vendredi 27 novembre 2015

Daech frappe au cœur de Tunis même !

Comment lutter efficacement contre le terrorisme alors que les hommes habilités à le faire ont été mis à l'écart ?
Il faut que les hommes des services de renseignement et de la sécurité de l'Etat, remerciés par la troïka, reprennent leur service.
Evidemment, il faut dégager ceux que la troïka avait nommés à leur place.
Et çà ce n'est pas difficile : les nom doivent être parfaitement connus que ce soit de ceux mis à la "retraite" anticipée ou de ceux qu'Ennahdha a placé pour infiltrer les rouages de l'Etat pour le miner de l’intérieur. C'était même une des promesses électorales de BCE & Nidaa Tounes.
R.B
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est chercheur au Centre des hautes études internationales de Genève. Il est spécialiste de la Tunisie et de la Libye. Il revient sur l’attentat qui a frappé mardi un bus des forces de sécurité à Tunis, faisant 13 morts.

Un attentat comme celui-là, vise à casser les reins de l'Etat tunisien !

Que dit cet attentat de mardi contre les forces de sécurité et à ce jour revendiqué par l’Etat islamique ?

J’y vois une ressemblance frappante avec l’Algérie. Au temps de la guerre civile en Algérie, les bras armés du FIS, des groupes tels que l’Armée islamique du salut (AIS) et Mouvement islamique armé (MIA), attaquaient les symboles de l’Etat. Alors que le GIA attaquait, lui, les civils. Et c’est là que les massacres ont commencé avec toute l’horreur perpétrée sous silence durant ces années 1990-2000. On sait qu’il y a dans ces groupes «takfiristes-jihadistes» aussi une école de pensée qui est opposée à l’idée d’attaquer les civils, mais quand il «faut» toucher des civils, il «faut» des civils qui ne sont pas musulmans. Reste que pour ces groupes takfiristes, la cible principale demeure les symboles de l’Etat et notamment les forces de sécurité. L’EI joue à ce propos aussi un double jeu : manipuler une partie de la population pour gagner son soutien, souvent par des arrangements liés à de possibles affaires commerciales, de business par exemple, et semer la terreur comme mardi dernier.

Cette attaque vous a-t-elle surpris ?
C’est l’audace qui est effectivement vraiment surprenante. Attaquer la garde présidentielle, à 17h30, en plein centre de Tunis, juste à côté du ministère de l’Intérieur, au milieu du trafic, à côté de l’avenue Bourguiba avec ses restaurants, ses cinémas, ses boutiques, marque un tournant et c’est un message limpide : on frappe où on veut. Jusqu’à maintenant, les attaques observées contre les forces sécuritaires concernaient les frontières, le Mont Chaâmbi, voire l’intérieur du pays. Le message dit aussi, et si c’est bien Daech qui est derrière cette revendication, l’Etat tunisien est un Etat faible, friable. En fait, c’est aujourd’hui la possibilité d’une telle attaque qui me semble aberrante. Cette attaque si audacieuse est un signe qui n’est pas adressé en fait à l’Etat honni mais à la population : nous sommes la force et nous sommes l’axe de la terreur et d’influence qui va du golfe de Syrte en Libye en passant par la Tunisie pour aller frapper bientôt l’Algérie. Cette attaque a pour but aussi de renforcer la capacité de recrutement de Daech.

Pourquoi l’Algérie serait-elle menacée ?
Pour les takfiristes nord-africains, la terre promise, c’est l’Algérie. Ces groupes rejettent l’ordre post-colonial et sont habités par la conquête. Le but c’est l’unité de l’Afrique du Nord sous un seul califat. Ce n’est pas nouveau : c’était le but déclaré des mouvements islamistes armés dans les années 80 car si vous tenez l’Algérie, vous tenez le Maghreb. Leur base est en Libye. La Tunisie, défaite, affaiblie, serait alors un simple «couloir» de transport d’armes, de moyens, de combattants. Un attentat comme celui de mardi a pour objectif de casser les reins de l’Etat tunisien et de renforcer l’image de marque de Daech en Tunisie dans ce «couloir» Libye-Tunisie-Algérie.

La lutte antiterroriste en Tunisie serait, pour vous, inopérante….
On voit que la lutte antiterroriste de l’Etat tunisien n’a pas, et pour le moins, bien fonctionné. Ce n’est pas un manque de professionnalisme de ces unités d’élite qui ont déjà déjoué beaucoup de tentatives mais un manque de vigilance des forces police sur le terrain au jour le jour.
L’appareillage antiterroriste existe en Tunisie mais c’est l’immense négligence dans la police qui gâte cette lutte. Les pays occidentaux mettent en avant une assistance accrue mais c’est une réforme du système sécuritaire tunisien qu’il faudrait entreprendre. Ces négligences, on les voit à l’aéroport, partout, au quotidien. Toutes ces lacunes, la population les voit, les vit. La priorité serait de reprendre les fondamentaux du travail de police avec le respect des procédures claires. Or, cinq ans après la révolution, la Tunisie, pourtant plusieurs fois touchée, n’a toujours pas appliqué les normes internationales de sécurité. Si ce fameux travail de police du quotidien n’est pas fait vous pouvez déverser tous les moyens du monde pour renforcer le contre-terrorisme, y compris faire appel à nouveau l’Etat d’urgence, cette lutte restera vaine.


Propos recueillis par Jean-Louis Le Touzet

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