dimanche 28 juillet 2019

L'EXCEPTION TUNISIENNE

Article paru dans : Kapitalis


A l'occasion du décès du président Béji Caïd Essebsi, et contrairement à ce que nous avons l'habitude de voir dans les pays dits "arabo-musulmans" d'hystérie collective, une fois de plus les tunisiens se sont distingués par des pratiques plus civilisées, apanages des pays démocratiques.

Béji Caïd Essebsi est le premier président à avoir été élu au suffrage universel de façon démocratique et transparente, alors qu'ailleurs chez les arabes, c'est le règne des coups d'Etat ou des élections "démocratiques" truquées avec bourrage des urnes !

Béji Caïd Essebsi en véritable démocrate, dit qu' "une main ne peut applaudir toute seule", pour dire que la démocratie ne peut se construire au dépens des femmes. Il est pour l'égalité des hommes avec les femmes. Et pour cela il a souhaité compléter le Code du statut personnel (CSP), en accordant aux femmes encore plus de droit dont celui de l'égalité en matière d'héritage. Mais le temps lui a manqué.
Alors que la condition de la femme est encore déplorable dans bon nombre de pays "arabes" !

Béji Caïd Essebsi fait confiance aux médecins de son pays, alors que les autres chefs d'Etats "arabes" partent généralement se faire soigner en Occident, trahissant leur manque de confiance en leurs hôpitaux et en leurs médecins.

Dès que le médecin traitant du président Béji Caïd Essebsi a constaté son décès, une demie heure après, il a été annoncé officiellement aux tunisiens et au monde.
Alors qu'il est de coutume dans les pays "arabes" de différer cette annonce de plusieurs jours, voire de plusieurs semaines, temps de palabres, de tractation avec rapport de force entre les prétendants pour "organiser" la succession du président décédé.

Quatre heures après l'annonce officielle du décès du président Béji Caïd Essebsi, le président du parlement Mohamed Ennaceur s'est investi président par intérim comme prévu par la Constitution. Ce qui s'est fait tout naturellement sans contestation ni drame.
Alors que dans d'autres pays "arabes" la vacation du pouvoir aiguise les appétits, ce qui se traduit souvent par un coup d'Etat militaire, ou un coup d'Etat civil ourdi par un opposant rentrant de son exil, soutenu par des puissances étrangères.

Une passation de pouvoir civilisée qui étonne le monde, trop habitué aux révolutions de palais avec régicide, voire parricide quand un prince ambitieux et impatient veut dégager son père !

Ce qui rend le peuple tunisien une exception dans ce monde dit "arabo-musulman" !

Faut-il s'en féliciter ? Oui, tout en restant vigilant car des forces obscurantistes sont toujours là pour ramener la Tunisie à des siècles en arrière, d'autant qu'elles sont soutenues par des pétromonarques qui aspirent à faire avorter la "révolution tunisienne" et le processus démocratique qui pourrait donner des idées à leurs peuples !

Or durant le deuil qu'a vécu la Tunisie après le décès de son premier président mort en exercice, certains commentateurs et intellectuels se sont emballés pour dire "embrassons-nous, Folleville". Ils semblent tomber dans un angélisme inquiétant; puisque déjà adeptes du consensus imposé par Ghannouchi, ils croient pouvoir dire que " Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil" ... miracle du consensus !

Faut-il leur rappeler que les Frères musulmans jouent le temps pour durer ?

En Algérie, le FLN & les militaires au pouvoir ont cru bon de leur lâcher du lest en leur abandonnant le "social". Résultat l'islamisation de l'Algérie s'est généralisée dans tout le pays et le terrorisme, son pendant, est toujours latent.
Si Erdogan a rusé pour durer au pouvoir en donnant le change aux turcs et aux occidentaux de l'islamiste modéré ... depuis 2016, il tombe le masque et passe à la vitesse supérieure pour retirer la laïcité de la constitution et remplacer celle-ci par la chariâa, en rétablissant la peine de mort ... avec dans sa ligne de mire la restauration du califat !

Or le pouvoir de nuisance des Frères musulmans ne cessera pas car ils ont un projet précis. Et la constitution de 2014 telle qu'ils l'ont voulue, est faite pour le concrétiser : paralyser le pays et ses institutions pour mieux le soumettre à leurs amis qatari & turcs ! Pourtant le président Béji Caïd Essebsi a cru pouvoir s'en accommoder et faire de son alliance avec Ghannouchi ce que fit François Mitterrand de Georges Marché, mais il ne pouvait pas grand-chose, les islamistes ont tout prévu pour réduire son pouvoir constitutionnellement.

Il faut que les démocrates se ressaisissent et cessent de croire au miracle du consensus qui n'est qu'un piège pour les éliminer un à un, comme l'a fait Ghannouchi à bien d'autres, le temps pour lui d'islamiser le pays et assurer aux Frères musulmans une meilleure assise populaire en Tunisie. Il leur faut amender la loi électorale, voire changer de régime politique pour mettre un terme au régime bâtard actuel dont tout le monde s'accorde à dire qu'il a paralysé le pays ; et instaurer un régime présidentiel démocratique avec des institutions démocratiques chapeautées par une Cour Constitutionnelle !

Les Tunisiens vivent une apparente démocratie : elle reste à confirmer et à consolider ; car les forces hostiles et rétrogrades sont toujours là pour tuer leur démocratie naissante !!

Rachid Barnat








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