Un couple de français, la retraite venue, a décidé de la vivre pour des raisons économiques, en Tunisie; plus exactement à Hammamet découverte lors de précédentes vacances, et dont ils appréciaient le charme et la plage mais aussi les habitants.
Avec leur petite pension de retraite, ils ont pu vivre correctement en Tunisie où tout leur paraissait moins cher qu'en France. En effet ils n'en revenaient pas de pouvoir louer une jolie villa pas loin de la plage pour la modique somme de 200 euros !
Ils ont même pu engager une jeune femme et son mari pour leur servir, l'une de femme de ménage et de cuisinière et l'autre de gardien, de jardinier et même de chauffeur quand ils ont avancé en âge.
Les années passant, ils ont pris goût à leur nouveau mode de vie parmi les tunisiens qu'ils découvraient de mieux en mieux et appréciaient de plus en plus. Les deux étant retraités de l'éducation nationale, ils ont repris du service bénévolement pour aider les enfants de leurs nouveaux amis tunisiens dans leur cursus scolaire.
Ils se sont attachés à leurs amis tunisiens et à la Tunisie où il fait bon vivre comme ils disent, en reprenant le slogan des voyagistes et autre tour opérator.
Avec l'âge, leurs liens avec la France se sont un peu distendus et ils ne pouvaient plus revoir leurs enfants et leurs petits enfants, eux mêmes ne pouvant leur rendre visite pour cause économique.
Ils se sont fait à l'idée que leur famille désormais se sont leurs amis tunisiens qui les ont adoptés et aimés affectueusement pour leur sollicitude et leur désir sincère de pousser leurs enfants aussi loin qu'ils pouvaient dans leurs études. Ils sont fiers de la réussite de certains d'entre eux qu'ils ont aidés financièrement pour faire des études jusqu'à l'université.
Ce couple uni se coulait une douce retraite bien méritée et leur humanisme était salué par tous leurs amis tunisiens dont beaucoup avaient une réelle affection pour eux, les considérant comme membre de leur famille, partageant avec eux les bons comme les mauvais moments, n'oubliant jamais de les inviter aux différentes cérémonies familiales.
La vie va les séparer par la mort du mari. Sa veuve désemparée s'est retournée vers ses enfants pour l'aider à organiser le rapatriement du corps de leur père en France et lui assurer des funérailles pour le bon chrétien qu'il était.
Les enfants se sont excusés de ne pouvoir s'occuper de telles démarches ayant eux mêmes d'autres priorités. Leur mère effondrée devant l’égoïsme de ses enfant a tenté malgré son chagrin, d'entreprendre elles mêmes les démarches auprès de l'ambassade de France à Tunis. Devant tant de complications administratives et le coût de l'opération qu'elle ne pourrait plus assumer seule, ses indemnités de retraitée devenant faibles, elle s'en est ouverte à ses amis tunisiens de ses soucis.
Ils lui ont témoigné une solidarité qu'elle ne soupçonnait pas à ce point. Ils lui ont proposé d'enterrer son mari à la tunisienne selon le rite malékite de leurs ancêtres. L'un d'eux lui dit que son mari est devenu leur frère et que son comportement avec eux en fait un bon musulman car l'islam n'est pas que pratiques religieuse, c'est aussi une philosophie de vie qu'il pratiquait en en respectant l'esprit; et comme tel, il mérite bien des funérailles digne de lui !
Fatiguée par l'âge et le chagrin, la veuve les a laissés faire. Ils ont pris tout en main : les démarches administratives auprès de la municipalité jusqu'à l'organisation des funérailles elles mêmes.
Ils ont assuré à leur ami français une cérémonie religieuse musulmane avec toilette rituelle du corps et linceul blanc. Puis ils ont dit la prière des morts devant le corps et l'ont enterré dans le cimetière de Hammamet comme un dernier hommages à celui qui a choisi la Tunisie pour finir ses jours et qui les a tant aimés au point de se considérer tunisien, comme il aimait à leur rappeler. Ils ont entouré la veuve de beaucoup d'attentions, se relayant durant trois nuits pour ne pas la laisser seule comme le veut la tradition tunisienne. Et comme le veut la tradition, ils ont organisé la cérémonie du troisième jour, "el fark" (la séparation), censé être le jour de la séparation de l'âme du corps du défunt, en préparant un couscous en guise de repas d'adieu au défunt où tous ses amis tunisiens sont venus rendre un dernier hommage au disparu. De même qu'ils lui ont assuré la cérémonie de l' "ar'byi'nia", des quarante jours après le décès; tradition héritée des rites pharaoniques qui correspond au temps nécessaire pour la préparation du corps en vue de son embaumement et de sa momification en vue du voyage dans l'au-delà, mais ayant pris un autre sens en islam : montée au ciel de l'âme du défunt.
Un autre a proposé à la veuve de lui trouver un petit appartement dans le même quartier, puisqu'elle dit ne plus pouvoir subvenir avec sa petite retraite au train de vie qu'elle avait avec son mari. Ce qu'elle a accepté, convaincue désormais qu'il ne lui reste plus que sa famille de cœur, puisque sa famille biologique l'a abandonnée.
Rachid Barnat
LE VIVRE ENSEMBLE A LA TUNISIENNE ...
RépondreSupprimern'en déplaise aux islamistes de tous poils qui tentent de diviser les tunisiens !
http://www.webdo.tn/2016/02/27/jours-de-deuil-a-la-goulette/
Cyrille Boulay : Hammamet au cœur
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