Salem Benammar
Pourquoi veut-on faire de nous des arabes que nous ne sommes pas ?
Pourquoi cette obstination pathétique et pathologique à vouloir
arabiser sans arrêt l’Afrique du Nord ? Pourquoi les gouvernements tunisiens,
algériens et marocains font de l’arabisation la clé de voûte de leur politique
pour leur pays ?
Pourquoi cherche-t-on à faire de nous des arabes si nous ne le
sommes pas ? Si nous l’étions pourquoi veut-on faire de nous plus arabes que les arabes d'Arabie ? Est-ce que ce n’est pas la preuve que le peuple nord-africain
n’est pas tout-à-fait arabisé au goût de ses dirigeants ?
Etre arabes que
va-t-il changer dans nos vies ? Est-ce que c’est une identité riche, féconde,
et libératrice des énergies, capable de nous propulser au rang des
peuples-phare de l’humanité ? Est-elle facteur de liberté, d’égalité, de
justice, de respect de la vie, de fraternité humaine, de non-violence, de
libération de la femme, de la protection de la petite enfance, de dignité
humaine, de démocratie et de bien-être ?
Que veut-on dire au fond par arabisme,
arabisation ? Que dissimule-t-on derrière ces deux notions ? Plus de langue
arabe arabe et donc plus d’islam dans les écoles quand on sait que les deux se
confondent. L’arabisme est aussi le façonnage des sociétés islamisées sur le
modèle saoudien.
Mais au fond savons-nous vraiment qui nous sommes aussi ? Tous ou
presque se disent arabes, faisant ainsi de leur ignorance et leur complexe
vis-à-vis l’un des peuples les plus incultes, oisifs, paresseux, fatalistes,
défaitistes, consuméristes, parasites, indolents et insipides leurs liens de
rattachement !
Il n’y a pas de honte de s’inspirer de l’exemple des peuples
acteurs de l’histoire, qui l’ont enrichie par leurs apports réels et
avérés, présents aux grands rendez-vous du progrès humain, et qui œuvrent pour
le bien commun de l’humanité.
Le plus grave affront que les maghrébins s’infligent à eux-mêmes
et à leurs vrais aïeux est de se croire plus arabes que les arabes eux-mêmes.
Que savent-ils réellement de ceux qu'ils idéalisent tant et qu’ils
vénèrent comme si c’étaient des dieux vivants ? Savent-ils qu'ils avaient provoqué chez eux le pire
cataclysme culturel, écologique, humain que leur contrée nord-africaine ait
jamais connu; suite aux invasions hilaliennes ? Ils ont été le cauchemar de leurs ancêtres et ils en font
aujourd’hui l’objet de leur rêve.
Ils les dominent en leur imposant une langue et une religion. Comme le fait remarquer
judicieusement Winston Churchill au sujet de cette
idéologie fataliste, liberticide, qui mine
l’esprit de liberté et de créativité. Tout simplement néfaste à l’humanité.
« Il y a cette craintive apathie fataliste. Les effets sont
évidents dans beaucoup de pays quand on regarde l’agriculture négligée, les
méthodes surannées du
commerce ou l’insécurité de la propriété qui existent là où les ouailles du
prophète règnent ou vivent. »
Ont-ils au moins lu
un jour Ibn Khaldoun,
ce dont il est à douter avec leur allergie maladive à la lecture à laquelle ils
consacrent en moyenne 4 minutes par an d’une part et d’autre part à la censure
de sa pensée comme celle des penseurs dits musulmans rationalistes ? Ibn Khaldoun devrait
leur servir de catalyseur pour rompre avec l’arabité,
mais ils préfèrent s’arc-bouter à une
branche des plus pourries de l’arbre du savoir universel; glorifiant et
encensant ce qui ne doit pas l’être, méprisant, stigmatisant, haïssant,
maudissant ce qui est sa sève identitaire, en l’occurrence leurs racines amazighens et plurielles qui se
perdent dans les temps immémoriaux.
En idéalisant les arabes, ils font preuve de déni de soi et du
complexe de l’esclave pour son maître.
Leur modèle est Mahomet, ils vénèrent ses compagnons auxquels ils
veulent s’identifier, salaf, vouant un véritable culte à Omar Al Khatab,
le Calife qui a donné l’ordre d’incendier la bibliothèque d’Alexandrie et les
livres persans.
Sourds aux mises en garde d’Ibn Khaldoun sur la haute
nocivité de cette culture bédouine et barbare, propagée par des pillards
dévastateurs et marchands d’esclaves, pédophilies, violeurs, destructeurs,
vandalisant et brûlant tout sur leur passage rendant la terre impropre à la vie,
pour en faire un paysage lunaire :
« Tout pays conquis par les Arabes est bientôt ruiné. […]
Sous leur domination la ruine envahit tout. […]; l’ordre établi se dérange et
la civilisation recule. Ajoutons que les Arabes négligent tous les soins du
gouvernement; ils ne cherchent pas à empêcher les crimes; ils ne veillent pas à
la sûreté publique; leur unique souci c’est de tirer de leurs sujets de
l’argent, soit par la violence, soit par des avanies. Pourvu qu’ils parviennent
à ce but, nul autre souci ne les occupe. Régulariser l’administration de l’Etat, pourvoir
au bien-être du peuple…, et contenir les malfaiteurs sont des occupations
auxquelles ils ne pensent même pas […]; aussi les sujets … restent à peu près
sans gouvernement, et un tel état de choses détruit également la population
d’un pays et sa prospérité. »
Atteints de cécité mentale et d’incurie intellectuelle, les
nord-africains drapent les arabes dans leur vertu.
Depuis Kateb Yacine plus personne ou presque n’ose interpeller cette identité
importée et mettre à nu ses vraies composantes. On se contente de renvoyer à
cette identité, à l’inscrire en lettres d’or dans les constitutions sans jamais
définir ses caractéristiques majeures et en quoi est-elle indispensable à
l’essor et au réveil de ce peuple plongé dans un profond coma inextricable.
Ibn Khaldoun nous rappelle : « Les Arabes sont une nation sauvage (umma wahshiyya), à la sauvagerie invétérée. La sauvagerie est
devenue leur caractère et leur nature. Ils s’y complaisent, parce qu’elle
signifie qu’ils sont affranchis de toute autorité et de toute soumission au
pouvoir. Mais cette attitude naturelle est incompatible (munafiya) et en contradiction (munâqida) avec la civilisation (‘ùmrân). …De plus, c’est leur nature de piller autrui. Ils trouvent leur
pain quotidien au bout de leurs lances (rizqu-hum fi zilâl rimâ-i-him). Rien ne les arrête pour prendre le bien
d’autrui…
Ils n’ont d’intérêt et d’attention pour un peuple qui aurait pu être ravalé au
rang de rebut de l’humanité, sans l’islam. »
Plutôt que renouer avec leurs vraies origines qui sont leurs véritables racines; plutôt que de s’enorgueillir de Saint-Augustin, de
Koceila, de Diya, d’Hannibal et d’autres figures illustres qui ont marqué
l’histoire de leurs empreintes dont le christianisme, ils veulent s'identifier à leur colonisateur arabe, oubliant tous les autres "colonisateurs" et l'héritage qu'ils en ont reçu.
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