Une demi-heure de discours pour enrober une annonce très attendue : la vaccination anti Covid doit se généraliser, d’abord en l’imposant aux personnes en contact avec la population, à commencer par les soignants et tous les professionnels en contact avec les personnes hospitalisées ou âgées, puis en « imposant le pass sanitaire » à l’ensemble de la population si nous voulons vivre « normalement » (se rendre au restaurant, au cinéma ou dans un centre commercial).
Il fallait oser. Emmanuel Macron l’a fait, sachant que les antivax se comptent pas millions, si minoritaires soient-ils, et que certains le sont irrationnellement. Ils croient réellement au complot de l’industrie pharmaceutique et des gouvernements. Certains propagent sur les réseaux sociaux l’idée que le vaccin contient une puce 5G permettant de nous contrôler, que l’ARN messager pénètre les cellules et fera de nous des zombis dans quelques années…
Si près d’un million de Français se sont inscrits sur Doctolib pour se faire vacciner dans les heures qui suivirent l’allocution présidentielle, la généralisation d’un pass sanitaire et la marche forcée vers la vaccination généralisée est une aubaine pour les populistes et les extrémistes de tous bords, qui une fois encore, se ressemblent tant qu’ils finiront un jour par s’assembler : RN, LFI, PC, EELV crient, comme on pouvait s’en douter, à l’atteinte à la liberté.
Un pays qui protège et intègre ses minorités s’honore. Un pays dans lequel chaque minorité dicte sa loi à la majorité est en danger de destructuration sociale. Emmanuel Macron aurait pu rappeler que de nombreux vaccins sont déjà obligatoires, obligation d’ailleurs entérinée par la Cour européenne des droits de l’Homme, et que les vaccins anti-Covid ne sont pas plus dangereux que les autres. Ce qu’a annoncé le chef de l’État le sera dans tous les pays riches, ceux qui ont les moyens d’offrir à leur population le vaccin le plus élaboré et le plus avancé contre ce fléau qu’il faut abattre, avant qu’il n’abatte notre économie, notre vivre-ensemble, notre cohésion sociale, notre droit à vivre normalement.
Certains restaurateurs s’indignent. Ils ont autre chose à faire que de contrôler le pass sanitaire de leurs convives, disent-ils. Ils ont été placés sous perfusion de l’État, donc du contribuable, durant le confinement, au point qu’ils n’étaient pas rares à préférer rester fermés. Israël, qui sert de vitrine et de laboratoire en matière de gestion du Covid, avait imposé l’obligation vaccinale (même un test PCR ne suffisait pas) pour manger en salle, mais pas sur les terrasses. Ce fut avant le variant Delta, bien plus contagieux et de ce fait bien plus dangereux que les souches précédentes. Et nul ne connaît la contagiosité, la virulence et la létalité des prochains variants… Les restaurateurs, les responsables de salles de spectacle, mais aussi les employeurs et tous ceux qui devront exiger le pass sanitaire devront s’y soumettre. Préfèrent-ils rester rideau baissé à partir d’octobre en cas de reprise épidémique ?
Comme il n’y a pas de règle sans sanction, celle-ci devra être dissuasive : forte amende pour les clients, fermeture administrative pour l’établissement. Une règle qu’on peut ne pas respecter est pire que pas de règle du tout. Ceci dit, la première sanction, c’est de ne pas pouvoir entrer dans un bon restaurant ou se rendre à un spectacle si l’on n’a pas son passeport vaccinal.
Une fois n’est pas coutume, Emmanuel Macron a (pour le moment du moins !) la majorité avec lui. Les Français n’acceptent pas que des soignants refusent de se vacciner. Et au-delà de l’approche catégorielle, ils veulent mettre fin au cauchemar du Covid ! Une minorité ne peut, au nom de la liberté individuelle, faire prendre des risques à tous ou obliger la majorité, et ainsi toute la société, à s’adapter à leurs desiderata. On peut nuancer l’obligation, se demander si l’imposer aux jeunes est indispensable : les 12-16 ans auraient pu être épargnés de ces obligations collectives. C’est une question scientifique, et on a vu à quel point les violons des médecins sont désaccordés. Mais si telle est la condition du retour à la vie normale, les jeunes devront aussi s’y plier.
Nous avons assez tergiversé. « Nous », c’est d’abord Emmanuel Macron, même si le monde entier a perdu sa boussole dans cette crise. On aurait pu mieux faire, retenir plus tôt les leçons de dysfonctionnements, s’inspirer plus franchement de ce qui s’est mieux fait ailleurs. Mais cette fois, le cap est clair, et l’on pourrait même regretter que le calendrier des prochaines mesures ne soit pas plus serré. Les démagos, les extrémistes, les populistes et les complotistes contre tous les autres. Cette bataille ne doit pas être perdue. Si la droite républicaine (le PS n’est plus qu’une force d’appui à l’extrême-gauche), ne veut pas qu’elle devienne la victoire du seul Emmanuel Macron, elle devra lui apporter un soutien sans failles. Qu’elle se rassure : il lui restera suffisamment de sujets de discorde pour alimenter la campagne électorale !
Une large majorité des Français soutiennent les mesures annoncées par Emmanuel Macron
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