dimanche 14 janvier 2018

Le Bourguibisme est une philosophie et non un repère historique !

Pour ceux qui n'ont toujours pas digéré leur histoire avec Bourguiba, qu'ils sachent que l'homme ne fut pas parfait, loin s'en faut. Mais il faut lui reconnaître d'avoir été l'architecte de la Tunisie moderne, qu'il a dotée d'une administration digne d'une République, qu'il a imposé le statut de la famille en libérant la femme, qu'il a privilégié l'enseignement en le rendant obligatoire pour tous, qu'il a instauré le planning familial pour maîtriser la démographie tout en donnant aux femmes le droit de maîtriser leur corps et leur utérus ... et j'en passe; faisant de la tunisienne l'unique exemple dans les pays dits "arabo-musulmans", voir dans le Tiers-Monde devançant même pour certains droits, les françaises !
Qu'en est-il de ceux qui se disent ses héritiers ? Béji Caïd Essebsi est-il bourguibiste ? On se le demande !
R.B
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Après la révolution, beaucoup ont pensé qu'on en avait fini avec 50 ans de dictature et que l'héritage du mouvement destourien allait être définitivement jeté dans la poubelle de l’Histoire : le parti unique, la pensée unique, et le chef unique, tout ça, c'était fini.

Ainsi, Bourguiba, père de la nation, semblait éclipsé par cette vague révolutionnaire.

Son coté despotique et son refus des libertés fondamentales et de la démocratie étaient mis en avant par ceux qui ne se revendiquaient pas de son "école", et qui ont par le passé milité contre le régime bourguibien.

Pourtant, 3 ans après la révolution, Béji Caïd Essebsi est élu à la tête de l'État après une campagne se basant sur la conservation des acquis sociaux de l'ère Bourguiba, en se présentant comme son héritier légitime.

Puis, le président décida de remettre la statue du "Combattant Suprême" à sa place au centre-ville de Tunis, en signe d'hommage au père de la nation et de continuité dans la politique bourguibiste.

Ce retour confirme bel et bien que l'héritage de Bourguiba ne mourra jamais en Tunisie.

Cependant, un problème persiste : rien dans la politique actuelle ne s'aligne sur cet héritage.

On pense souvent qu'il suffit d'avoir été ministre sous Bourguiba pour pouvoir prétendre faire honneur à ce dernier, car pour nous Bourguiba est synonyme du "C'était mieux avant".

Détrompez-vous messieurs, Bourguiba était un visionnaire, un adepte du "Ça sera mieux demain".

Il était le farouche opposant aux conservateurs et réactionnaires, il était de ceux qui aspiraient à changer les choses, à bousculer l'ordre social, à rompre avec les traditions et à inscrire la Tunisie dans la modernité.

Il agissait par pur pragmatisme et volonté d'améliorer et de révolutionner, non par petits calculs politiques mesquins.

Le Bourguibisme n'est donc pas une simple défense des acquis bourguibiens, mais toute une philosophie qui vise à être en avance par rapport à son temps.
Un bourguibiste des années 1960 est quelqu'un qui lutte pour l'émancipation de la femme, pour une démocratisation de la culture et pour un système éducatif performant.

Un bourguibiste du XXIème siècle se doit de défendre les libertés sexuelles, l'égalité dans l'héritage entre l'homme et la femme, et à fortiori, une égalité parfaite entre les sexes, mais aussi une laïcité institutionnalisée, la protection de l'environnement, et une économie tournée vers les nouvelles technologies et l'encouragement de la recherche et de l'innovation.

Bourguiba était un occidental dans sa manière de penser. A la fois humble et fier.

Il n'avait pas honte d'admettre que la Tunisie avait besoin des compétences formées à l'étranger, ni qu'elle était dépendante du marché international et qu'elle devait parfois faire des concessions sans pour autant faire profil bas, car il a aussi su construire une tradition diplomatique digne, connue pour sa neutralité et sa volonté de réconciliation, qui ont fait la grandeur de la Tunisie.

Il était aussi allergique aux monarchies du Golfe et n'a jamais baissé la tête devant un de ces dirigeants corrompus car il savait très bien qu'il pouvait s'appuyer sur d'autres alliances, beaucoup plus puissantes, plus solides et plus honnêtes, qui le respectaient en tant que dirigeant politique, mais aussi entant qu'ami.

Où est aujourd'hui cette diplomatie ? Où se trouve la Tunisie de nos jours dans le concert des nations ? Perdue, oubliée, menée par le bout du nez et esclave de ceux qui autrefois tremblaient devant la grandeur de ce pays.

Alors chers dirigeants, avant de vous proclamer de l'héritage Bourguibien, regardez bien derrière vous, puis devant vous.
Ne vous posez pas la question "Qu'a fait Bourguiba dans cette situation ?", mais "Qu'aurait fait Bourguiba dans cette situation ?".

Arrêtez avec votre nostalgie et soyez digne de votre héritage.
Oubliez les calculs politiques et les discours populistes, soyez francs avec vous-même et avec votre peuple.

Recherchez des solutions, innovez, faites preuve d'intelligence et de pragmatisme, ne vous laissez pas séduire par la facilité du consensus et acceptez le combat pour les vraies valeurs de la modernité. 

Vous pourrez alors vous dire "Bourguibiste".


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