LE SENS DU VOTE "NIDA TOUNES" : Rejet des Frères musulmans !
En effet l'immense majorité de tunisiens qui ont voté Nidaa, c'était pour eux un vote utile contre Ghannouchi et ses "frères" !
D’ailleurs BCE disait que ceux qui votent Ennahdha, voteraient en réalité contre Nidaa !!
Conclusion : Il est hors de question que BCE s'allie avec ceux que les tunisiens ont rejetés le 26 octobre, en leur disant NON .... pour rattraper la faute commise le 23 octobre 2011 qui a causé la ruine du pays en ruinant leurs espoirs nés un certain 14 janvier !
D'ailleurs pour BCE, l’islam politique est une imposture !
Beji Caïd Essebsi, président de Nidaa Tounes
ALORS, C'EST LE DÉBUT DE LA FIN DE L'ISLAM POLITIQUE ? Après l'Egypte qui a dégagé les Frères musulmans suite au mouvement populaire "tamarroud", puis la Libye suite aux élections contestées; autour des Tunisiens de les dégager, ce qu'ils ont fait par les urnes ! Une gifle pour les marchands du temple.
R.B
Béji Caïd Essebsi : "Je ne crois pas à l'islam politique" !
À 87 ans, il a traversé toutes les évolutions de son pays. L'indépendance en tant que ministre à plusieurs reprises de Bourguiba. Puis Ben Ali, comme président du Sénat. Enfin, Premier ministre après la révolution de février à octobre 2011. Le voici gagnant des législatives avec son parti Nidaa Tounes, qu'il qualifie de centriste. Sous peu, l'homme repartira en campagne afin d'être élu président. Analyse des résultats provisoires, diagnostic de la situation économique et sociale, agenda politique : BCE se confie.
Costume gris à fines rayures, lunettes aux montures noires, l'homme affiche la sérénité d'un lendemain de victoire. Malgré une campagne épuisante, un meeting chaque soir dans tout le pays, ce vétéran de la vie politique tunisienne semble dopé par ce succès. Sans pour autant céder au triomphalisme. Les résultats définitifs ne sont pas encore connus et le boss de Nidaa veut éviter les festivités intempestives. La situation sociale et économique du pays ne le permet pas. Et l'abstention massive - 2,2 millions de Tunisiens ont boycotté les urnes sur 5,3 millions d'inscrits - n'est en rien un indicateur rieur. Au deuxième étage du siège du parti, au coeur du quartier d'affaires des Berges du Lac, son bureau est assailli par les nouveaux élus, des hommes d'influence, des amis et des courtisans. Une scène de la vie quotidienne du monde politique. Dehors, des jeunes venus de Nabeul scandent "Béji" tout en enflammant des fumigènes. Son portable sonne à plusieurs reprises, des "mabrouk" retentissent. Son staff planche sur les résultats qui tombent au compte-gouttes. En tête mais sans majorité, il va falloir composer, créer une coalition. Dès le 2 novembre, Essebsi reprendra les sentiers de la campagne. Présidentielle, cette fois-ci.
Le Point Afrique : Quelle analyse politique faites-vous de ce scrutin ?
Béji Caïd Essebsi : Nous n'avons pas les résultats définitifs, mais la tendance est connue. Nous sommes en tête. La procédure prend du temps, car le décompte manuel est très lent. Que voulez-vous, les gens n'ont confiance qu'en cette méthode. Nidaa Tounes arrive en premier, suivi d'Ennahda. On observe que deux partis viennent ensuite en concurrence : l'UPL (NDLR : parti créé par l'homme d'affaires Slim Riahi) et le Front populaire.
Le Point Afrique : À quoi ressemble la Tunisie de 2014 ?
Béji Caïd Essebsi : Les gens ont voté pour le changement. La gestion d'Ennahda durant deux ans et demi a plaidé contre le mouvement. Et le travail de Nidaa Tounes sur le terrain a été confirmé. Il faut cependant tenir compte du facteur abstention. Les Tunisiens en âge de voter sont 8,4 millions. Ils sont 5,3 millions à s'être inscrits sur les listes électorales. Et seulement trois millions ont voté. Ce qui est moins qu'en 2011, presque un million de voix a disparu. Cela exprime une déception à l'égard de la politique. La gestion des deux troïkas (alliance Ennahdha avec le CPR et Ettakatol) a été catastrophique, ce qui, pour les Tunisiens, devient l'échec de tous les politiques. Le message est clair quand les jeunes ne votent pas. Nous devons passer le flambeau à la nouvelle génération.
Le Point Afrique : Sans majorité, avec qui allez-vous gouverner ?
Béji Caïd Essebsi : Les élections sont un package législatives-présidentielle. Après ce processus, je déciderai. Pour l'instant, j'attends les résultats définitifs des législatives. Puis il faut terminer les présidentielles, dont le premier tour est le 23 novembre. Le candidat de Nidaa Tounes sera-t-il élu ?
Le Point Afrique : Votre victoire à la présidentielle vous donnerait-elle une force politique supplémentaire ?
Béji Caïd Essebsi : Pas une force, une cohérence. Quoi qu'il arrive, nous ne gouvernerons pas seuls.
Le Point Afrique : Allez-vous former un gouvernement avec les islamistes d'Ennahda ?
Béji Caïd Essebsi : Si l'ensemble des partis modernistes le permet, nous gouvernerons avec eux. S'ils sont de la même obédience que nous, nous pourrons travailler ensemble. Ennahda ? Ce n'est pas notre choix !
Le Point Afrique : Quels sont vos chantiers prioritaires ?
Béji Caïd Essebsi : L'ordre public. Il faut restaurer la sécurité. Et je ne parle pas que du terrorisme. Il faut rétablir l'État. Il y a un déficit d'État depuis plusieurs années qui n'est plus acceptable. D'autant que la Tunisie a une tradition d'État, une administration, une culture de l'État. Aujourd'hui, nous devons restaurer l'État de droits et de libertés. Lorsque j'ai gouverné au lendemain de la révolution, j'ai pu compter sur notre administration. Avec les gouvernements suivants, les changements, les nominations partisanes ont déconstruit l'État.
Le Point Afrique : Le gouvernement de technocrates que dirige Mehdi Jomaa devait revenir sur ces nominations...
Béji Caïd Essebsi : ... Ce fut lent et insuffisant ! Il faut cependant reconnaître qu'il a su imposer des réformes fiscales et que, sur le plan sécuritaire, il a bien travaillé.
Le Point Afrique : Quelles sont vos solutions économiques ?
Béji Caïd Essebsi : La situation économique est très mauvaise au point que les agences de notation ne nous notent plus. La crise tunisienne est multiple : sociale, économique, politique, sécuritaire... Nous avons besoin d'une mobilisation intérieure, la Tunisie, et extérieure, nos amis étrangers. Il faut une stabilité politique et sécuritaire pour que l'économie reparte. Ce sera une solution évolutive. Il faut au moins deux ans pour pouvoir donner une première indication que nous sommes sur la bonne voie. Après, la confiance se rétablira. Nous devons rétablir les relations avec le monde arabe, les pays du Golfe, en menant une politique modérée.
Le Point Afrique : Le modèle économique basé sur le tourisme et les bas salaires est-il encore viable ?
Béji Caïd Essebsi : Sur le tourisme, oui. Pour le reste, le phosphate est une de nos rares richesses. Mais je ne vais pas aller à l'ONU pour résoudre la crise qui paralyse le complexe de Gafsa depuis plus d'un an. Ce problème relève d'une crise de gouvernement. Il faut dialoguer, décider, trancher.
Le Point Afrique : Que faut-il faire avec le voisin libyen ?
Béji Caïd Essebsi : La situation en Libye est dramatique. Il n'y a plus d'État. Des milices surarmées gouvernent. Le langage du baroud prime... Je ne conseille pas aux Tunisiens de se mêler de ce conflit. Tout autant qu'il faut éviter les interventions internationales. Ce sont aux Libyens de reconstruire leur pays.
Le Point Afrique : Quel bilan faites-vous de vingt-trois années de règne de Ben Ali ?
Béji Caïd Essebsi : Il nous a amené une révolution. Il a instauré la corruption à forte dose. C'était un gouvernement basé sur la force, utilisant la police pour cela. Il a essayé de détruire ce que Bourguiba avait construit sans vraiment y arriver. L'enseignement est généralisé, le statut de la femme confirmé. Mais les classes moyennes s'appauvrissent, la déscolarisation s'aggrave... Nous sommes un petit pays, nos ressources sont limitées.
Nous devons faire comme Bourguiba : investir dans la matière grise. Il nous faut
revoir le système éducatif, investir massivement, surtout à partir du troisième cycle, afin que nos jeunes deviennent "up to date". Idem pour le secteur de la santé. Notre système est en ruine. Nous devons agir modestement, mais que les gens sentent une amélioration.
Le Point Afrique : Vous êtes candidat à la présidentielle. Pensez-vous que Moncef Marzouki, l'actuel président, doit démissionner ?
Béji Caïd Essebsi : Oui, pour que ce soit équitable et puis par éthique. Puisque M. Marzouki estime que son capital est "l'éthique", qu'il quitte ses fonctions pour faire campagne. La nouvelle Assemblée commencera ses fonctions sous l'égide d'un ancien président. C'est insensé. Cela pose un problème constitutionnel. Pour moi, pas de nouveau gouvernement sans nouveau président.
Le Point Afrique : Mehdi Jomaa, le Premier ministre, restera-t-il en fonction ?
Béji Caïd Essebsi : Jusqu'en mars, je pense.
Le Point Afrique : Regrettez-vous ces trois années consacrées à la rédaction d'une nouvelle Constitution ?
Béji Caïd Essebsi : Ce sont trois ans perdus, en gros. La Constitution de 1959 (NDLR : celle voulue par Bourguiba après l'indépendance) aurait pu être ajustée, modernisée, cela suffisait. Bref. Lorsque Chokri Belaïd a été assassiné, le 6 février 2013, le Premier ministre Ennahda, Hamadi Jebali, était prêt à s'en aller et à laisser la place à un gouvernement de technocrates. Moi, j'ai dit : c'est l'ensemble des structures, dont la constituante, qui doit partir. Trois ans perdus, certes, mais aussi trois ans d'apprentissage politique.
Le Point Afrique : La Tunisie est la seule survivante du Printemps arabe...
Béji Caïd Essebsi : ... L'expression "Printemps arabe" est une création européenne. En 2011, lors du G8 de Deauville, on a invité deux Premiers ministres issus de pays ayant connu une révolution : le tunisien et l'égyptien. Les dialogues sont demeurés secrets, mais j'ai dit aux dirigeants du G8 : "Il y a un début de Printemps tunisien." Pas plus. Notons quand même un changement notoire : beaucoup de dictateurs ont disparu (Moubarak, Kadhafi, Ben Ali...).
Le Point Afrique : Croyez-vous à l'islam politique ?
Béji Caïd Essebsi : Moi ? Non ! Je suis pour un État du XXIe siècle, mais qui demeure l'État d'un peuple qui est musulman depuis quatorze siècles. La Tunisie pratique l'islam modéré avec les écoles de Kairouan, de la Zitouna. L'islam politique, ce sont des mouvements politiques qui instrumentalisent la religion pour arriver au pouvoir. La greffe Ennahda n'a pas pris. À Nidaa, nous sommes des modérés. Pas des extrémistes.
Le Point Afrique : Avez-vous parlé récemment avec Ben Ali ?
Béji Caïd Essebsi : Cela fait plus de dix ans que je ne lui ai pas adressé la parole...
Béji Caïd Essebsi, digne successeur de Bourguiba
à la tête de la République tunisienne.