Macron a réussi son coup : après la gauche, c'est au tour de la droite "traditionnelle" d'entamer son déclin. Voilà ce qui arrive quand on court après le populisme. Quant à la gauche, ces élections ont confirmé sa mort clinique. Et dire que Melenchon se voulait l'opposant en titre à Macron : Lui comme Ruffin peuvent aller se rhabiller, leur cirque n'amuse plus grand monde ! Leur haine pour Macron, ne fait pas un programme politique ...
R.B
Bien que je n’ignorasse point que cela revenait à éternuer dans une clarinette,
j’avais pointé, ici même, l’ambivalence d’une jaune effervescence dont les
grands profiteurs seraient, inévitablement, le lepénisme et le
macronisme.
On y est. Bravo les blaireaux : pour un succès c’est un succès. Que dis-je, un
triomphe ! Horace, blessé, confronté à trois Curiaces (PS, LFI, LR) qui lui
courraient sus, a réussi, comme l’autre, à les tuer tous les trois (« ces
choses-là sont rudes, il faut, pour les comprendre, avoir fait des études »).
Hélas pour lui, il y en avait un quatrième. Un Curiace coriace qui lui est
passé sous le nez.
Donc la droite Trocadéro se prend une branlée. On leur avait dit, à ses
électeurs potentiels, « Bellamy c’est top ! ». Intéressés, ils ont jeté un œil,
ils ont vu Laurent Wauquiez, le Benoît Hamon du conservatisme, l’homme qui à
force d’aboyer était déjà aux abois. Epouvantés, l’œil, ils l’ont aussitôt refermé.
Mélenchon, lui, en vrille, perd son corps et ne garde que son ombre. Il y a
deux ans, quatre points le séparaient de Macron, l’écart a bondi à 16 points.
Désormais en danger, comme Wauquiez, sent-il le fagot ? Pas forcément : une
secte sacrifie rarement son gourou.
Wauquiez comme Mélenchon, une fois de plus d’accord, ont d’ailleurs trouvé une
explication à leur déconvenue : c’est la faute à Macron. Tu l’as dit bouffi !
C’est exact : notre défaite de 1940 ce fut d’ailleurs la faute des Allemands.
Les socialistes qui avaient atteint le fond de la piscine ont commencé à
creuser en-dessous. Glucksmann ? Une Gluckswoman à la Taubira aurait fait
mieux.
Pour faire preuve d’une telle dextérité stratégique il fallait non des
Bonaparte, mais des Gamelin : on les a trouvé.
La liste Macron n’a donc reculé que d’1,5 point en deux ans (la liste de droite
de 12 points) et cela bien qu’elle ait été portée par une tête de liste aussi
charismatique que nos anciens profs de math, se soit dotée d’un programme
hiéroglyphique, ait conduit une campagne à réendormir les morts, bien que les
médias, cette fois, ne lui ait rien épargné et qu’elle ait engrangé le soutien
déclamé de Bernard-Henri Lévy ce qui aurait dû être rédhibitoire.
La crise des « gilets jaunes » s’est donc non seulement soldée par un triomphe
lepéniste mais elle a renforcé, en prime, la normalisation du face-à-face
Macron-Le Pen dont il s’agissait de se libérer. Qui sera en mesure, en effet,
d’empêcher que la prochaine élection présidentielle ne nous laisse le choix
qu’entre une réélection d’Emmanuel Macron ou l’accès au pouvoir d’un
néofascisme soft et relooké ?
Qui aurait imaginé, surtout, qu’en pleine radicalisation d’une révolte sociale
apparente, toutes les gauches, écologistes non compris, culmineraient à 18,5 %
des suffrages, l’étiage le plus bas de toute l’histoire de la République ?
Une débâcle d’une telle ampleur exigerait que les protagonistes de ce Waterloo
politique regardassent enfin – enfin ! -, avant qu’il ne soit trop tard, la
réalité en face : c’est-à-dire que les mini-bureaucraties moribondes qui ne se
prorogent qu’en gérant des dépôts de bilan se dissolvent, que tous les petits
chefs épuisés, dont les espaces d’influence ne dépassent pas celui des plateaux
télé, dégagent pour permettre l’émergence d’une nouvelle force novatrice et
réunificatrice. C’est-à-dire, surtout, que les gauches affrontent la cruelle
énumération des fautes effarantes qu’elles n’ont cessé d’accumuler et des
innombrables cadeaux dont elles ont si généreusement couvert l’extrême droite.
Ne serait-ce qu’en lui abandonnant sans combat, et presque avec jubilation,
l’une après l’autre, toutes les valeurs qui constituaient le socle des grandes
luttes démocrates-progressistes : la nation, la République, la laïcité,
l’identité, la sécurité, la souveraineté, le travail ; en désignant
compulsivement, sous l’appellation de « populisme », tout ce qui échappait à
leur préjugés normatifs, donnant ainsi à croire que c’était la référence au
peuple qui leur était insupportable ; en sacrifiant non seulement aux positions
libertaires petites-bourgeoises, la conquête de nouvelles libertés effectives
en faveur des plus défavorisés, mais également en substituant un
révolutionarisme sociétal rhétorique à toute véritable réforme sociale ; en
normalisant, s’agissant de la social-démocratie, le renoncement à toute
confrontation avec le néocapitalisme, voire en trahissant, purement et
simplement, en sa faveur ; en se refusant, par confort intellectuel, à se
saisir de la question des immigrations et des migrations, quitte à en
abandonner l’exploitation démoniaque aux séides de l’extrême droite et de la
droite extrême ; en portant eux-mêmes, par automatisation des surenchères, des
coups mortels aux causes les plus dignes d’être défendues jusqu’au bout : ainsi
le féminisme en transformant « me too » en « balance ton porc ! » ou
l’écologisme en le dissolvant dans le néo-anarchisme zadiste. Et, marron sur le
kouglof, en soutenant sans le moindre recul critique, par démagogie ou par
lâcheté, un mouvement ambigu qui s’avère, pour cette gauche, moins offrir un
tremplin qu’ouvrir un tombeau.
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