mercredi 8 juillet 2015

Le refus de la diversité, est l’obstacle

Juifs et musulmans sont cousins ! Rien dans leur religion ne justifie leur haine les uns pour les autres, nous rappelle le coraniste, Mohamed Talbi.
R.B
Le Christianisme, refusant la diversité, si ce n’est comme un état de fait calamiteux et transitoire, il n’y a pas de solution qui ne soit autre chose qu’un équilibre de force qui peut être à tout moment rompu, dès que le partenaire donne des signes de faiblesse. C’est-ce qui nous était arrivé et nous ne sommes pas encore au bout du tunnel. Nous respectons l’autre, mais pour être nous-même respectés, il nous faut nous faire respecter par l’autre, par tous les moyens, sans agression ni complexe. Le respect n’est pas un cadeau que l’ont fait sur un plateau d’argent. L’équilibre des forces, pour qu’un système soit cohérent, est une loi universelle. La dissuasion, par la force de la pensée et en cas de nécessité par celle des armes, pour faire barrage aux agressions, peut seule en être le garant. C’est ce qui nous a poussé à nous engager dans l’effort collectif de rénovation de la pensée musulmane. Les armes, ce n’est pas notre affaire, et c’est un autre sujet qui ne peut être abordé ici. A ce propos il y a beaucoup à dire sur les despotes qui nous gouvernent et qui sont les meilleurs alliés de nos agresseurs.

Avec nos frères juifs, la situation est totalement différente. Comme l’Islam, le Judaïsme n’est pas une religion missionnaire, envahissante et conquérante des âmes urbi et orbi. Avec les Juifs nos ennuis sont d’une nature entièrement différente. A ma connaissance, les Juifs ne sont pas en communion totale de pensée avec le Pape. Ils ne partagent pas toutes ses convictions sur notre Prophète. Certes ils n’admettent pas Muhammad comme Prophète, pas plus que Jésus d’ailleurs, ni Prophète, ni encore moins Dieu dont ils sont rendus coupables de son assassinat. Pour les Juifs, Muhammad n’est pas Prophète, pas pour eux en tout cas. Pour eux c’est une affaire de Gentils. Elle ne les concerne pas. Ils ne tiennent pas sur lui les mêmes propos que Benoît XVI. Ni André Chouraqui [1], d’origine algérienne et qui fut mon ami, ni Jacques Attali ne pensent comme lui.

Comme l’Islam, le Judaïsme n’est pas une religion hégémonique et totalitaire. Comme l’Islam, le Judaïsme n’est pas une religion apostolique, conquérante et missionnaire. Conformément aux prescriptions mêmes de la Torah (Dt., 32 : 8), le Judaïsme est fondé sur la différence et la diversité. Yhwh est le Dieu privé des Juifs. Les Gentils ont leurs dieux propres. Nous sommes les Gentils, et notre Prophète est justement «Le Prophète des Gentils» (Al-Nabî al-Ummî) envoyé à tous les hommes et à toutes les nations, pour avertir et annoncer sans contraindre. Les Juifs ont leur lecture de la Bible, parfaitement respectable, et comme la Bible est aussi notre Livre, nous en avons notre lecture. Cela peut se concevoir, sans donner lieu à des conflits. Nos différents avec les Juifs sont de nature uniquement et exclusivement politique, donc susceptibles d’être un jour politiquement résolus. Il n’y a pas de conflits politiques qui durent éternellement. Disons le, plus vite ils sont résolus, et mieux c’est.

Pour nous, en effet, le Coran s’inscrit dans une continuité parachevante, rectifiante, authentifiante et prédominante sur la Bible, qui est aussi notre Ecriture, déformée à travers les âges par une multitude de scribes entassant les doublons, les versions superposées et souvent contradictoires. L’Islam est «Millat Ibrâhîm» (la Tradition d’Ibrâhîm, Coran, 2 : 130, 135 ; 3 : 95 ; 4 : 125 ; 6 : 161 ; 12 : 38 ; 16 : 123 ; 22 : 78). Il n’est pas une religion nouvelle. «La religion [de toujours] auprès d’Allâh, est al-Islâm» (3 : 19). «Al-Islâm», en arabe, est la «Soumission» volontaire, par un acte de foi libre et rationnel, au Dieu Unique, Un et universel. En ce sens, il est la religion originelle et universelle de la nature humaine, dès que l’homme est devenu théotrope en émergeant du «fleuve du vivant», comme dit Konrad Lorenz. Ibrâhîm, taraudé par le doute, fut conduit par Allah à cette religion en méditant sur les Signes. Nous faisons comme lui, et nous suivons sa voie. Allah dans le Coran ne cesse de nous demander de lire les Signes (Âyât, 382 occurrences dans le Coran), pour trouver, comme Ibrâhîm, le chemin qui mène vers Allah, et la religion originelle, universelle et rationnelle. Ibrâhîm du Coran est très différent d’Abraham de la Bible, devenu le père d’une coterie, engagé dans des comptes d’apothicaire avec son Dieu privé, Yhwh. Le Coran lui restitue ses vrais traits.

Mais personne n’est obligé de s’engager sur les pas d’Ibrâhîm du Coran. Nous n’avons pas pour mission de coraniser le monde. Notre mission est de l’humaniser[2]. Le Coran, dans plusieurs versets d’une parfaite clarté, admet la diversité, voulue par Allah et faisant partie de Son Plan sur le monde. Nous ne forçons personne d’entrer dans sa maison pour qu’elle «soit remplie» (Lc., 14 : 23). La diversité est le corollaire obligé de la liberté religieuse, à laquelle l’Islam est fermement attaché sur commandement ferme et sans ambages du Coran.

Ce chapitre je l’ai écrit par anticipation, pour le jour où il sera possible d’établir avec nos frères juifs et chrétiens, qui ont leur place dans le Coran, des relations basées sur la transparence sans concession ; sur le droit à la différence sans arrière-pensée ; sur la diversité dans le respect mutuel ; et sur le droit au respect, au besoin par le recours à la dissuasion, chaque fois qu’il y a ingérence extérieure et manquement au respect. Le respect n’est pas une générosité, un cadeau que l’on fait. Il s’impose de droit, et au besoin on l’impose par tous les moyens intellectuels, et s’il le faut matériels de droit. Nous parions sur un avenir sans dominateurs ni dominés. L’Islam n’est plus complexé. Aujourd’hui il n’y a plus de place pour «l’abominable Mahomet.» S’il faut rendre coup pour coup, nous le ferons. Si on cherche la confrontation, on l’aura. Mais nous cherchons plutôt à construire.

Moïse le Prophète est le nôtre. Toute parole de vérité qu’il dit dans la Torah, est la nôtre. Jésus le Prophète est le nôtre. Toute parole de sagesse qu’il dit dans les Evangiles, est la nôtre. Le Christ Dieu Fils de Dieu et Fils de la Mère de Dieu n’est pas le nôtre. Il est une fabrication de Paul, et il se superpose dans les Evangiles falsifiés sur Jésus le Prophète dont il faut soigneusement le distinguer, ce qui est faisable en suivant les lignes de fissures dans le collage maladroit des deux Jésus homonymes, l’un Prophète, et l’autre un juif nationaliste autoproclamé Roi des Juifs, et crucifié pour ce motif inscrit sur l’écriteau placé au dessus de sa tête par le Procurateur romain. 

Nous ne faisons aucune distinction entre les Messagers d’Allah (Coran, 2 : 285), qui tous prêchent la même religion : l’Amour du Créateur, et la soumission confiante, sereine et pleine d’espérance en Sa Mansuétude Infinie. Nous avons notre lecture de la Bible, criblante et rectifiante. Après criblage, toute vérité que nous y découvrons est Parole d’Allah. Elle nous oblige autant que le Coran. Tous les hommes sont nos frères en humanité, dans le respect exigeant mutuel. Allah nous dit :
«Il se peut qu’Allah mette, entre vous, et ceux qui comptaient parmi vos ennemis, de l’affection (mawadda). En effet, Allah est Tout Puissant ! Et Allah est Pardon et Matricielle Miséricorde ! Allah ne vous interdit pas, envers ceux qui ne vous ont pas combattus en religion et ne vous ont pas expulsés de vos demeures, d’avoir pour eux pieuse affection (tabarrûhum) et d’être équitables envers eux. Allah aime les gens équitables. Allah vous interdit seulement, envers ceux qui vous ont combattus en religion et vous ont expulsés de vos demeures, et ont prêté main forte pour votre expulsion, de les prendre pour alliés amis (tawallawhum). Ceux qui les prennent pour alliés amis, ceux-là sont les offenseurs (al-zhâlimûn)» (Coran, 60 : 7-9).

En Islam, l’inimitié n’est pas faite pour durer. L’Islam n’est pas une religion de haine et de violence. Il est une religion de paix et de fraternité dans la différence et la diversité voulue par Allah et faisant partie de son Plan sur l‘homme. Nous n’avons pas la mission, comme c’est le cas pour le Christianisme, de forcer tous les hommes à entrer dans l’Islam. Nous acceptons la différence et la diversité sans arrière-pensée. Allah dit en effet à Son Messager chargé cependant de transmettre Son Ultime Message à la totalité des hommes (7 : 158 ; 34 : 28) : «Remémore (Dhakkir), tu n’es qu’un Remémorateur (Mudhakkir). Sur eux, tu n’a aucune autorité» (88 : 21-22). Muhammad ne fait que remémorer aux hommes les Messages antérieurs, dont la Torah et l’Evangile, qu’il mène à leur terme final. Il apporte le Dernier Message pour tous hommes, porteur de la religion originelle et universelle. Il n’est qu’un Eveilleur de conscience, et laisse chaque homme libre devant sa conscience. Il n’a pas pour mission de forcer les consciences. Allah lui intime l’ordre de faire parvenir Son ultime Message à tous les hommes, et de respecter la liberté de choix, les différences et la diversité. Allah seul juge le Jour du Jugement.

Sur terre, il faut vivre avec tous les hommes et respecter leurs choix. Il faut savoir pardonner et surmonter, et suivre l’exemple d’Allah qui «est Pardon et Matricielle Miséricorde.» Allah nous recommande d’aimer tous les hommes, et d’avoir pour eux la «pieuse affection» qui dépasse les clivages confessionnels. Un hadith dit : «Tous les hommes sont la famille d’Allah.» Et Allah dit : «Soyez indulgents et tournez la page. N’aimez-vous pas qu’Allah vous pardonne ? Et Allah est Pardon et Matricielle Miséricorde !» (Coran, 24 : 22). 
Le verbe Aimer et le substantif Amour interviennent dans le Coran 79 fois. L’Amour est absent des Evangiles. Il n’y ait question que dans la première Epître d’un certain vieillard appelé Jean, et encore entre groupes de jeunes chrétiens désorientés et persécutés, auxquels il conseillait paternellement de serrer les rangs, et de s’aimer entre eux dans le Christ (1Jn, 3 : 16, 23 ; 4 : 7, 10, 16, 19, 21 ; 5 : 3). 

La famille déchirée, physique et spirituelle d’Ibrâhîm. 
Les Juifs se considèrent comme la famille d’Abraham par la chair, les enfants d’Isaac par Sara, et de Jacob. Pour eux la prophétie a trouvé son terme final et insurpassable dans Moïse. Les nombreux Prophètes qui avaient suivi, et auxquels Yhwh avait parlé, n’étaient venus que pour guider les Juifs sur la voie ouverte par Moïse, ou les rappeler à l’ordre. Les Juifs attendent désormais le Messie qui n’est pas encore là pour eux. Pour le Christianisme, qui n’est qu’une hérésie juive, le Messie est déjà là. Il est le Christ, dans lequel la Révélation, d’abord par prophètes interposés, a atteint enfin son point culminant et insurpassable dans le Fils de Dieu. Les Juifs, peuple déicide qui n’avait pas reconnu en lui le Messie, sont déchus désormais de leur Alliance et de la paternité d’Abraham. Les Chrétiens sont dès lors les vrais enfants d’Abraham par l’esprit, le vrai (Verus) Israël et les dépositaires de la nouvelle Alliance. Dans un cas comme dans l’autre, Muhammad n’a pas de place. Il est un imposteur, et pour les Chrétiens l’anti et l’antéchrist. Or, le Prophète est pour nous le fils d’Ibrâhîm par la chair, descendant d’Ismaël, fils d‘Ibrâhîm par Agar, et tous les musulmans sont sa famille par l’esprit en suivant sa voie. La famille physique et spirituelle Ibrâhîm est ainsi très déchirée. 

Peu importe les parts de fiction dans toutes les généalogies, comme le fait ressortir Ibn Khaldûn. La fiction dans ces cas joue le même rôle que le réel. Le fait est que nous revendiquons, Juifs et Musulmans, l’héritage d’un même grand-père, Ibrâhîm[3], père d’Isaac et d’Ismaël, mythe pour certains, et réalité pour nous. Mon premier vœu est donc de réconcilier, au-delà des discordes, les Fils d’Isaac et les Fils d’Ismaël, parce que cela est à la fois possible et nécessaire. Il en va autrement avec le Christianisme, en raison de son caractère apostolique, et par là hégémonique. Dans toute collaboration avec le Christianisme, pour lequel Mahomet n’apporte rien de bon, il y a toujours l’arrière-pensée de phagocyter par conversion. Juifs et musulmans, dans le respect des différences et des diversités, peuvent transmettre ensemble et d’une même voix, les valeurs universelles de l’humanisme transmises par Ibrâhîm, que l’on trouve également dans la Torah épurée, relue et corrigée, et dans le Coran lu dans ses intentionnalités, au lieu de s’entredéchirer pour quelques arpents d’une terre aride, c’est-à-dire finalement pour rien. Un jour il faut que cela prenne fin. Aucune guerre n’a jamais duré éternellement 
Entre des cousins, il y a des histoires. Mais il ne faut pas s’y installer et s’y complaire. Il faut réparer et reconstruire la famille. Ce n’est pas facile, mais ce n’est pas impossible. Tous ceux qui sont clairvoyants, et conscients de l’enjeu, au-delà des victimisations et des injustices, doivent s’y employer. Il ne s’agit pas d’oublier, ni pour les uns ni pour les autres. Il s’agit de surmonter ensemble par une volonté concertée et lucide.

Par contre il n’y a pas de réconciliation possible avec le Christianisme papal et clérical tant qu’il maintiendra, en conformité avec le Concile de 686, que Muhammad, un fils d’Ibrâhîm, «n’a apporté au monde que des choses mauvaises et inhumaines.» Le Christianisme est une religion apostolique, pastorale et missionnaire. Lorsque le but est de faire de toutes les nations des disciples du Christ, il n’y a pas de place à la différence et à l’autre. Tant que les Chrétiens ne renonceront pas au racolage et au harcèlement religieux, Amour et Agapè ou pas, le seul dialogue avec eux est celui de la confrontation et de la vigilance. Je ne parle pas des laïcs. Je parle de l’Eglise du Christ sous toutes ses formes. Celle-ci a pour but déclaré de débarrasser le monde «des choses mauvaises et inhumaines» dont «l’abominable Mahomet», suppôt de Satan, l’a inondé et immondé. Que pouvons-nous en attendre ? La mission des loups apôtres est toute tracée et ils ne peuvent en dévier sans trahir leur Christ.

Il en va autrement avec le Judaïsme. Comme l’Islam, le Judaïsme n’est pas une religion apostolique. Nous pouvons parfaitement coexister et vivre ensemble sans arrière-pensée phagocytaire dans un monde divers et pluriel. Ceci est capital. Ce qu’il nous faut, c’est laver notre linge sale en famille, et rétablir la confiance et l’estime, qui n’avaient pas manqué dans notre longue histoire commune. L’estime mutuelle est essentielle pour la réconciliation. Sans estime réciproque, tout est vain. Or, l’échange des accusations, d’un côté et de l’autre, ne favorise pas l’estime. Si l’on veut faire de l’histoire une école de haine perpétuelle, rien de plus facile : la haine génère la haine à l’infini, et personne ne manque d’arguments et de raisons pour haïr l‘autre. C’est un choix à faire !
Les discordes, surtout à l’époque récente, n’ont pas manqué. Mais pourquoi des cousins ne peuvent-ils pas se réconcilier, et construire ensemble, au lieu de se détruire en commun, en dépit de tout bon sens, et de tout intérêt bien compris ? C’est la question que je ne cesse de me poser. Y a-t-il de l’irréparable entre nous ? Catégoriquement non ! Qu’on y réfléchisse ! 

Les enfants d’Isaac, ne sont pas pour nous - les enfants d’Ismaël - une «race de vipères» (Mt., 3 : 7 ; 12 : 34 ; 23 : 33 ; Lc., 3 : 7). Comment peuvent-ils l’être ? Nous le serons aussi. Ils ne sont pas non plus un Peuple déicide. Comment peuvent-ils l’être ? Nous ne croyons pas à la fable mythologique d’un Fils de Dieu, tué ignoblement par Dieu son Père sur la croix, et dont les Fils d’Isaac seraient les bourreaux tueurs pour l’éternité, ou plutôt les exécutants de la sentence de son ignoble Père, qui vous charge ensuite cyniquement du crime, qu’il a lui-même décidé et perpétré, pour faire de son agneau de Fils, le jour de la fête de la Pâque, un mythique Rédempteur de l’humanité d’un mythique péché originel. Le tout par un Amour exorbitant qui commence par un meurtre de droit commun, qui relève de la justice des hommes, si la police avait pu mettre la main sur le coupable, qui ne peut être extradé du Royaume du Ciel ! Comme on n’a pu extrader le Père, pour le juger, on a fait de vous le coupable tout désigné. L’absurdité est évidente. Ne peut-on pas aimer autrement et moins cyniquement ? Je me le demande. Nous ne croyons pas que vous êtes, par cet acte aussi horrible qu’imaginaire que l’on vous attribue, déchus de votre Alliance. Vous êtes toujours les B’nai B’rith et le Verus Israël. Sur le fond, nous sommes donc unis. En commun nous ne croyons pas à la cruci-ficion. 

Nous, les Enfants d’Ismaël, nous ne sommes pas pour vous, le Verus Israël et Fils d’Isaac, «l’Axe du Mal», même si Ismaël est exclu de l’Alliance, mais dont le nom signifie quand même en hébreu «Dieu écoute», et qui s’était réconcilié avec son frère sur la tombe du Père commun (Gn, 25 : 9), présageant la réconciliation des enfants de l’un et de l’autre. Vous n’en avez jamais fait de notre Prophète le pourvoyeur du monde en «choses mauvaises et inhumaines», et vous ne l’avez pas caricaturé à la manière danoise approuvée par l’Occident chrétien unanime. Quelles que soient nos discordes vous ne pouvez pas aller jusque là. Le Prophète des Nations reste pour vous pour le moins fréquentable, voire à la rigueur authentique et acceptable. Certains rabbins, dont René-Samuel Sirat[4], font ce pas. Il n’est pas pour vous, comme pour sa Sainteté Benoît XVI, le Mahomet «qui n’a apporté au monde que des choses mauvaises et inhumaines.» 
Au contraire, l’un des vôtres, Jacques Attali, écrit même :
«L’islam est d’une certaine façon la religion parfaite, dans la mesure où c’est une religion sans histoire, transcendante et universelle, dans l’abstraction totale, avec un Dieu dénué du moindre anthropomorphisme. Une abstraction du judaïsme et du christianisme de l’époque. Les rabbins ont tout de suite accepté l’islam comme un monothéisme, «le plus pur» même, disait Maimonide[5].» 

Généralement on ne parle pas «d’abstraction» mais de «réduction.» La substitution d’un terme à l’autre est significative, et le jugement est dans son ensemble positif. Pour nous cependant, il faut le préciser, le Coran n’est ni une «abstraction» ni, encore moins, une «réduction», car il serait alors une redondance supplétive et inutile. Il est redressement, continuation et prédominance sur les Ecritures précédentes qu’il authentifie et clôture (Coran, 5 : 48). Mais il va de soi que ce positionnement ne vaut que pour nous, c’est-à-dire pour ceux qui croient que le Coran est l’ultime Parole divine adressée erga omnes, à tous les hommes (Coran, 7 : 158 ; 34 : 28), et personne n’est contraint d’y croire. 
L’islam est liberté, et respect pour toutes les croyances et toutes les idéologies.

رئيس الجمعيّة
محمّد الطالبي

[1] Je renvoie particulièrement à son ouvrage Les Dix Commandements Aujourd’hui, Paris, 2000, Robert Laffont
[2] Nous renvoyons à notre ouvrage, Gaza, Barbarie biblique ou de l’extermination sacrée ; et Humanisme coranique ; Textes comparés à l’appui, Tunis, 2009.
[3] Nous renvoyons à Abraham Ségal, Abraham Enquête sur un patriarche, Paris, 1995, Plon. 
[4]Dans Regards juifs sur l’Islam, dans Juifs et musulmans en Tunisie, Actes du colloque international de Paris, Sorbonne (22-25 mars 1999), Somogy, p. 45-54.

[5] Dans Le Monde des Religions, Paris, n° 22, Mars-Avril 2007, p. 78.

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