vendredi 21 octobre 2016

Vous avez dit islam de France ?

Enfin, certains commencent à distinguer l'islam de France celui de ses anciennes colonies, du le wahhabisme cet "islam" agressif à vocation expansionniste, qu'exportent les pétromonarques : Ibn Saoud et son frère ennemi l'émir du Qatar ! Quant aux belges, ils ont fait carrément entrer le loup dans la bergerie en confiant aux Ibn Saoud l' "organisation" de l'islam en Belgique !!
R.B
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Jean-François Drevet

L’Europe et ses islamistes: quelle tolérance pour l’intolérance ?

L’enquête récemment publiée par l’Institut Montaigne, « Un islam français est possible », qui apporte une première analyse du niveau d’intégration des musulmans de France, converge avec celles qu’effectuent depuis des années d’autres pays européens : elle confirme l’existence d’une minorité significative « qui a adopté un système de valeurs clairement opposé aux valeurs de la République ». En France, elle représenterait 28% des musulmans. Une enquête de 2016 en Allemagne évalue les musulmans qui pensent qu’il est plus important de suivre la loi islamique que la loi allemande si elles sont en contradiction à 47%. Au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et dans les pays nordiques, les sondages donnent des résultats approchants.

D’après l’Institut Montaigne, cette minorité est en croissance, notamment dans le groupe des moins de 40 ans, en majorité né en Europe ou naturalisé, ce qui serait aussi le cas dans presque toutes les communautés musulmanes établies en Europe. Quelles que soient leurs origines géographiques et indépendamment des politiques d’intégration, y compris dans les pays nordiques qui ont mené les actions les plus élaborées, s’affirment des groupes intégristes.

On ne se prononcera pas ici sur les causes, qui sont multiples et complexes. En France, on s’est beaucoup interrogé sur les handicaps socio-économiques d’une population défavorisée. L’enquête allemande souligne l’impact de la propagande émanant des pays de la péninsule arabique, en raison du succès grandissant de leurs doctrines présentées comme des modèles à suivre pour devenir « de bons musulmans ».

Ceux qui sont persuadés de la supériorité de notre démocratie ont du mal à reconnaître le dynamisme d’une idéologie qui s’y oppose absolument et qui recueille l’adhésion d’une fraction importante d’une population pourtant issue de systèmes scolaires sécularisés. C’est pourquoi ils ont souvent été dans le déni ou la sous-estimation du problème.

Il faut pourtant tenir compte de cette réalité, car ses conséquences sont préoccupantes. On fera ici l’impasse sur le lien entre islamisme et terrorisme, largement traité par ailleurs, notamment par Gilles Kepel, pour souligner trois aspects principaux de l’islamisme militant : sa volonté d’entraver l’intégration des musulmans européens, le soutien qu’il apporte indirectement aux idéologies d’extrême droite et son rôle dans les réticences des Européens vis-à-vis des réfugiés.

D’une part, les islamistes font pression sur leurs coreligionnaires pour les détourner des pratiques en vigueur dans la société d’accueil et leur faire adopter un islam en opposition avec celles-ci (warfare) ou en multipliant les recours en justice pour faire accepter leurs pratiques rigoristes (lawfare). D’autre part, ils sont des propagateurs très efficaces de l’islamophobie qu’ils prétendent dénoncer. Une enquête IFOP de 2016 en France et en Allemagne atteste de la montée de la défiance : des deux côtés du Rhin, pour près de la moitié de la population l’islam est une menace. De 45 (Allemagne) à 63% (France) de la population estime que « l’influence et la visibilité de l’islam sont trop importantes ».

L’image pas vraiment positive de l’islam véhiculée par les médias, le terrorisme et les querelles suscitées par les intégristes dans les écoles, les hôpitaux et le monde du travail incitent beaucoup d’employeurs ou de propriétaires à ne pas recruter ou à refuser de louer des logements aux personnes de confession musulmane. Ceux qui sont racistes ont trouvé de bonnes raisons de le faire. Les autres, bien plus nombreux, estiment que musulman = problème et font en sorte de ne pas avoir affaire à eux. Leur comportement, attesté par les difficultés d’embauche de nombreux musulmans, a tendance à se répandre, notamment en Europe du nord. Ainsi la volonté d’apartheid des uns entraîne celle des autres et aggrave encore le chômage d’une population déjà insuffisamment qualifiée. Ainsi une communauté tout entière est victime du comportement intolérant d’une minorité réduite, mais très active et qui s’exprime en son nom.

Les islamistes se montrent aussi des agents recruteurs très efficaces des partis d’extrême droite. C’est le cas en France, qui leur doit une partie des progrès du Front National. Dans les pays du nord de l’Europe, où l’extrême droite était à peu près inconnue, la peur de l’islam a fait naître de nouveaux partis, qui ont rapidement obtenu des pourcentages inattendus et conduit plusieurs d’entre eux dans les coalitions gouvernementales. Même l’Allemagne, qu’on croyait définitivement immunisée, a désormais deux partis xénophobes en progrès rapide.

Traditionnellement assez ouverte à l’accueil de réfugiés, la population européenne a maintenant une attitude plus réservée, qu’il serait erroné d’attribuer exclusivement aux effets de la crise et du chômage. Plusieurs gouvernements d’Europe centrale s’y sont explicitement opposés, en arguant des problèmes d’intégration de leurs partenaires occidentaux, bien que les projections démographiques à long terme fassent état d’un déficit de naissances croissant et de la nécessité de le combler par l’immigration. Mais c’est des pays du sud et de l’est méditerranéen (PSEM) et de l’Afrique subsaharienne que viendront la plupart des migrants des prochaines décennies. En clair, la majorité des nouveaux arrivants sont déjà et seront des musulmans. C’est pourquoi il n’est pas sûr que l’argument humanitaire ait un impact durable. L’opinion est maintenant orientée dans une autre direction, même si on lui explique que les musulmans, et notamment les demandeurs d’asile, sont les premières victimes du terrorisme. Nécessité démographique, l’immigration devient une impossibilité politique.

Comment agir ?

Pendant longtemps, rien n’a été fait dans l’espoir que le temps résoudrait le problème par une acculturation aux réalités de la vie européenne. Force est de constater que le noyau dur des réfractaires est en progrès, l’indifférence d’une grande partie de la classe politique et le soutien apporté aux islamistes par un groupe hétéroclite « d’idiots utiles » leur ayant permis de développer leur influence.

Il y a maintenant un consensus pour agir, ce qui incite les gouvernements à rechercher l’appui des autorités religieuses pour « européaniser » l’islam, dans le sens des propositions de l’institut Montaigne. Mais le résultat n’est pas garanti : le succès des idéologies obscurantistes originaires du Moyen-Orient est grandissant, bien qu’elles soient étrangères, aussi bien aux traditions des immigrés qu’à celles des pays d’accueil.

En fait, y compris dans des pays très attachés aux libertés fondamentales, beaucoup d’observateurs préconisent maintenant des mesures plus énergiques, sinon contraignantes. D’après Ayaan Hirsi Ali, il faut « repenser et réviser les différents traités, lois et politiques qui ont fait preuve de leur incapacité à protéger les libertés et les valeurs fondamentales qui rendent les sociétés occidentales uniques en leur genre ».

On esquissera ici trois orientations : mieux appliquer les lois existantes, actualiser la définition de la liberté religieuse et distinguer la religion de la politique.

On a parlé en Belgique et dans plusieurs pays européens de « zones de non droit » dans des quartiers où les islamistes font la loi. Les musulmans qui ne veulent pas s’y conformer sont stigmatisés, éventuellement harcelés jusqu’à ce qu’ils adaptent leur comportement. Pour résister, ils ne peuvent pas compter sur beaucoup d’appuis : les associations de défense des droits de l’homme, qui se sont mobilisées en faveur des porteuses de burkini, ne semblent pas intéressées par les victimes des pressions islamistes, qui devraient être aidées à se défendre, y compris par des actions en justice.

De même, on peut se demander pourquoi la prolifération des appels à la haine, l’antisémitisme et le sexisme, bénéficient encore dans de nombreux pays d’une impunité presque totale. Il est étrange que la propagande islamiste, qui tombe assez souvent sous le coup des lois contre les discriminations, ne soit pas sanctionnée. La loi ne devrait-elle pas être la même pour tous ?

Après des controverses parfois violentes, les relations entre les États et les religions en Europe sont stabilisées depuis le milieu du siècle dernier. Dans chaque pays, des compromis assurent un équilibre de fait qui n’est pas toujours consolidé en droit, ce qui permet aux islamistes, pour qui tout est religieux, d’avancer des revendications incessantes sur des sujets inattendus qui mettent les tribunaux en difficulté. Comment définir la limite ? C’est un sujet complexe, ce qui est religieux pour les uns ne l’étant pas pour les autres. Mais la jurisprudence actuelle, basée sur des cas individuels, incite les organisations intégristes à multiplier les contentieux.

Il serait plus clair d’affirmer avec netteté que si l’islam est le bienvenu en Europe, il ne peut obtenir un statut plus favorable que celui dont s’accommodent les autres religions. Là où c’est nécessaire, il faudrait modifier les législations en conséquence, éventuellement en recourant à des référendums, car la promotion de l’islam ne doit pas être un projet politique qui menace la paix civile.

Plusieurs États européens ont trouvé commode de sous-traiter sa gestion aux pays d’origine des immigrés. La Belgique a fait mieux encore en confiant cette tâche à l’Arabie saoudite. Comme l’explique très bien l’Institut Montaigne, cette solution de facilité est de moins en moins adaptée à des populations qui vivent en Europe depuis plusieurs décennies. Pourtant très susceptibles sur leur souveraineté, ces pays font bon marché de celle des pays d’accueil en multipliant les ingérences, particulièrement nombreuses en provenance de la Turquie et des monarchies du Golfe.

Dans ses voyages en Allemagne, le président Erdoğan demande aux immigrés turcs de ne pas chercher à s’intégrer et de le soutenir dans ses conflits avec les Kurdes et les Gülenistes. L’Arabie saoudite offre l’exemple d’une diplomatie pseudo-religieuse très active, qui consacre des moyens très importants, publics et privés, à la diffusion du wahhabisme et à la formation d’imams qui partagent ses vues. Il n’est pas concevable de lutter efficacement contre l’islamisme sans revoir les relations avec ces pays.

Se limiter à la dimension religieuse du problème, comme le font encore les organisations de défense des droits individuels, ne tient pas assez compte du rôle de l’islam en tant que système juridique et de l’interprétation quasi-totalitaire qu’en font les islamistes. Pour sa part, dans son arrêt du 13 février 2003, la Cour européenne des droits de l’homme a tranché : « les déclarations… qui contiennent des références explicites à l’instauration de la charia sont difficilement compatibles avec les principes fondamentaux de la démocratie ». Par ailleurs, plusieurs pays musulmans ont pris des dispositions pour empêcher les intégristes de s’arroger le monopole de la défense de l’islam, en proscrivant « l’exploitation de la religion à des fins politiques », une piste à explorer par les juristes européens.

Si les politiciens qui préconisent la neutralisation de l’espace public prennent l’effet pour la cause en se polarisant sur les crispations vestimentaires, il en va différemment dans les entreprises, devenues une cible des provocations islamistes. Il devient nécessaire de permettre à leurs dirigeants d’y imposer le cas échéant la neutralité religieuse, dans l’intérêt bien compris des musulmans, afin de rendre sans objet l’ostracisme qui se développe à leur égard.


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