Très beau texte de notre amie poétesse kabyle, médecin des les hôpitaux en France exprimant la nostalgie de ses racines. Tout homme qui ne se retourne pas sur ses racines, est un homme perdu, dit un proverbe berbère.
R.B
Le matin j'allais au travail sans avoir fermé l'œil de la nuit, à chercher vainement ce que j'avais perdu, à fouiller tous les coins où je pouvais l'avoir mis, à maudire ma mémoire et torturer mon esprit.
Mes collègues voyant mes cernes et mes traits décousus, me posaient alors des questions et je répondais que je ne le retrouvais plus.
" Oh mon dieu qu'as tu donc égaré ?? " me demandaient-elles désemparées.
" Ta bague ?? Ton bracelet ?? Ta broche ?? Ton collier ?? ...
" Oh non, ne dis pas tout le coffret ?? !! "
Je hochais la tête un peu gênée et elles continuaient :
" Ton passeport ?? Un papier ?? Ton diplôme ?? Ton trousseau de clés ?? "
Rien d'important je leur disais car j'étais certaine que jamais elles ne comprendraient.
Elles étaient bien gentilles mais ne me ressemblaient pas, ni les mêmes soucis ni les mêmes combats. J'étais la seule Algérienne parmi une vingtaine d'autres nationalités, aucune d'elles ne parlait mon dialecte ni en Français. Ce n'était certes pas un problème pour communiquer mais comment leur faire comprendre, comment leur expliquer ; que perdre un mot pour moi était perdre mon identité ??
Je me suis parlée à moi même dans ma langue pendant vingt ans mais je réalisais enfin que j'étais partie pour trop longtemps et que mon exil avait atteint sa date d'expiration.
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