dimanche 9 novembre 2025

A quand l'aggiornamento de l'islam ?

Depuis que l'homme s'est organisé en société, très vite des chefs se sont attribués le pouvoir de le diriger et de le dominer. Et quoi mieux que la religion pour sacraliser leur pouvoir quand ils s'autoproclament Dieu ou serviteurs de Dieu. Les Pharaons ont développé un système sophistiqué de gouvernance des peuples par la religion. 
Avec l'apparition des religions monothéistes, des chefs se sont proclamés défenseurs de Dieu s'ils ne détenaient leur pouvoir de lui, prétendent-ils. D'où la règle " Un roi - Une foi - Une loi ", que les chefs ont toujours tenté d'imposer pour dominer les peuples. 
Avec les dérives et les bus des chefs, certains ont remis en question la domination des peuples par la religion. 
Il sera suivi par Martin Luther qui dénonçait la vente des indulgences par le Pape, et fonde le protestantisme qui a permis au christianisme de se moderniser. 
Pour le Judaïsme, il faut attendre Napoléon qui voulant assimiler les juifs en leur accordant la citoyenneté, a demandé à leurs chefs spirituels d'accepter la prééminence des lois civiles sur leurs lois religieuses. 
Il reste aux musulmans de faire l'aggiornamento de l'islam ... pour admettre la laïcité et adapter cette religion à notre époque. Cette réforme devenue indispensable, pourrait se faire en France, pays des Lumières, berceau de la laïcité et pays des libertés; par les musulmans de France dont les pays d'origine, autocratiques pour la plupart sinon dictatoriaux, n'autorisent ni la liberté de penser ni celle de s'exprimer.

R.B

Spinoza

« L’Islam : la Vérité qu’aucun leader religieux n’ose affronter », de la chaîne « La Puissance de la Raison », est une analyse philosophique des religions révélées, et plus particulièrement de l'Islam, à travers la pensée de Baruch Spinoza.

Voici la retranscription du contenu de la vidéo : 

Avez-vous déjà réfléchi à la raison pour laquelle certains sujets disparaissent simplement du débat public ? Pourquoi certaines analyses philosophiques sur la religion sont-elles réduites au silence, oubliées ou délibérément ignorées ?

Aujourd'hui, nous allons plonger dans l'un des travaux les plus controversés et courageux de l'histoire de la philosophie.

Nous allons explorer ce que Barouch Spinoza, l'un des penseurs les plus brillants du siècle, a révélé sur l'Islam et sur toutes les religions révélées.

Et préparez-vous, car ce qu'il a découvert dérange profondément ceux qui profitent du contrôle de la foi d'autrui. 

Spinoza n'a pas attaqué la spiritualité authentique, il a attaqué la manipulation, il a attaqué l'usage politique de la religion. 

Et ses conclusions sur l'Islam, aussi troublantes que ses analyses sur le judaïsme et le christianisme, découvrons ensemble pourquoi aucun leader religieux ne veut que vous connaissiez ces idées.

Barouch Spinoza est né à Amsterdam en 1632 dans une famille de juifs séfarades qui avaient fui l'Inquisition portugaise. Il a été éduqué dans la tradition juive, a étudié le Talmud, la Torah, les textes sacrés. 

Mais Spinoza possédait quelque chose de dangereux : un esprit libre. Il a commencé à questionner, il a commencé à lire de la philosophie, des sciences, des textes interdits. Et plus il étudiait, plus il réalisait que quelque chose ne correspondait pas.

Les écritures sacrées qui devaient être la parole divine étaient remplies de contradictions, de récits politiques, de manipulations humaines.

En 1656, à 24 ans, Spinoza a été excommunié de la communauté juive d'Amsterdam. Le cherem, l'excommunication, fut l'une des plus sévères jamais enregistrées. Il a été maudit, expulsé, condamné à l'ostracisme total. Pourquoi ? Parce qu'il a osé dire que Dieu n'était pas un vieil homme barbu dans le ciel dictant des lois, parce qu'il a osé dire que les écritures étaient des œuvres humaines écrites par des hommes avec des agendas politiques et parce qu'il a osé appliquer cette même logique à toutes les religions révélées, y compris l'Islam.

Dans le Traité théologico-politique, publié anonymement en 1670, Spinoza a fait quelque chose de révolutionnaire : il a appliqué la méthode historico-critique aux écritures sacrées. Il a analysé la Bible comme n'importe quel autre texte historique, en enquêtant sur l'auteur, le contexte politique, les intentions. Et ses conclusions ont été dévastatrices.

Il a démontré que Moïse n'a pas écrit le Pentateuque, que les miracles étaient des interprétations fantaisistes d'événements naturels, que les prophètes n'étaient pas des porte-paroles de Dieu, mais des hommes avec des imaginations vives et des agendas politiques.

Et puis Spinoza est allé plus loin : il a appliqué cette même analyse au christianisme et à l'Islam. Il a perçu un schéma universel. Toutes les religions révélées suivent la même structure de contrôle :

  • Toutes prétendent avoir un accès exclusif à la vérité divine. 
  • Toutes utilisent la peur de la punition éternelle pour contrôler les comportements. 
  • Toutes créent des hiérarchies de pouvoir où quelques-uns interprètent la volonté de Dieu pour les masses; et 
  • Toutes font taire ceux qui questionnent.

Comprenons ce que Spinoza a réellement dit sur l'Islam :

Premièrement, il est crucial de comprendre que Spinoza n'attaquait pas les musulmans en tant que personne ; il analysait la structure théologico-politique de l'Islam comme système.

Et qu'a-t-il découvert ?

Que l'Islam, tout comme le judaïsme et le christianisme, est né dans un contexte de lutte politique et de consolidation du pouvoir. 

Mohamed, selon Spinoza, était un leader politique génial qui comprenait parfaitement comment utiliser la religion pour unifier des tribus arabes fragmentées. La révélation divine n'était pas une communication surnaturelle, c'était une stratégie politique brillante.

Dans le Traité théologico-politique, chapitre 1, Spinoza écrit : "Les prophètes étaient des hommes dotés d'une imagination extraordinaire, non d'un esprit spéculatif supérieur." Il continue : "Dieu a adapté ses révélations à la compréhension et aux opinions préconçues des prophètes."

Qu'est-ce que cela signifie ?

Que lorsque Mohamed affirmait recevoir des révélations d'Allah, il projetait en réalité ses propres convictions morales et politiques à travers le langage religieux. Cela ne fait pas de lui un menteur, cela fait de lui un produit de son temps utilisant les outils disponibles pour atteindre des objectifs politiques légitimes : unifier son peuple, établir des lois, créer un ordre social.

Spinoza a perçu quelque chose de fondamental à propos du Coran : tout comme la Torah et les évangiles, le Coran n'est pas seulement un texte religieux, c'est un document politique. Il contient des lois civiles, des régulations commerciales, des instructions militaires, des codes de conduite sociale.

Pourquoi ?

Parce que Mohamed ne fondait pas seulement une religion, il construisait un État. Et pour construire un État au 7e siècle dans la péninsule arabique, vous aviez besoin d'une autorité absolue. Comment obtenir une autorité absolue dans une société tribale ? Vous affirmez que vos ordres viennent directement de Dieu. Vous transformez vos décisions politiques en commandement divin. Vous rendez la désobéissance à votre autorité équivalente à la désobéissance à Dieu lui-même. C'est brillant, c'est efficace et c'est exactement ce que Moïse a fait, ce que Jésus et ses disciples ont fait, et ce que Mohamed a fait.

Regardons un exemple concret : dans le Coran, il y a des instructions très spécifiques sur le partage du butin de guerre, sur le traitement des prisonniers, sur les alliances militaires. Pourquoi Dieu se préoccuperait-il de ces détails pratiques ? Spinoza pose cette question dérangeante.

Sa réponse :

Parce que ces révélations n'ont jamais été divines. Elles étaient les décisions d'un leader politique sage qui comprenait qu'il devait réguler chaque aspect de la vie de sa communauté naissante.

Pensez-y, Mohamed était entouré de tribus bédouines qui se battaient constamment entre elles. Il avait besoin de règles claires pour maintenir la cohésion, il avait besoin de lois sur le mariage pour éviter les conflits de clan, il avait besoin de régulations économiques pour assurer une distribution juste des ressources.

Mais comment imposer ces règles à des guerriers farouches et indépendants ? En disant que ces règles viennent de lui ? Non. En disant qu'elles viennent de Dieu.

Spinoza va encore plus loin dans son analyse. Il examine les descriptions du Paradis et de l'Enfer dans le Coran et il remarque quelque chose de fascinant : les récompenses promises aux croyants reflètent exactement ce qui manquait aux Arabes du désert au 7e siècle : des jardins luxuriants avec des rivières, des fruits abondants, des vierges, du vin qui ne rend pas ivre. Qu'est-ce que cela nous dit ? Que le Paradis islamique est une projection parfaite des désirs d'un peuple vivant dans un environnement hostile et aride. Ce n'est pas une révélation universelle et intemporelle, c'est une vision profondément ancrée dans un contexte géographique et temporel spécifique.

Un Inuit du Groenland ne rêverait jamais d'un paradis rempli de jardin et de chaleur ; il rêverait probablement de chasse abondante et peut-être de chaleur humaine.

La géographie façonne la théologie, le besoin humain façonne la révélation divine, c'est ce que Spinoza démontre avec une logique implacable.

Maintenant parlons de ce qui rend cette analyse vraiment dangereuse pour les autorités religieuses.

Spinoza ne dit pas que Mohamed était mauvais, il ne dit pas que l'Islam est pire que les autres religions. Au contraire, il dit que toutes les religions révélées fonctionnent selon le même mécanisme de contrôle social. Et c'est précisément ce qui terrifie les leaders religieux. Parce que si vous acceptez l'analyse de Spinoza sur l'Islam, vous devez l'accepter aussi pour le judaïsme et le christianisme. Si le Coran est un document politique déguisé en révélation divine, alors la Torah l'est aussi, les évangiles aussi. Tous les textes sacrés deviennent soudainement des artefacts historiques, des produits de leur époque, des outils de pouvoir, plutôt que des vérités éternelles. Et cela détruit complètement le monopole des clercs sur la vérité spirituelle.

Pensez au pouvoir que les leaders religieux exercent : les Imams, les Rabbins, les Prêtres.

Tous affirment avoir une compréhension spéciale de la volonté divine. Ils se positionnent comme intermédiaires nécessaires entre Dieu et les croyants ordinaires.

Mais si Spinoza a raison, si les textes sacrés sont des créations humaines, alors ces intermédiaires ne sont plus nécessaires. Chaque personne peut lire, interpréter et questionner par elle-même. L'autorité religieuse s'effondre, le pouvoir se dissout.

Et c'est exactement pourquoi le Traité théologico-politique a été immédiatement interdit dans presque toute l'Europe.

Les autorités chrétiennes, juives et même certaines voix musulmanes qui en ont entendu parler, toutes ont reconnu le danger que représentait cette philosophie.

Mais il y a quelque chose de plus profond encore dans l'analyse de Spinoza. Il ne se contente pas de déconstruire les religions révélées, il propose une alternative. Pour Spinoza, Dieu n'est pas un être personnel qui donne des ordres et punit la désobéissance. Dieu est la Nature elle-même, Deus sive Natura (Dieu est la nature). Tout ce qui existe est une manifestation de la substance divine unique. Les lois de la nature sont les lois de Dieu. Comprendre la nature, c'est comprendre Dieu. Cette vision panthéiste détruit complètement le fondement des religions révélées. Si Dieu est la nature, alors il n'y a pas de révélation spéciale, il n'y a pas de peuples élus, il n'y a pas de prophètes privilégiés. Il y a seulement la réalité observable, accessible à tous ceux qui utilisent leurs raisons.

La vraie spiritualité, selon Spinoza, consiste à comprendre notre place dans l'ordre naturel, à vivre selon la raison, à cultiver la joie et à aider les autres, pas à obéir aveuglément à des commandements prétendument divins.

Appliquons cette vision à l'Islam spécifiquement.

Que se passe-t-il si un musulman adopte la perspective spinosiste ? Il peut toujours apprécier la beauté poétique du Coran. Il peut toujours trouver de la sagesse dans certains de ses enseignements moraux. Il peut toujours valoriser la communauté et les rituels qui donnent un sens à sa vie. Mais il ne se sent plus obligé de croire littéralement que l'ange Gabriel a dicté chaque mot à Mohamed. Il ne se sent plus obligé d'accepter que les lois du 7e siècle doivent s'appliquer universellement au 21e siècle. Il devient libre de choisir ce qui résonne avec sa raison et son expérience et de laisser de côté ce qui ne fonctionne plus. C'est une révolution spirituelle personnelle; et c'est précisément, ce que les autorités religieuses ne peuvent pas tolérer.

Regardons maintenant comment cette analyse s'applique aux structures de pouvoir actuelles dans le monde islamique. Dans de nombreux pays musulmans, la religion et l'État sont profondément entrelacés. Les lois religieuses, la Charia, régulent non seulement la vie spirituelle mais aussi la vie civile, commerciale, familiale. Les érudits religieux, les Oulémas, exercent une influence énorme sur la politique, l'éducation, la justice. Pourquoi ? Parce que le modèle établi par Mohamed, selon l'analyse de Spinoza, était précisément celui d'une théocratie où le religieux et le politique sont inséparables. Mohamed n'était pas seulement un prophète spirituel, il était un chef militaire, un législateur, un juge, un chef d'État. L'Islam, dès sa naissance, a été conçu comme un système total régissant tous les aspects de la vie. Et ce modèle perdure aujourd'hui dans de nombreux endroits.

Mais voici la question critique que Spinoza nous force à poser : ce modèle sert-il réellement la spiritualité authentique des croyants ou sert-il principalement à maintenir le pouvoir de ceux qui contrôlent l'interprétation religieuse ? Quand un gouvernement impose des lois religieuses sous peine de punition sévère, est-ce de la foi ou de la coercition ? Quand des érudits religieux déclarent que questionner certaines doctrines est un blasphème punissable de mort, cherchent-ils vraiment à protéger la vérité divine ou protègent-ils leur propre autorité

Spinoza nous donne les outils pour poser ces questions inconfortables. Il nous montre que le véritable test d'une religion n'est pas sa prétention à la vérité révélée, mais ses effets concrets sur la liberté, la dignité et le bien-être humain.

Prenons un exemple concret et sensible : Le statut des femmes dans certaines interprétations de l'Islam. Le Coran contient des passages qui, interprétés littéralement, suggèrent une subordination des femmes aux hommes. Les femmes héritent de la moitié de ce que les hommes héritent, le témoignage de deux femmes équivaut au témoignage d'un homme, les hommes ont autorité sur les femmes. Comment les autorités religieuses justifient-elles ces dispositions aujourd'hui ? En disant que c'est la volonté divine immuable révélée par Dieu lui-même.

Mais que se passe-t-il si nous appliquons l'analyse de Spinoza ? Ces lois reflètent simplement les normes sociales du 7e siècle dans la péninsule arabique.

À cette époque, dans ce contexte, ces régulations représentaient peut-être même un progrès relatif par rapport aux pratiques tribales antérieures où les nouveau-nés filles étaient enterrées vivantes. Mais les présenter comme des vérités divines éternelles applicables à toutes les époques est une manipulation qui sert les intérêts de ceux qui bénéficient de ces structures de pouvoir patriarcal.

Spinoza écrit dans le Traité théologico-politique : "La méthode d'interpréter l'Écriture ne diffère en rien de la méthode d'interpréter la nature. Elle s'accorde même entièrement avec elle."

Qu'est-ce que cela signifie ?

Nous devons lire les textes sacrés avec la même rigueur critique que nous appliquons à n'importe quel autre document historique. Nous devons comprendre le contexte dans lequel ils ont été écrits. Nous devons identifier les motivations politiques et sociales des auteurs. Nous devons reconnaître les contradictions et les incohérences. Et nous devons avoir le courage d'admettre que ces textes ne sont pas infaillibles, simplement parce qu'ils prétendent être divins. Cette approche est aussi valable pour le Coran que pour la Bible.

Maintenant, imaginez ce qui se passerait si cette méthode critique était enseignée largement dans le monde musulman. Si les jeunes étudiants apprenaient à analyser le Coran comme un texte historique plutôt que comme une dictée divine littérale. Si les universités islamiques adoptaient une approche historico-critique des Hadiths et de la Sira nabaouyia (tradition prophétique). Qu'arriverait-il ? Une révolution intellectuelle. Des interprétations rigides et littéralistes perdraient leur emprise. Les justifications religieuses pour la violence, l'oppression, la discrimination s'effondreraient. Les croyants deviendraient libres de séparer les principes éthiques universels des règles culturelles spécifiques. L'Islam pourrait se réformer de l'intérieur, tout comme le christianisme et le judaïsme l'ont fait dans de nombreux contextes. Mais cette réforme menace directement le pouvoir des gardiens traditionnels de l'orthodoxie. C'est pourquoi les idées de Spinoza restent dangereuses, même aujourd'hui, presque quatre siècles après sa naissance.

Dans certains pays musulmans, simplement posséder ou lire certaines œuvres philosophiques critiques peut être dangereux. Les penseurs qui osent appliquer une critique rationnelle aux textes sacrés sont accusés d'apostasie, de blasphème, de corruption. Ils sont censurés, emprisonnés, parfois tués. Pourquoi une telle violence ? Parce que les questions qu'ils posent menacent les fondements mêmes du pouvoir religieux établi :

  • Si le Coran est un texte humain, alors les Oulémas perdent leur autorité exclusive.
  • Si la Charia est un système juridique historiquement contingent, alors les juges religieux perdent leur monopole sur la justice.
  • Si la foi devient une affaire personnelle de raison et de conscience, plutôt qu'une obéissance collective à des dogmes, alors toute la structure de contrôle social s'effondre.

Mais réfléchissons aussi aux conséquences pratiques de cette censure intellectuelle.

Quand une société interdit la pensée critique sur la religion, que se passe-t-il ? Les jeunes perdent la capacité d'adapter leur foi aux défis du monde moderne. Ils se retrouvent piégés entre deux options également insatisfaisantes : soit accepter aveuglément des doctrines qu'ils trouvent de plus en plus difficiles à croire, soit rejeter complètement la religion et perdre leur ancrage spirituel et culturel. Il n'y a pas d'espace pour une troisième voie, une voie mature et critique qui honore la tradition tout en l'interprétant avec sagesse et raison. Cette rigidité crée des tensions énormes, alimente l'extrémisme d'un côté et l'athéisme militant de l'autre. Personne n'en bénéficie, sauf ceux qui profitent du conflit et de la division.

Spinoza nous offre précisément cette troisième voie. Il nous montre qu'il est possible d'être profondément spirituel sans être superstitieux. Il nous montre qu'il est possible de valoriser la sagesse des traditions religieuses sans accepter aveuglément chaque affirmation surnaturelle. Il nous montre qu'il est possible de critiquer les structures de pouvoir religieux sans manquer de respect aux croyances sincères.

Et il nous montre que la vraie piété consiste à vivre selon la raison et l'amour, non à obéir par peur à des commandements autoritaires. Cette vision est aussi pertinente pour les musulmans d'aujourd'hui qu'elle l'était pour les Juifs et les Chrétiens du 17e siècle.

Parlons maintenant d'un aspect spécifique que Spinoza analyse : le concept de loi divine versus loi humaine.

Dans l'Éthique, son œuvre maîtresse, Spinoza explique que les vraies lois divines sont les lois de la nature, universelles et immuables. Elles ne dépendent pas de la croyance. La gravité fonctionne que vous y croyez ou non. Les principes éthiques fondamentaux comme ne pas tuer, ne pas voler, traiter les autres avec respect, découlent de la nature sociale de l'humanité et de la nécessité de coopération pour survivre. Ces principes se retrouvent dans toutes les cultures, dans toutes les religions, précisément parce qu'ils sont universellement nécessaires.

En revanche, les lois spécifiques des religions révélées : les rituels particuliers, les interdits alimentaires, les codes vestimentaires ... tout cela est contingent, culturel, humain.

Ces lois peuvent avoir eu une fonction sociale utile dans leur contexte original, mais les présenter comme commandements divins éternels, est une erreur philosophique et une manipulation politique.

Appliquons cette distinction à l'Islam :

Les cinq piliers de l'Islam sont la chahada (la profession de foi), la prière cinq fois par jour, l'aumône, le jeûne du Ramadan et le pèlerinage à La Mecque.

Selon Spinoza, aucun de ces rituels n'est intrinsèquement divin. Ce sont des pratiques qui créent une identité communautaire, renforcent la discipline personnelle, redistribuent la richesse et unifient les croyants à travers des expériences partagées. Tout cela est précieux et utile, mais ce ne sont pas des commandements de Dieu au sens métaphysique. Ce sont des institutions humaines, conçues pour des objectifs sociaux spécifiques. Comprendre cela ne diminue pas nécessairement leur valeur, cela change simplement notre relation avec eux. Nous les pratiquons non par peur de la punition divine, mais parce que nous reconnaissons leur utilité pratique et symbolique.

Et quand ces pratiques ne servent plus leurs objectifs originaux ou quand elles entrent en conflit avec des valeurs éthiques plus fondamentales, nous avons la liberté de les adapter ou de les abandonner.

Prenons l'exemple du jeûne du Ramadan :

Pour une personne vivant dans un climat désertique avec des journées de longueur raisonnable, jeûner du lever au coucher du soleil pendant un mois peut être un défi gérable qui cultive la discipline et l'empathie pour ceux qui ont faim. Mais que dire d'un musulman vivant dans le nord de la Norvège pendant l'été où le soleil ne se couche pratiquement jamais ? Doit-il jeûner 22 heures par jour et risquer sa santé ? Ou peut-il adapter la pratique au contexte ?

Les autorités religieuses débattent de telles questions avec une casuistique complexe, essayant de concilier la lettre de la loi avec la réalité pratique.

Mais avec l'approche spinosiste, la réponse est simple : la pratique doit servir le bien-être humain et la croissance spirituelle. Si elle ne le fait pas dans un contexte donné, adaptez-la.

Il n'y a pas de Dieu tyrannique dans le ciel qui compte vos heures de jeûne. Il y a seulement vous, votre conscience et votre engagement envers ce qui est vraiment bon et juste.

Voici peut-être l'insight le plus radical de Spinoza concernant toutes les religions révélées, y compris l'Islam : les textes sacrés obtiennent leur autorité non de leur origine divine prétendue, mais de la sagesse qu'ils contiennent effectivement. Un commandement n'est pas bon parce que Dieu l'a donné. Au contraire, nous attribuons à Dieu les commandements que nous reconnaissons déjà comme bons par notre raison naturelle. Cela inverse complètement la logique traditionnelle.

Selon la théologie orthodoxe, le meurtre est mauvais parce que Dieu l'a interdit.

Selon Spinoza, Dieu est dit avoir interdit le meurtre parce que nous reconnaissons par la raison que le meurtre détruit la coopération sociale et le bien-être humain.

La moralité précède la révélation, elle ne la suit pas.

Cette inversion a des implications énormes. Cela signifie que nous n'avons pas besoin de religion révélée pour être moraux. Cela signifie que nous pouvons et devons évaluer les commandements religieux selon des critères éthiques indépendants. Cela signifie que quand un texte sacré prescrit quelque chose que notre raison et notre conscience rejettent comme cruel ou injuste, nous avons non seulement le droit mais le devoir de rejeter cette prescription. Nous ne sommes pas obligés de torturer notre raison pour la faire correspondre à des textes anciens. Nous pouvons reconnaître que ces textes reflètent les limitations morales de leur époque et continuer notre propre quête d'éthique rationnelle. 

Pensez à quel point cette approche est libératrice. Un jeune musulman qui lutte avec certains enseignements coraniques qu'il trouve moralement problématiques n'a pas à choisir entre la foi et la conscience. Il peut reconnaître que le Coran contient à la fois une sagesse profonde et des éléments culturellement datés. Il peut garder ce qui résonne avec sa raison et sa conscience et laisser le reste comme artefact historique. Il n'a pas à se sentir coupable ou apostat. Il honore simplement la capacité rationnelle que Dieu ou la nature lui a donné. C'est une spiritualité adulte, mature, responsable. Mais c'est aussi une spiritualité que les autorités religieuses ne peuvent pas contrôler et c'est pourquoi elles la combattent si férocement.

Maintenant abordons l'éléphant dans la pièce : la violence religieuse.

Spinoza écrit abondamment sur comment les religions révélées, quand elles fusionnent avec le pouvoir politique, produisent inévitablement de l'intolérance et de la violence. Pourquoi ? Parce que si vous croyez vraiment posséder la vérité absolue révélée par Dieu lui-même, alors tous ceux qui ne sont pas d'accord avec vous sont non seulement dans l'erreur, mais en rébellion contre Dieu. Ils méritent d'être punis. Les sauver de leur erreur devient un devoir sacré, même si cela nécessite la force. C'est ainsi que naissent les Inquisitions, les Croisades, les Jihads, les persécutions de tout type.

Ce n'est pas que certaines religions sont intrinsèquement plus violentes que d'autres, c'est que toutes les religions révélées contiennent le germe de l'intolérance quand elles prétendent au monopole de la vérité divine.

L'histoire de l'Islam, comme celle du christianisme et du judaïsme, contient à la fois de magnifiques exemples de tolérance et des épisodes terribles de persécution. Il y a eu des périodes et des lieux où les sociétés musulmanes étaient parmi les plus tolérantes et cosmopolites du monde, accueillant Juifs, Chrétiens, Zoroastriens, permettant le débat philosophique et scientifique. L'Espagne médiévale sous domination musulmane, Bagdad sous les Abassides ... ces lieux ont produit des merveilles de culture et de savoir.

Mais il y a eu aussi des périodes de rigidité, de persécution des hérétiques, de violence contre les non-croyants et les apostats.

Qu'est-ce qui fait la différence ?

Selon Spinoza, la différence se trouve dans le degré de séparation entre autorité religieuse et autorité politique, et dans le degré de liberté de pensée tolérée. Quand les clercs contrôlent l'État, quand le blasphème devient un crime civil, quand l'orthodoxie religieuse est imposée par la force, la violence suit inévitablement.

Quand les individus sont libres de penser, questionner, interpréter par eux-mêmes, quand la diversité religieuse est tolérée, quand l'État reste neutre en matière de doctrine, alors la paix et la prospérité fleurissent.

Ce n'est pas une coïncidence, c'est un principe observable historiquement : les sociétés les plus libres et les plus prospères sont celles qui ont séparé la religion du pouvoir coercitif de l'État. Les sociétés les plus oppressives et les plus stagnantes sont celles qui ont fusionné les deux. C'est vrai, que vous parliez de l'Europe chrétienne médiévale, de l'Iran théocratique moderne ou de n'importe quel autre exemple.

Spinoza plaide donc passionnément pour la liberté de pensée et d'expression, même et surtout en matière religieuse.

Dans le Traité théologico-politique, chapitre 20, il écrit : "Dans un état libre, il est permis à chacun de penser ce qu'il veut et de dire ce qu'il pense." Il argumente que cette liberté n'est pas seulement compatible avec la paix sociale, mais absolument nécessaire pour elle. Pourquoi ? Parce que supprimer la liberté de pensée ne supprime pas la pensée elle-même. Les gens continueront à penser, à douter, à questionner en privé. Mais s'ils ne peuvent pas exprimer leurs doutes ouvertement, s'ils doivent constamment simuler une conformité qu'ils ne ressentent pas, cela crée une société d'hypocrites et de délateurs. La confiance sociale s'érode, la créativité intellectuelle meurt, et tôt ou tard, les tensions accumulées explosent en violence.

Appliquons cela au monde islamique contemporain.

Dans certains pays, des blogueurs, des écrivains, des intellectuels sont emprisonnés ou tués simplement pour avoir exprimé des doutes sur des doctrines religieuses orthodoxes. Des femmes qui retirent le hijab sont harcelées. Des athées doivent cacher leur non-croyance sous peine de mort. Des musulmans qui se convertissent à d'autres religions sont considérés comme apostats méritant l'exécution. Tout cela est justifié par référence au Coran et à la tradition prophétique.

Mais que se passe-t-il réellement ? Une petite élite de gardiens religieux utilise la violence et la peur pour maintenir son pouvoir sur la vie spirituelle et intellectuelle de millions de personnes. Et ils le font au nom de Dieu, en affirmant protéger la foi. Mais, comme Spinoza le démontre, ils ne protègent pas la foi ; ils protègent leur propre autorité. La vraie foi n'a pas besoin de protection violente.

La vérité peut se défendre par la raison et l'argument.

Imaginons maintenant un monde musulman qui aurait embrassé les principes spinosistes.

Un monde où le Coran serait étudié comme un texte historique fascinant et profond, mais pas comme une dictée divine littérale. Un monde où chaque musulman serait libre d'interpréter sa foi selon sa propre raison et conscience. Un monde où la Charia ne serait pas imposée par l'État, mais où les principes éthiques universels seraient codifiés dans des lois civiles démocratiques. Un monde où les femmes auraient une pleine égalité, où les minorités religieuses seraient respectées, où l'apostasie ne serait pas un crime, mais un choix personnel. Un monde où la critique intellectuelle de la religion serait non seulement tolérée, mais encouragée comme signe de vitalité intellectuelle.

Est-ce que cela détruirait l'Islam ?

Au contraire. Cela pourrait le revitaliser, le rendre pertinent et puissant pour le 21e siècle, tout comme les Réformes protestantes et les Lumières ont revitalisé le christianisme en Europe.

Certains pourraient objecter que cette vision est une forme d'impérialisme occidental, une tentative d'imposer des valeurs européennes laïques sur l'Islam. Mais c'est une mauvaise compréhension.

Spinoza ne plaidait pas pour l'occidentalisation, il plaidait pour l'universalisation de la raison.

Et la raison n'appartient à aucune culture, elle est une capacité humaine universelle.

Il y a eu et il y a des penseurs musulmans qui sont arrivés à des conclusions similaires indépendamment : les Mu'tazilites du IXe siècle qui insistaient sur le rôle central de la raison dans la compréhension religieuse ; les philosophes comme Averroès qui harmonisaient la philosophie grecque avec l'Islam ; les réformateurs modernes comme Mohamed Arkoun, Nasr Hamid Abou Zeid, Abdelkarim Sorouch, qui appliquent des méthodes critiques aux textes islamiques. Ces penseurs ne sont pas moins authentiquement musulmans parce qu'ils pensent de manière critique. Ils représentent une tradition rationnelle au sein de l'Islam lui-même.

Le problème est que cette tradition rationnelle a été largement supprimée par les forces de l'orthodoxie rigide. Après les Mu'tazilites, sont venus les Asharites qui ont rejeté le rationalisme. Après Averroès, est venue une longue période de fermeture intellectuelle. Les portes de l'Ijtihad (l'interprétation indépendante) ont été déclarées fermées. L'imitation aveugle des autorités passées (taqlid) est devenue la norme.

Et cette stagnation intellectuelle a eu des conséquences désastreuses pour les sociétés musulmanes. Pendant que l'Europe passait par la Renaissance, la Réforme, les Lumières, la révolution scientifique, le monde musulman restait largement figé dans des interprétations médiévales. Ce n'est pas parce que l'Islam est intrinsèquement antirationaliste, c'est parce que les structures de pouvoir religieux ont étouffé la pensée critique.

Spinoza nous montre le chemin de sortie de cette impasse. Il nous montre que critiquer les structures de pouvoir religieux n'est pas un manque de respect envers la spiritualité, mais au contraire, son expression la plus élevée. Il nous montre que la vraie piété consiste à chercher la vérité avec courage, où qu'elle mène, non à répéter des formules par peur. Il nous montre que Dieu ou la nature nous a donné la raison précisément pour que nous l'utilisions, non pour que nous l'abandonnions au profit de l'obéissance aveugle.

Et il nous montre que les sociétés qui honorent la liberté de pensée prospèrent, tandis que celles qui la suppriment stagnent et souffrent.

Voilà la vérité qu'aucun leader religieux n'ose affronter : non pas que leur texte sacré soit faux, car beaucoup contiennent une sagesse réelle ; non pas que leur rituel soit sans valeur, car beaucoup créent du sens et de la communauté ; mais que leur prétention à l'autorité divine exclusive est une illusion, que leur pouvoir repose sur la manipulation de la peur et de l'espoir humain, que leurs structures hiérarchiques servent principalement leurs propres intérêts, et que leurs affirmations de vérité absolue sont incohérentes avec la diversité observable de l'expérience et de la pensée humaine.

Spinoza a révélé tout cela il y a presque quatre siècles, et ses insights restent aussi pertinents et aussi dangereux aujourd'hui.

Terminons par une réflexion personnelle.

Si vous êtes musulman et que vous avez lu jusqu'ici, vous vous sentez peut-être troublé, peut-être même en colère. C'est compréhensible. Ces idées remettent en question des croyances profondément ancrées. Mais je vous invite à considérer ceci : Spinoza ne vous demande pas d'abandonner votre foi ou votre identité. Il vous demande seulement d'examiner honnêtement les fondations de cette foi, de distinguer entre ce qui est véritablement spirituel et éthique et ce qui est simplement contrôle social déguisé en commandement divin, d'honorer votre propre capacité rationnelle autant que vous honorez la tradition, et de reconnaître que vous avez le droit et le devoir de penser par vous-même, même en matière de religion.

Si vous n'êtes pas musulman, vous pourriez être tenté de voir cette analyse comme une confirmation de vos préjugés contre l'Islam. Résistez à cette tentation. Tout ce que Spinoza dit sur l'Islam s'applique également au judaïsme et au christianisme. Toutes les religions révélées fonctionnent selon les mêmes mécanismes. Toutes mélangent sagesse et superstition, éthique et pouvoir, aspiration spirituelle et manipulation politique. Le défi n'est pas de rejeter l'Islam spécifiquement, mais de développer une approche critique et rationnelle envers toutes les affirmations de vérité révélée, quelle que soit leur origine.

Dans ce texte comme dans notre vidéo, notre objectif n'a pas été d'affirmer que la vision de Spinoza est la seule correcte ni d'induire quiconque à la dé-croyance. Nous avons simplement présenté l'analyse philosophique de l'un des plus grands penseurs de l'histoire occidentale appliquée à l'Islam, comme il l'a appliquée à toutes les religions révélées.

Spinoza lui-même serait le premier à dire que ses idées doivent être examinées rationnellement, non acceptées par autorité. Notre intention est d'ouvrir un espace pour la pensée critique, d'encourager la réflexion indépendante, et de permettre à chacun de décider par soi-même.

Nous ne présentons pas une vérité absolue, mais une proposition philosophique qui mérite d'être connue et débattue.

La foi authentique n'a rien à craindre de la réflexion honnête.

Voilà la vision de Spinoza : une proposition radicale qui bouleverse les fondements des religions organisées, une philosophie qui libère la spiritualité de la superstition et l'éthique de l'autorité arbitraire, une invitation à penser par soi-même, à vivre selon la raison et à chercher le divin dans la nature observable plutôt que dans les proclamations de prophètes autoproclamés. 

mardi 30 septembre 2025

CES TARTUFES QUI NOUS GOUVERNENT !

... OU QUAND LES ISLAMISTES INSTRUMENTALISENT AUSSI, LA JUSTICE !!

Agoravox 

Kapitalis

Mon article " CES TARTUFES QUI NOUS GOUVERNENT ", classé n° 369 dans la table de matière de mon blog, en date du 26.5.2013; à ma grande surprise, a été retiré le 22.9.2025 ... c'est à dire plus de 12 ans après sa parution !

Voici la justification que m'en donne le gestionnaire du blog : " Cet article a été placé derrière un message d'avertissement destiné aux lecteurs, car il comporte du contenu qualifié de sensible dans le Règlement de la communauté de Bloggeur. "

Est-ce de la censure ? Malgré mes réclamations, dont voici la dernière, mon article n'a toujours pas été rétabli !

" Monsieur,
Votre réponse m'étonne pour deux raisons :
1° - Mon article date du 26.5.2013 quand les islamistes étaient au pouvoir en Tunisie , et que vous le jugez non conforme au règlement que le 22.9.2025 ... c'est dire plus de 12 ans après sa parution !
2° - Je vous confirme qu'il dénonce la pudibonderie de l'islamiste Ghannouchi que les FEMEN aurait choqué; alors qu'il ne semble pas choqué d'avoir encouragé le terrorisme, le jihad sexuel des Tunisiennes (prostitution halal), les assassinats politiques de Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi, de Lotfi Naghedh et de bien d'autres ...; tous ces crimes commis avec sa bénédiction !
Alors je ne comprends pas en quoi ai-je contrevenu au "règlement de la communauté", pour justifier le retrait de mon article de mon blog, alors que je dénonce ces tartufes qui ont mis le pays à feu et à sang, quand ils étaient au pouvoir en Tunisie !
Je vous demande donc de rétablir mon article retiré sûrement par erreur de jugement. "

R.B


Et voici l'article litigieux :

A quelques jours du 30 mai 2013 date à laquelle doit être jugée, en principe, Amina la " Femen " tunisienne, le pouvoir en place réédite sa politique de deux poids deux mesures, face à des événements qu'il estime choquant ... et ce faisant, il choque une nouvelle fois les Tunisiens. Il les scandalise par ses prises de positions confirmant, hélas, l'état d'une justice encore aux ordres !

Depuis la prise du pouvoir par les islamistes, on ne peut que constater l'usage qu'ils font de la justice : une consommation excessive et abusive ! Reproduiraient-ils ce dont ils ont souffert durant leur pseudo militantisme ? Nous savons que Ben Ali avait instrumentalisé la justice et multiplié les procès "politiques" à l'encontre des islamistes !

Est-ce que Ghannouchi voudrait pérenniser un système contre lequel les Tunisiens se sont révoltés ? Sait-il que le but de leur révolution est de rompre avec tous les systèmes du totalitarisme ? Ou cherche-t-il à ridiculiser les juges en instrumentalisant la justice par des parodies de justice ?

Quant au FEMEN, cette forme de lutte de certaines féministes, elle peut choquer. On se demande si elle n'est pas contre-productive dans certaines circonstances !

Le mouvement Femen est un groupe contestataire féministe d'origine ukrainienne.

Le groupe est devenu internationalement connu pour avoir organisé des actions, essentiellement avec seins nus, dans le but de défendre les droits des femmes, ce qui les conduit aussi à s'impliquer sur plusieurs autres sujets, notamment pour la démocratie et contre la corruption, la prostitution ou encore l'influence des religions dans la société.

Les militantes de Femen sont ainsi adeptes d'un féminisme radical qu'elles appellent " sextrémisme ".

L'action du groupe en Europe se traduit par une critique de la religion. Les Femen remettent en cause la place des religions dans la société et principalement du christianisme, considérant que l'Église répand des valeurs misogynes. Selon elles, " le féminisme et la religion ne sont pas deux choses qui peuvent coexister ". 

Le groupe a manifesté, en Suède, contre l’intégration de la religion dans le projet de Constitution du gouvernement de Mohamed Morsi, en Égypte.

Personne ne peut contester la misogynie des religions monothéistes que sont le judaïsme, le christianisme et l'islam, toutes les trois étant basées sur le patriarcat, ayant pour patriarche commun Abraham !


Le constat de Femen sur la condition de la femme à cause de la religion, est vrai pour ces trois religions monothéistes.

Les Femen veulent dire stop au paternalisme qui les infantilise et les traite d'éternelles mineures ! 

Paternalisme entretenu encore par les prêtres, les rabbins et les imams de ces trois religions ! 

Si elles utilisent leur corps pour le contester, c'est par réaction à ceux qui cherchent à se l'approprier, ne voyant en elles qu'un objet sexuel ... sans plus, chez certains extrémistes religieux !

Est-ce transposable dans les pays de culture musulmane ? En principe oui mais pas en pratique compte tenu du modèle social archaïque plus ou moins marqué chez les peuples musulmans, qui s'organise autour du groupe et non autour de l'individu. Ce qui se traduit par des sociétés moins libérées et souvent à l'esprit encore pudibond, comparées à celles des pays démocratiques qui privilégient l'individu.

Une chose est certaine, il y a d'autres révolutions à entreprendre dont celle des mentalités des peuples dits "arabo musulmans", pour qu'ils cessent de considérer la femme comme objet sexuel !

Si les islamistes au pouvoir ont pu être choqués par la nudité des corps, ils peuvent admettre que les tunisiens dans leur majorité puissent être choqués par la "fitna" (discorde) semée parmi eux par Ghannouchi pour les diviser par les discours et les violences qui se déversent sur le pays par des prédicateurs d'importation auxquels son gouvernement les livre en vue de leur "rééducation", pour leur faire recouvrer leur identité arabo musulmane, qu'ils auraient perdue, comme si la révolution l'était pour çà ! Alors qu'ils découvrent sa supercherie, que ce n'est que pour les convertir à une identité "saoudo-wahhabite" !

Les Tunisiens sont choqués par les prédicateurs obscurantistes qui prônent les châtiments corporels des plus barbares, qui appellent au jihadisme sur une terre d'islam millénaire, qui appellent au meurtre des mécréants qui refusent le wahhabisme ...

Alors que ceux parmi ces islamistes que la vue d'un sein choque, restent impassibles devant les exactions des salafistes que Ghannouchi considère comme ses enfants, porteur de nouvelle culture, dit-il goguenard !

Rappelez-vous ce qui a pu choquer les islamistes :

- le film Persèpolis,

- le film de Nadia Fani "Ni Dieu ni maître",

- la photo du couple dont on devine à peine le sein de la partenaire, du journal Ettounsia ...

qui feront l'objet d'une censure qui ne dit pas son nom ; organisée par Ennahdha mais confiée aux "salafistes", sa base armée, pour les démonstrations de force sur le terrain ; qui sera relayée très vite par le gouvernement Ghannouchi qui promptement mettra en accusation les fauteurs de troubles que sont pour lui les artistes, les journalistes ... et n'inquiétera nullement les "salafistes" ni ne condamnera leur violence qui a failli mettre à feu et à sang le pays parceque "choqués" de tant de nudité et d' "immoralité"... leur trouvant souvent même, des excuses à ces "salafistes" !

Rappelons, aux islamistes ce qui a pu choquer les Tunisiens :

- la profanation du drapeau national qui devient récurrente,

- les agression à l'intérieur des universités,

- l'appel au meurtre dans les mosquées transformées en tribune politique pour Ennahdha et ses salafistes,

- le saccage des mausolées, des mosquées, des cimetières faisant partie du patrimoine collectif des Tunisiens et de l'identité tunisienne ... sur injonction des prédicateurs invités par Ghannouchi et ses hommes. Car le wahhabisme qu'ils diffusent, ne tolère aucune autre obédience que la leur ni aucune autre croyance !

- l'incendie de l'ambassade américaine et la fuite rocambolesque de Abou Yadh de la mosquée El Fath à Tunis, responsable de cet incendie et des morts ...

- les agression physiques faites aux personnes, les saccages des biens d'autrui, le lynchage occasionnant la mort de Lotfi Naghedh ... jusqu'à l'assassinat politique de Chokri Belaïd !

- la circulation des armes, les camps d’entraînements tolérés par Ghannouchi et révélés lors des incidents graves de jebel Chaâmbi !

- l'expédition des jeunes tunisiens, transformés en "jihadistes" et en chair à canon pour le compte de l'émir du Qatar,

- l'expédition des jeunes tunisiennes, transformées en "jihadistes du sexe" pour le repos du guerrier "jihadiste", depuis la "fatoua" de Youssef Qaradhaoui qui a légalisé cette prostitution 

- faisant de la Tunisie détentrice du triste record de premier pays exportateur de jihadistes/terroristes ! 

Or les responsables ne sont ni inquiétés ni arrêtés. Et les rares qui le seront, très vite seront remis en liberté ... voir, glorifiés par des constituants nahdhaouis !

Pourquoi ce "deux poids, deux mesures" ?

De même que les Tunisiens sont choqués de l'attitude du gouvernement Ghannouchi en ce qui concerne :

- le couple au baiser "public",

- les fiancés pris en "flagrant" flirt et dont le jeune homme sera racketté par le policier et la jeune fille sera violée par ses collègues ... et se retrouve poursuivie pour atteinte à la pudeur !

- que dire de Sami Fehri toujours en prison par le fait du prince en totale contradiction avec le droit !

- Et du doyen Habib Kazdoghli malmené pour avoir résisté à l'obscurantisme !

Pour lesquels la justice a été très vite mobilisée pour sévir et punir !

Si la justice doit poursuivre tout ce qui "choque", elle doit le faire en restant neutre ! Car le fait de poursuite dans certains cas et non dans d'autres, donnera à la population un sentiment que la justice n’est pas la même pour tous.

A-t-on poursuivi les prêches haineux, les appels au meurtre ? Et les déclarations des salafistes obscurantistes, ne sont-elles pas, et de beaucoup, plus dangereuse et plus choquantes que l’action d’Amina ?

Si Ghannouchi et ses hommes sont tant choqués par l'extrémisme pacifique d'Amina la femen tunisienne, au point de l'emprisonner et la juger; ils devraient l'être d'avantage par l'extrémismes violent des salafistes où souvent il y a mort d'hommes ! Pourquoi condamner l'une et pas les autres ? Pourquoi toujours cette règle de deux poids deux mesures ? Ennahdha perd toute crédibilité ... et la justice avec !

Il est vrai que les salafistes sont les enfants de Ghannouchi dont le terrorisme lui rappelle avec beaucoup d'émotion le sien à leur âge, comme il aime à le rappeler ! 

Et consigne a été donnée aux hommes de son gouvernement de ne pas y toucher !!

On a envie de demander au gouvernement de Ghannouchi : " mais par quoi êtes-vous vraiment choqués ? ".

Des seins nus sur un journal, des tags sur le bord d’un mur ou par les déclarations des obscurantistes qui appellent à faire régresser le pays, à sanctionner les libertés, à dévaloriser les femmes, a tuer les "mécréants" ?

Du recrutement et de l'endoctrinement d'une jeunesse transformés en jihadistes que vous "menacez" de poursuivre par ailleurs ? De la libre circulation des armes dans le pays et des jihadistes qui brandissent toutes sortes d'armes au nez et à la barbe des forces de l'ordre sans qu'ils ne soient inquiétés ?

De fournir l'émir du Qatar en chair à canon, en expédiant nos jeunes à la mort pour des causes qui ne concernent en rien la Tunisie ... en lui fournissant aussi "les filles à soldats" convaincues du "jihad nikah" (prostitution "halal"), pour donner à leurs frères jihadistes "une idée" des houris éternellement vierges qui les attendent dans l'au-delà ... comme le leur promettent les prédicateurs ?

Rachid Barnat

mardi 23 septembre 2025

Reconnaissance de la Palestine : le discours d’Emmanuel Macron à l’ONU en intégralité

Discours de Macron : La France a reconnu l’État de Palestine ce lundi 22 septembre. 


Emmanuel Macron 

Monsieur le Secrétaire général,

Mesdames et messieurs les chefs d’État et de gouvernement,

Mesdames et Messieurs,

Nous sommes là car le temps est venu. Le temps est venu de libérer les 48 otages détenus par le Hamas. Le temps est venu d’arrêter la guerre, les bombardements à Gaza, les massacres et les populations en fuite. Le temps est venu car l’urgence est partout. Le temps de la paix est venu, car nous sommes à quelques instants de ne plus pouvoir la saisir. C’est pour cela que nous nous retrouvons aujourd’hui ici. Certains diront trop tard, d’autres diront trop tôt. Une chose est sûre nous ne pouvons plus attendre.

En 1947, cette Assemblée décidait du partage de la Palestine mandataire entre deux États, l’un juif et l’autre arabe, et reconnaissait ainsi le droit de chacun à l’autodétermination. La communauté internationale consacrait là l’État d’Israël, accomplissant le destin de ce peuple, enfin, après des millénaires d’errance et de persécution, et qui put fonder là une si belle démocratie. La promesse d’un État arabe, elle, reste, jusqu’à ce jour, inachevée.

Depuis lors, c’est un long chemin d’espérance et de désespoir mêlés qu’Israéliens et Palestiniens ont parcouru chacun à leur manière. Et nous, nous avons cheminé avec eux, chacun d’entre nous selon son histoire et sa sensibilité. Mais la vérité est que nous portons la responsabilité collective d’avoir failli jusqu’ici à bâtir une paix juste et durable au Proche-Orient. C’est l’évidence même qui s’est imposée à nous le 7 octobre 2023, lorsque le peuple israélien a subi la pire attaque terroriste de son histoire. 1224 hommes, femmes et enfants tués. 4834 hommes, femmes et enfants blessés. 251 hommes, femmes et enfants enlevés.

La barbarie du Hamas et de ceux qui ont collaboré à ce massacre a stupéfait Israël et le monde. Le 7 octobre est une blessure encore vive pour l’âme israélienne comme pour la conscience universelle. Nous la condamnons sans aucune nuance car rien, jamais, nulle part, ne peut justifier de recourir au terrorisme. Nous pensons en ce jour, aux victimes et à leurs familles. Nous disons notre compassion aux Israéliens et exigeons avant toute autre chose que tous les otages encore détenus à Gaza soient libérés sans aucune condition. Nous Français avons rendu un hommage national à nos 51 compatriotes assassinés ce jour-là, et à toutes les victimes du 7 octobre 2023. Nous ne les oublierons pas. Jamais. Comme jamais nous ne cesserons le combat existentiel contre l’antisémitisme.

Français, nous savons la morsure du terrorisme. Nous portons au cœur le souvenir du témoignage de fraternité offert après les attentats commis à Paris le 7 janvier 2015, par des dizaines de dirigeants étrangers manifestant avec eux, au premier rang desquels le premier ministre israélien et le président de l’Autorité palestinienne.

Nous savons qu’aucune faiblesse n’est possible face aux terroristes.

Nous savons aussi le danger des guerres sans fin. Nous savons que le droit toujours doit l’emporter sur la force. Nous savons enfin de notre Histoire que l’attachement à l’universel et à la paix est l’héritage des siècles passés comme la condition du salut. J’affirme cela au nom de notre amitié avec Israël, à qui notre engagement n’a jamais fait défaut. Au nom de notre amitié aussi avec le peuple palestinien pour qui nous voulons que la promesse initiale des Nations unies, celle de deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité devienne réalité.

Or à cette heure, Israël étend encore ses opérations militaires à Gaza dans l’objectif déclaré de détruire le Hamas. Mais ce sont les vies de centaines de milliers de personnes déplacées, blessées, affamées, traumatisées qui continuent d’être détruites. Alors même que le Hamas a été considérablement affaibli et que la négociation d’un cessez-le-feu durable reste le moyen le plus sûr d’obtenir la libération des otages.

Rien, rien ne justifie plus la poursuite de la guerre à Gaza. Rien. Tout commande au contraire d’y mettre un terme définitif maintenant, à défaut de l’avoir fait plus tôt. Pour sauver des vies. Les vies des otages israéliens encore détenus dans des conditions atroces. Les vies des centaines de milliers de civils palestiniens accablés par la faim, la souffrance, la peur de mourir, le deuil de leurs proches. Sauver toutes les vies. Car depuis désormais près de deux ans, c’est bien la négation de l’humanité de l’autre et le sacrifice de la vie humaine qui prévalent. Oui, depuis le 7 octobre, c’est bien la vie de l’autre qui est niée.

Nous le disons depuis le premier jour de la guerre à Gaza : une vie vaut une vie. Je le sais pour avoir pris dans mes bras les familles des otages rencontrées à Tel Aviv puis à Paris. Je pense à cet instant à la mère d’Eyatar David, otage affamé et montré à la foule par ses bourreaux. Je pense à Nimrod Cohen, otage de dix-neuf ans, dont je viens de saluer le père. Je le sais pour être aussi allé au chevet des victimes palestiniennes des opérations militaires israéliennes, réfugiées à Al-Arish, des femmes, des enfants, dont je n’oublierai pas le regard. Je le sais, pour avoir rencontré des jeunes de Gaza accueillis en France et je pense à Rita Baroud qui aurait dû être avec nous aujourd’hui et qui continue de témoigner de la détresse de ses proches à Gaza. Une vie vaut une vie. Et notre devoir à tous est de protéger les uns et les autres, devoir indivisible, comme l’est notre humanité commune.

Une solution existe pour briser le cycle de la guerre et de la destruction. C’est la reconnaissance de l’autre, de sa légitimité, de son humanité et de sa dignité. Que les uns et les autres rouvrent les yeux et voient des visages humains là où la guerre a placé le masque de l’ennemi ou les traits d’une cible. C’est la reconnaissance qu’Israéliens et Palestiniens vivent dans une solitude jumelle, solitude des Israéliens après le cauchemar historique du 7 octobre 2023, solitude des Palestiniens à bout de force dans cette guerre sans fin.

Le temps est venu. Car le pire peut advenir, qu’il s’agisse du sacrifice de tant d’autres civils, de l’expulsion de la population de Gaza vers l’Égypte, de l’annexion de la Cisjordanie, de la mort des otages détenus par le Hamas, ou des faits accomplis qui changent de manière irréversible la situation sur le terrain. C’est pour cela, c’est pour cela que nous devons aujourd’hui, ici même ouvrir ce chemin de paix, car depuis juillet dernier, l’accélération des évènements est terrible. Au point où nous en sommes, il est à craindre que les accords d’Abraham ou de Camp David soient remis en cause par l’action d’Israël et que la paix devienne impossible pour longtemps au Moyen-Orient. Il pèse donc sur nous une responsabilité historique. Nous devons tout faire pour préserver la possibilité même d’une solution à deux États, Israël et la Palestine, vivant côte à côte en paix et en sécurité.

Le temps est venu. C’est pourquoi, fidèle à l’engagement historique de mon pays au Proche-Orient, pour la paix entre le peuple israélien et le peuple palestinien, je déclare que la France reconnaît aujourd’hui l’État de Palestine.

Cette reconnaissance est une manière d’affirmer que le peuple palestinien n’est pas un peuple en trop. Qu’il est au contraire ce peuple qui ne dit jamais adieu à rien, pour parler avec Mahmoud Darwich. Un peuple fort de son Histoire, de son enracinement, de sa dignité.

La reconnaissance des droits légitimes du peuple palestinien n’enlève rien aux droits du peuple israélien, que la France a soutenus dès le premier jour et au respect desquels elle n’est pas moins attachée. Précisément car nous sommes convaincus que cette reconnaissance est la solution qui seule permettra la paix pour Israël. Jamais la France n’a manqué à Israël quand sa sécurité était en jeu, y compris face aux frappes iraniennes.

Cette reconnaissance de l’État de Palestine est une défaite pour le Hamas comme pour tous ceux qui attisent la haine antisémite, nourrissent des obsessions antisionistes et veulent la destruction de l’État d’Israël.

Cette reconnaissance de la France est accompagnée par celles qui seront annoncées aujourd’hui entre autres et je les en remercie, celles d’Andorre, de l’Australie, de la Belgique, du Canada, du Luxembourg, de Malte, de Monaco, du Portugal, du Royaume-Uni, de Saint-Marin qui ont attendu avec nous ce moment et saisissant l’appel de juillet dernier, ont fait le choix de la responsabilité, de l’exigence et de la paix. Cela, après le choix fait par l’Espagne, l’Irlande, la Norvège et la Slovénie en 2024, et tant d’autres auparavant.

Cette reconnaissance ouvre le chemin d’une négociation utile aux Israéliens comme aux Palestiniens.

Ce chemin est celui du plan de paix et de sécurité pour tous que l’Arabie saoudite et la France ont soumis au vote de cette assemblée, qui l’a adopté à une très large majorité. Il porte notre ambition commune de briser l’engrenage de la violence et de changer la donne sur le terrain. Nous avons su faire un pas les uns vers les autres, sortir de nos postures habituelles et nous donner des objectifs concrets. Il nous appartient maintenant, ensemble, de déclencher une mécanique de paix répondant aux besoins de chacun.

Le premier temps de ce plan de paix et de sécurité pour tous, est celui de l’urgence absolue, celle de coupler la libération des 48 otages et la fin des opérations militaires sur tout le territoire de Gaza. Je salue les efforts du Qatar, de l’Égypte et des États-Unis pour y parvenir et demande à Israël de ne plus rien faire qui entrave leur aboutissement. Le Hamas a été vaincu sur le plan militaire par la neutralisation de ses chefs et de ses décideurs. Il doit l’être sur le plan politique pour être véritablement démantelé. Dès lors que le cessez-le-feu aura été agréé, c’est un effort massif que nous devrons produire collectivement pour porter secours à la population de Gaza. Je remercie l’Égypte et la Jordanie de leur engagement ici et rappelle à Israël l’obligation absolue qui est la sienne de faciliter l’accès humanitaire à Gaza pour aider une population aujourd’hui démunie de tout.

Le deuxième temps est celui de la stabilisation et de la reconstruction à Gaza. Une administration de transition intégrant l’Autorité palestinienne, la jeunesse palestinienne accompagnée de forces de sécurité dont nous accélérerons la formation, aura le monopole de la sécurité à Gaza. Elle mettra en œuvre le démantèlement et le désarmement du Hamas, avec le soutien des partenaires internationaux et les moyens qui seront nécessaires à cette mission difficile. La France est prête à contribuer à une mission internationale de stabilisation et à soutenir, avec ses partenaires européens, la formation et l’équipement des forces de sécurité palestiniennes. Dès lors que la négociation le permettra, le Conseil de sécurité pourra décider le déploiement d’une mission de soutien civil et sécuritaire, en liaison avec les autorités palestiniennes, avec le consentement des autorités israéliennes.

Il reviendra aussi à l’État de Palestine de rendre espoir à sa population éprouvée par des années de violence, d’occupation mais aussi de division et d’incurie. Il lui reviendra donc d’offrir à son peuple un cadre d’expression démocratique, renouvelé et sécurisé. Le président Mahmoud Abbas en a pris l’engagement auprès du prince Mohamed bin Salman et de moi-même. Il a condamné avec force les attaques terroristes du 7 octobre 2023. Il a affirmé son soutien au désarmement du Hamas et s’est engagé à l’exclure de la gouvernance à venir de Gaza comme de l’ensemble du territoire palestinien. Il a affirmé son engagement à lutter contre les discours de haine et a promis une rénovation en profondeur de la gouvernance palestinienne.

La France sera attentive à la pleine mise en œuvre de chacun des engagements pris auprès d’elle. Cette Autorité palestinienne renouvelée est une condition nécessaire à la réussite de l’indispensable négociation qu’il faudra reprendre pour parvenir à un accord sur chacune des questions relatives au statut final. C’est dans ce cadre, aussi, que je pourrai décider d’établir une ambassade auprès de l’État de Palestine, dès lors que tous les otages détenus à Gaza auront été libérés et qu’un cessez-le-feu aura été établi.

L’exigence de la France à l’égard d’Israël ne sera pas moins grande. Avec ses partenaires européens, elle indexera le niveau de sa coopération avec lui sur les dispositions qu’il prendra pour mettre fin à la guerre et négocier la paix.

C’est bien grâce à ce chemin que nous obtiendrons un État de Palestine souverain, indépendant et démilitarisé regroupant l’ensemble de ses territoires, reconnaissant Israël, et étant reconnu par Israël, dans une région qui connaîtra enfin la paix.

J’attends aussi de nos partenaires arabes et musulmans qui ne l’ont pas encore fait, qu’ils tiennent leur engagement de reconnaître l’État d’Israël et d’avoir avec lui des relations normales dès lors que l’État de Palestine aura été établi. Ainsi ferons-nous la démonstration d’une double reconnaissance au bénéfice de la paix et de la sécurité de tous au Proche-Orient.

Voici, Mesdames et Messieurs, quel est notre plan de paix. Il établit un engrenage exigeant pour sortir de la guerre et entrer dans une phase décisive de négociation. Il permet que la paix israélo-palestinienne soit le premier pilier d’une nouvelle architecture de paix et de sécurité au Proche et Moyen-Orient. Il crédibilise aussi la possibilité d’une plus grande intégration économique.

Rien ne sera possible sans que les autorités israéliennes s’approprient pleinement notre ambition renouvelée de parvenir enfin à la solution des deux États. Je sais leurs réticences et leurs craintes. J’entends avec beaucoup de respect le peuple israélien, sa tristesse et sa fatigue, et je veux croire que les autorités israéliennes l’entendront également et sauront s’engager à leur tour. Je sais que le peuple israélien et ses dirigeants peuvent en avoir la force.

Je me souviens du jeune homme que j’étais, apprenant l’assassinat terrible d’Yitzhak Rabin, il y a près de 30 ans, tué pour avoir voulu la paix. Au moment où la mort allait le ravir, le guerrier héroïque de l’État d’Israël venait de prononcer ces mots : « J’ai fait la guerre aussi longtemps qu’il n’y avait aucune chance de faire la paix ». Cette chance existe là aujourd’hui. 142 États proposent cette paix, main tendue prête à être serrée.

Alors, oui, le temps est venu d’arrêter la guerre à Gaza, les massacres, la mort, tout de suite. L’urgence nous le commande. Le temps est venu pour Israël de vivre en paix et en sécurité, de la Galilée à la mer Rouge, par la mer Morte, par le lac de Tibériade, et par Jérusalem. Le temps est venu de ne plus discuter nulle part l’existence d’un État d’Israël et d’en faire une évidence. Le temps est venu de rendre justice au peuple palestinien et ainsi de reconnaître un État de Palestine, frère et voisin, à Gaza et en Cisjordanie et par Jérusalem.

Le temps est venu de chasser de ces terres le visage hideux du terrorisme et de bâtir la paix. Oui, bâtir la paix, c’est ce qui nous rassemble ici. Et telle est l’espérance qui peut se construire. Alors que pour certains commence une année nouvelle, c’est un choix à faire et c’est notre devoir. La paix est beaucoup plus exigeante, beaucoup plus difficile que toutes les guerres.

Mais le temps est venu.