enceinte. Elle ne l’annonce à personne, pas même à
sa mère mais s’adresse à son futur bébé à qui elle raconte ce qu’elle a vécu. Et
comme ce futur bébé est une fille, elle lui montre qu’elle sera sa place dans ce
pays si elle venait au monde.
Rien ne
nous est épargné de la barbarie des islamistes et leur incommensurable bêtise.
La scène chez le gynécologue serait très drôle si elle n’était aussi le reflet
de la bêtise absolue qui se donne des airs de religion !
On va
suivre un long périple de cette jeune femme qui veut retourner sur les lieux de
son malheur: et ce sera l’occasion pour l’auteur de revenir sur l’ensemble des
drames du pays à cette époque.
Aube pense à avorter car, comme elle l’explique à son futur bébé, elle ne veut le laisser venir dans un tel monde. Elle lui
explique et à nous par là même, pourquoi.
Tout au
long de son périple elle fait des rencontres. Ces destins ont été, eux-aussi,
bouleversés par les islamistes. Et c’est une façon, pour l’auteur de protester
contre la décision du pouvoir d’effacer cette guerre, de passer l’éponge sur
ces crimes, sans jugement, sans récit; comme si cela n’avait pas existé.
Le
lecteur est amené à réfléchir sur cet oubli volontaire, sur l’absence de tous
récits historiques dans un pays si soucieux d’histoire dans sa
guerre contre la France !
Ce roman
est fort. Il revient en détail sur cette période historique. Il fera date. Il amène le lecteur à affronter des questions essentielles sur la place des
femmes, sur l’idéologie islamiste, sur le rôle de la mémoire et de l’histoire.
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