vendredi 10 juin 2016

Le laxisme des politiques fait le lit de l'islamisme en France

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Dans un entretien accordé au Progrès, l’écrivain algérien revient sur les attentats de Paris et tente d’en analyser les conséquences pour la France.
Nicolas Ballet : Avez-vous été surpris par les attentats de Paris ?
Boualem Sansal : Tout laissait penser qu’un événement très grave allait se produire en France. Le jihadisme s’installe partout dans le monde. Tôt ou tard, il frappera ici ou là…

Nicolas Ballet : Quelles ont été les réactions en Algérie ?

Boualem Sansal : Les islamistes et les ultra-nationalistes ont applaudi, hélas ! On a même entendu des « youyou » dans les rues, pour dire « bravo ! » aux terroristes qui ont exécuté la fatwa contre « Charlie Hebdo ». Et puis il y a cette majorité silencieuse. Des personnes dont on ne sait pas trop ce qu’elles pensent. Certaines sont pour, d’autres sont contre ces attentats, d’autres encore, n’ont pas d’avis ou seraient prêtes à discuter. Le gouvernement algérien, comme à son habitude, est resté silencieux. On pourrait tuer 500 personnes sous les fenêtres du Président, il ne ferait pas un communiqué…

Nicolas Ballet : Et qu’avez-vous ressenti, au fond de vous ?

Boualem Sansal : De la colère, de la honte, de la révolte, de la rage… Quand on est si tolérant avec l’islamisme, il faut s’attendre à ce qu’il frappe.

Nicolas Ballet :  Qui donc est « trop tolérant » avec l’islamisme ?

Boualem Sansal Les pouvoirs publics français. On sait que des gens prêchent dans les banlieues, les mosquées, les prisons… J’ai l’impression d’un laxisme qui ouvre des brèches aux jihadistes. Je ne dis pas non plus que c’est simple : la France est une démocratie, et ses gouvernants « composent » avec 6 ou 7 millions de citoyens de confession musulmane.

Nicolas Ballet :  Pourquoi l’islamisme séduit-il autant une partie de la jeunesse ?

Boualem Sansal : Je ne crois pas aux explications de ceux qui mettent en avant la misère sociale, comme terreau premier du jihadisme. Il existe un projet politique dans le monde pour propager l’islamisme et porter le djihad d’abord en terre musulmane, puis ailleurs, en terre chrétienne notamment. C’est une bataille romantique et mystique pour Allah qui rappelle les croisades. S’ajoute à cela le travail des propagandistes, qui sont de vrais professionnels. Eux, jouent sur le chômage, en le présentant comme une injustice faite à l’égard de ceux qui sont musulmans. On leur martèle en substance : « Ils ont exploité vos parents ; maintenant, c’est votre tour ».

Nicolas Ballet :  Que pensez-vous de ceux qui s'insurgent du risque « d’amalgames » avec l’ensemble des musulmans, dans la dénonciation de l’islamisme ?

Boualem Sansal : Les islamistes cherchent à culpabiliser ceux qui s'en prennent à l’islamisme en leur disant : « Vous êtes racistes, c’est l’islam que vous voulez critiquer ». C’est une technique pour faire taire l’adversaire. Mais ceux qui gouvernent ont également une responsabilité dans cet état de fait. Le président de la République française est Président de tous les Français, y compris des jihadistes. Le discours sur la nécessité de ne pas faire d’amalgames vient en droite ligne du principe de précaution. Les Français sont invités à ne pas déraper, à ne pas tenir de propos qui pourraient dresser les communautés les unes contre les autres. Je pense qu’à force d’être prudent, on finit par ne rien faire. Et si l’on bride le débat, cela ne fera qu’aviver les tensions. Il faut donc libérer le débat. Sinon, l’extrême droite continuera de progresser, en s’emparant des critiques qui ne sont pas menées. Tout cela rappelle les années 1930 : on polissait les discours et les intellectuels détournaient les yeux, pendant que l’extrême droite se développait…
Nicolas Ballet :  Et doit-on aussi critiquer l’islam ?
Boualem Sansal : Absolument. Il faut tout mettre sur la table. Le Coran « légalise » des inégalités fondamentales : la femme est vue comme inférieure à l’homme. Offrir 70 vierges à un homme après sa mort, cela veut-il dire que le Paradis est sexiste ?

Nicolas Ballet :  Vous rappelez dans votre essai "Gouverner au nom d’Allah…" , la fameuse phrase d’Albert Camus : « Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde ». Certains reprochent parfois aux médias de parler de « terroristes islamistes » - ce qui « stigmatiserait » la population musulmane - plutôt que de « terroristes ». Quelle formule a votre préférence?

Boualem Sansal : Ces arguties sont terrifiantes. « Terroriste » tout seul, ça ne veut rien dire. Eux-mêmes revendiquent leur islamité - mais récusent le terme de «terroristes». Ils se considèrent comme d’authentiques musulmans. Il faut appeler un chat un chat, et donc, un «terroriste islamiste», un «terroriste islamiste». En même temps, quand il s’agit de débattre de ces sujets, gardons-nous de brusquer, de chercher à humilier et laissons nos «armes» aux vestiaires. C’est la moindre des choses !

Nicolas Ballet :  Les attentats de Paris posent une autre question : si l’Eglise a fait, avec le concile Vatican II, un gros examen de conscience sur son antisémitisme, il ne semble pas que ce soit le cas dans tout l’islam…

Boualem Sansal : Il y a eu des tentatives entre le XIXe siècle et le début du XXe siècle pour inventer un islam des Lumières. Aujourd’hui, des personnes comme Abdennour Bidar et Malek Chebel incarnent cette voie en France. Mais ce n’est plus le sujet. L’islam n’étant pas organisé, il est vain de parler de cela. L’enjeu, c’est de passer à la sécularisation de l’islam, autrement dit, de séparer l’Etat et la religion. Il existe une multiplicité de croyances et de non-croyances. Les musulmans doivent tous accepter la laïcité.

Nicolas Ballet :  Les grandes manifestations qui ont eu lieu en France après les attentats auront-elles pour effet d’enraciner la laïcité chez tous les musulmans ? Ou le fossé va-t-il se creuser encore davantage avec les islamistes ? 

Boualem Sansal : Les grandes marches ont servi d’exutoire au choc ressenti. Un travail de fond doit maintenant être mené sur la durée. Il passe par l’école, par les partis, par la presse, par les intellectuels et par les universités. Et ce travail doit amener les musulmans crispés, à accepter l’idée qu’ils ont le droit de pratiquer l’islam qu’ils veulent, mais chez eux. L’Etat est laïc. Ils doivent l’admettre en tant que citoyens français.

Nicolas Ballet :  Vous avez fait le choix de rester vivre en Algérie. Vous y sentez-vous en sécurité, alors que l’écrivain Kamel Daoud a été condamné à mort par la fatwa d’un imam salafiste en décembre pour en avoir appelé à ce travail de sécularisation de l’islam ?

Boualem Sansal : Il faut s’accrocher ! J’ai tout subi : les fatwas des islamistes, les attaques venant du gouvernement algérien…. Même le Hamas m’a condamné quand je suis allé à la Foire internationale du livre de Jérusalem en 2012. Mais après mon premier roman, « Le Serment des barbares », j’ai pris la décision de continuer à écrire et d’affronter la peur. Maintenant, je ne ressens plus ce sentiment. Je reste prudent et raisonnable mais je ne me laisse pas emporter par la peur qui est un prisme déformant. Les pouvoirs publics en France doivent d’ailleurs faire tomber la peur. Car un homme qui vit dans la crainte ne sait plus raisonner. Il peut devenir agressif et méchant…

Nicolas Ballet :  Vous disiez tout à l’heure que les gouvernements français ont fait preuve d’un « trop grand laxisme ». Mais alors, quelles mesures prendre ? Faut-il faire la guerre aux islamistes en France ?

Boualem Sansal : Surtout pas la guerre au sens militaire! C’est ce que les islamistes recherchent : créer l’irréparable pour empêcher le dialogue. Si une porte est ouverte au dialogue, celle de la radicalisation se fermera. En même temps, le gouvernement doit être ferme sur la défense des idéaux de la République, dont l’égalité entre les hommes et les femmes.

Nicolas Ballet :  Certains élus locaux peuvent être tentés de laisser s’installer des horaires séparés dans les piscines pour les hommes et les femmes…

Boualem Sansal : Pour avoir la tranquillité, certains élus peuvent avoir la tentation de laisser faire, ne serait-ce que pour ne pas être accusés d’islamophobie ou par crainte de ne pas « épouser » les discours de l’extrême droite. Mais si l’on agit dans la sincérité, au nom de l’idéal républicain, où est le problème ? La laïcité, si elle est négociable, meurt. On doit la faire vivre au-delà des déclarations de principe.

Nicolas Ballet :  Votre livre "Poste restante : Alger", paru en 2006, était sous-titré lettre de colère et d’espoir…

Boualem Sansal : Oui. Il est très important de garder espoir. Sinon, c’est reconnaître la victoire des islamistes. Il faut aussi rester très ferme. Tous ces débats, nous les avons eus en Algérie dans les années 1980. Nous connaissons bien le problème. Seulement, nous ne pouvions pas nous battre pour d’autres valeurs car nous étions gouvernés par une dictature, alors nous en étions réduits à tomber dans un discours religieux pour isoler des phrases positives du Coran : à cette époque, nous sommes devenus des imams malgré nous. La France ne doit pas tomber dans ce piège.
Nicolas Ballet :  Vous nous dites toujours : " Attention! Réveillez-vous !" ?
Boualem Sansal : Oui ! Et je le dis depuis des années. Vous êtes déjà des victimes en puissance. Si ce n’est des islamistes, c’est de vous-mêmes, car les islamistes risquent de vous pousser à vous radicaliser. Et la France sans ses valeurs, ce n’est plus la France.



2 commentaires:

  1. LA STRATÉGIE DU HARCÈLEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE PAR LES FRÈRES MUSULMANS SE POURSUIT :

    Après le combat pour le port du voile, pour celui des lieux de culte, pour celui des cantines ... voici le combat pour le burquini qui, à nouveau, divise les responsables politiques français !

    On vous l'avait bien dit : les "Frères" ne manquent pas d'idée pour remettre en cause les règles du vivre ensemble que la France doit à la laïcité !

    Ils s'engouffrent dans une brèche dans la laïcité, ouverte par les juifs orthodoxes, que les responsables politiques leur ont consentie.
    L'argument des islamistes pour l'obtention de nouvelles brèches, étant ce précédent !

    La différence étant : que les Loubavitch ne cherchent pas à convertir tous les français à leur croyance; contrairement aux islamistes qui exploitent les faiblesses des hommes politiques français pour installer en France le wahhabisme et son model sociétal importé d'Arabie qu'ils diffusent par petites touches dans la société française !!

    Le comble comme toujours, ils utilisent la femme comme fer de lance pour leur combat politique ... femme ils exècrent par ailleurs, parceque porteuse de tous les péchés !!!

    http://www.marianne.net/bouches-du-rhone-parc-aquatique-se-privatise-femmes-burkini-jilbeb-bain-100244780.html

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  2. L'ISLAMISME TERRORISE LES INTELLECTUELS AUSSI ...
    PUISQU'EN FRANCE, ILS S'AUTOCENSURENT !

    Hamed Abdel-Samad :

    « Jean-Marc a écrit qu'il ne voulait pas apporter de l'eau au moulin de l'extrême droite. Ça, c'est l'argument typique d'un chantage moral auquel je suis sans cesse confronté. Je suis un penseur libre, qui n'appelle pas à la violence, qui ne stigmatise pas les musulmans – au contraire, je les défends comme êtres humains –, mais qui s'en prend à une idéologie que j'estime violente.

    J'ai le droit, en Allemagne, plus de 200 ans après Kant et 230 ans après Voltaire, de publier ces pensées sans devoir avoir peur et être terrifié. C'est pour ça que je suis tellement en colère.

    Je trouve ça très dangereux comme façon de penser, notamment venant d'un éditeur qui, plus qu'aucune autre profession, devrait être le garant des débats de qualité et de la liberté d'expression. »

    http://www.lepoint.fr/europe/exclusif-pourquoi-le-fascisme-islamique-ne-paraitra-pas-a-la-rentree-03-08-2016-2058839_2626.php

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