mardi 15 novembre 2022

Quand le journalisme devient spectacle ...

Albert Camus dénonçait en son temps les prétendus journalistes : « L’assez affreuse société intellectuelle où nous vivons, où on se fait un point d’honneur de la déloyauté, où le reflexe a remplacé la réflexion, où l’on pense à coups de slogans et où la méchanceté essaie trop souvent de se faire passer pour l’intelligence. », disait-il. 

Malheureusement la course à l'audimat, fait que ces prétendus journalistes font florès dans tous les médias; et certains* même briguent la présidence de leur pays, persuadés de leur popularité et convaincus de leur ineptie ! 

Les peuples ont les dirigeants et les journalistes qu'ils méritent, quand ils tombent dans leur piège.

R.B

Hé, toi là ! Oui, toi là, le petit brun. Je te connais. Je me souviens de toi. Tu t’appelles Jérôme. Ou Cédric. Laurent peut-être. Ou Saïd je ne sais plus. Cyril ? Ok, si tu veux, Cyril. De toute façon, je te connais.
J’ai été à l’école avec toi. Je me souviens de toi. Ou d’un autre qui était tout pareil. Le petit mec à tête de fouine prêt à tout pour être populaire.
Pas très fin, pas brillant, mais suffisamment vif et malin pour « sentir » ce qui allait faire marrer les autres. Ton truc, c’était l’effet de meute. Tu as toujours su te trouver des alliés, de préférences les costauds, les riches, les impressionnants, les tricheurs.

Et pour t’attirer les bonnes grâces de la classe, tu n’as jamais hésité à t’en prendre à plus petit que toi. La fille intello-moche à lunettes, que tu faisais pleurer, le petit gros nul en sport que tu humiliais devant tout le monde. Tu étais exactement le genre de mec qui harcèle, qui s’acharne contre un plus faible, juste pour le plaisir de mettre les rieurs de ton coté. Tu as toujours aimé la facilité. Et puis, quand ta victime craquait, quand elle allait se plaindre aux profs ou bien lorsqu’elle se faisait vraiment taper dessus, tu te faisais d’un coup doucereux et innocent. Subitement tu n’avais plus rien à voir avec l’histoire. Ce n’était jamais toi qui avais frappé. Tu étais trop futé pour ça. Tu allais même jusqu’à prêcher l’apaisement, la main sur le cœur en assurant que tout ça n’était qu’un jeu et que jamais, tu n’avais souhaité de mal à quelqu’un.

Puis tu as grandi, tu as bossé ton image d’amuseur et perfectionné tes techniques. Tu es devenu un pro. De vannes en vannes, tu as peaufiné ton rôle de bouffon, entouré de souffre-douleur toujours consentants pourvu qu’ils prennent aussi un peu de ta lumière.

Aujourd’hui, tu as réussi, tu as du pouvoir, tu es entouré d’une cour télévisuelle qui glousse servilement à chacune de tes saillies ineptes. Barbe bien taillée, costumes sur mesures ou blousons de cuir, tu soignes désormais ton look autant que ton carnet d’adresse.

En revanche, comme au bon vieux temps, tu as gardé tes sales habitudes. Pour faire ton intéressant et pour t’attirer les bonnes grâces de ton public, tu restes prêt à tout. Sauf que, maintenant, tu peux te rouler dans la boue avec un autre, plus petit mais tout aussi odieux et lamentable que toi, tu n’es plus dans la cour de récré, aucun prof ne va te rappeler à l’ordre. De toute façon, désormais, tu es pote avec le proviseur. Tu es devenu l’ami des politiques. Fort avec les faibles, servile avec les forts. Et si tu n’es toujours pas le premier de la classe, en revanche, tu es le premier sur les bons coups. Un parfum de scandale, des rumeurs de viol, une petite fille découpée en morceau ? Autant de promesses de buzz sur lesquelles tu te rues comme un charognard sur un cadavre fumant. Et ensuite, la gueule encore pleine de sang, tu feras résonner ton rire de hyène à travers l’écran : Les audiences ont été bonnes. Champagne !

Je te connais. Jérôme, Éric, Saïd ou Cyril, je ne suis plus tout à fait sûre de ton prénom, mais années après années, je me souviens toujours de ton visage.

Comment l’oublier ? C’est aussi un peu le mien, le nôtre, celui de nos enfants : Tout ce qu’il y a d’indigne, de vulgaire, de minable chez l’être humain se retrouve dans l’étrange miroir que tu nous tends et que nous observons, incrédules mais fascinés.

Je te connais : Depuis toujours, tu es celui dont le seul talent est de faire ressortir le pire chez nous.

* Donald Trump, Kais Saied ... entre autres.

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