mercredi 20 janvier 2016

QUE PENSER DE LA DERNIÈRE SAILLIE DE Mohamed TALBI ?

Il est regrettable que les directeurs des chaines de TV ne fassent pas de place à ce savant, pour faire profiter les tunisiens de son immense savoir. 
Est-ce à dessein qu'ils ne lui réservent que des émissions populistes, limite trash, avec des animateurs de bas étages comme c'était le cas de la chaîne Al Hiwar Ettounsi et de ses deux animateurs Naoufel Ouertani et Samir Wafi.
Pensent-ils le ridiculiser ainsi ? 
Alors que des émissions littéraires et culturelles existent sur certaines chaînes TV, où le professeur n'est jamais invité !
Est-ce parcequ'il déplaît aux politiques, que ce soit à Ghannouchi ou à BCE dont il ne partage pas les idées, qu'il est banni de ces émissions ?

Où est la liberté tant revendiquée par les TV, toutes chaînes confondues, si leurs directeurs brossent dans le sens du poil les responsables politiques et font du populisme ? Il semble que ceux-là n'ont encore pas fait leur révolution !

Toujours est-il que le professeur est réduit à passer chez des animateurs incultes dans des émissions de divertissement de mauvais goût, dans l'espoir de passer un peu de son savoir et d'éduquer les tunisiens.
Ce qui lui a valu une volée de bois vert sur les réseaux sociaux, après sa dernière émission TV, où il était invité pour présenter son dernier livre "Méditation sur le Coran : Vérité, Rationalité et Ijaz’’ et fut piégé par l'animateur qui à l'évidence n'a pas lu son livre, préférant l'entraîner dans un bavardage à "sensation".

Intelligent, le professeur accepte de jouer le jeu des animateurs pour "faire" leur spectacle tout en passant le message qu'il veut passer auprès des téléspectateurs ! Est-il compris ? Cela relève du niveau intellectuel de chacun.

Homme d'humour et vif d'esprit, contrairement à ce que beaucoup croient pour voir dans son humour une preuve de sénilité (qui a dit qu'un intellectuel doit être sérieux comme un Pape ?), le Pr Talbi bon pédagogue, aime enseigner dans la joie et la bonne humeur. 
Son humour pince-sans rire, peut ne pas être compris par beaucoup, dont certains y verraient de la sénilité.

Or que reproche-t-on au Pr Talbi lors de la dernière émission à laquelle il a participé ?
Qu'il ait dit de Bourguiba qu'il était un "taghout" éclairé ? Un dictateur refusant la chariaa supposée être la loi d'Allah ? La belle affaire ! Il ne nous apprend rien. 
Utilisait-il le qualificatif "Taghout" dans son sens littéraire premier d'excès dans la désobéissance, de rebelle aux lois; ou dans le sens théologique que retiennent les religieux de "mécréant" ? Les deux probablement, puisque Bourguiba rejetait à la fois les lois des Bey tout comme il rejetait la chariaa, dont elles s'inspiraient.

Tout le monde sait que Bourguiba était un dictateur éclairé et qu'il était laïc pour avoir instauré un code civil inspiré du code napoléonien; laissant de côté la chariaa fabriquée par les hommes et censée être la loi d'Allah, vieille de 14 siècles ... donc inadaptée pour la jeune république qu'il voulait bâtir moderne ! 
Ce que le Pr Talbi a redit en termes plus clair pour ceux qui ne maîtriseraient pas l'arabe littéraire.

Si les islamistes qualifient Bourguiba de "taghout", parcequ'il avait refusé la loi d'Allah .... c'est pour le diaboliser pour avoir choisi un Etat Civil, en le désignant ainsi et ceux qui l'ont suivis, aux "takfiristes", leur bras armé, pour les exécuter !

Il me semble que le professeur, en bon pédagogue, a utilisé ce qualificatif sciemment pour renvoyer dos à dos deux systèmes totalitaires : 
- celui d'une dictature éclairée ayant adopté le Code Civil produit des Lumières, et - celui d'une dictature théocratique obscurantiste, fondée sur la chariaa ! 
Ce qui faisait dire à Bourguiba, que la différence entre lui et les Frères musulmans, ce sont les 14 siècles qui les séparent !

Rappelez-vous les actes terroristes contre les gendarmes, les soldats, les policiers ... piliers de l'Etat Civil que refusent les islamistes; et qui seront assassinés et mutilés pour cause de "taghout", selon les Frères musulmans !

En faisant le rapprochement entre "taghout" et dictature dans la même phrase, le Pr Talbi semble vouloir montrer aux téléspectateur que les commanditaires des meurtres perpétrés contre les agents de l'ordre, sont des dictateurs obscurantistes; contrairement à Bourguiba qui a été certes dictateur mais éclairé ! 

Était-ce opportun de la part du Pr Talbi de reprendre un vocable galvaudé par les islamistes pour le banaliser auprès de ceux qui assassinent les forces de l'ordre pour cause de "toghian" (dictature des mécréants) ? Et de l'appliquer à Bourguiba, qu'ils tentent de discréditer et d'en salir la mémoire auprès des tunisiens ? Était-ce la bonne émission TV, pour s'adonner à un tel exercice intellectuel ? 
Surement pas !


Rachid Barnat



1 commentaire:

  1. Bouzgarou Sihem :

    Il est incontestable que le Professeur Mohamed Talbi est un grand érudit, un historien dont les œuvres majeures sont citées par ses pairs, reconnues en Occident et même ailleurs ! Cependant, je me dois, à mon niveau, de remettre les pendules à l’heure!

    Le Professeur est un islamologue qui a sondé les abysses de l’histoire islamique, ses tenants et ses aboutissants. Il a, par ailleurs, étudié, analysé, tenté d’interpréter le coran, les exégèses des vénérables anciens, si bien qu’il lui est impossible de ne pas savoir que nul être humain, somme toute faillible, ne peut prétendre juger ou évaluer la profondeur de la foi de quiconque ! D’ailleurs, c’est s’octroyer des qualités divines que de le prétendre !

    En outre, quand il cite l’excommunication prononcée par l’Arabie Saoudite, il omet de préciser (délibérément ou non, va savoir) que le prodige ayant émis une fatwa contre Bourguiba, n’est autre que le « cheikh » Abdelaziz Ben Bez celui qui a déclaré que la terre est plate et qu’elle ne peut, en aucun cas, être ronde ni tourner ! Alors, permettez-moi de douter du sérieux de cette fatwa!

    En définitive, Bourguiba est un homme politique, ayant marqué le vingtième siècle et l’histoire de son pays d’une empreinte indélébile, qui a tenté d’interpréter le Livre sacré puisqu’il en avait une connaissance profonde, il a synthétisé les conclusions auxquelles plusieurs intellectuels arabes avaient abouti, longtemps avant lui (à l’instar de Tahar Haddad, Mohamed Abdou, Ahmed Amine…), il est aujourd’hui décédé, qu’on le laisse reposer en paix et qu’on essaie, au moins de lui emboîter le pas, au lieu de continuer, encore de discuter du sexe des anges !

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