mercredi 6 janvier 2016

Et si la crise politique était la mère de toutes les crises que connaît la Tunisie ?

Le constat de M.K.N : Nidaa Tounes n'a pas été à la hauteur des espérances qu'il a suscité chez ses électeurs pour cause d'amateurisme ! R.B

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Mustapha Kamel Nabli

La Tunisie passe par une phase très difficile et complexe qui se caractérise par la superposition de plusieurs crises d’ordre sécuritaire, économique, social et politique. Chacune de ces crises peut être, selon son degré d’évolution, de nature ouverte ou latente, rapide ou lente, et plus ou moins profonde. Parmi elles, la crise politique est plutôt lente et latente, mais elle est profonde. Elle est la plus sournoise et la plus dangereuse. Elle reflète l’échec de la mise en place des nouvelles structures politiques prévues par la Constitution devant produire les effets attendus en termes de stabilité politique et d’efficacité dans la gestion des affaires du pays.

On peut débattre sur le point de savoir si la crise est récente ou bien si elle est de longue date. Mais il est certain qu’elle est de nature similaire à celle connue par la Tunisie en 2013. Celle-là était une crise due à la remise en cause de la légitimité issue des élections d’octobre 2011, suite au dérapage du système politique et à la déviation par rapport à ce qui avait été convenu avant les élections en termes de délai de rédaction de la constitution, de son contenu et du mode d’exercice du pouvoir. Cette crise a été aussi lente et latente avant de devenir une crise ouverte. Elle n’a pu être résolue que par un processus ardu mené par le Quartette, poussé par la rue et reconnu par le prix Nobel de la paix. Mais c’est un processus qui a été coûteux en termes de sang des martyrs, de victimes de la violence et en termes économiques pour le pays.

La crise actuelle trouve aussi son origine dans les élections de la fin de l’année 2014, et dans une évolution de la situation qui n’est pas en conformité avec les attentes et les promesses des élections. Les politiques suivies et l’orientation générale sont souvent très différentes de ce qui a été promis lors de la campagne électorale. Il s’est créé alors un gap entre le vécu et les attentes, qui est porteur de tous les risques. Les élections de la fin 2014 ont été organisées dans le cadre de la Constitution de la II éme République, qui prévoyait un régime quasi parlementaire. 
Cela impliquait la responsabilité du parti qui a obtenu le plus grand nombre de sièges pour conduire le gouvernement et la politique de l’Etat, selon le programme qui a été soumis aux électeurs. Or il n’en a rien été. D’abord, le parti politique sorti des urnes n’a pas eu la charge de former le gouvernement. Une coalition ad hoc a été mise en place, de manière non transparente, sous la responsabilité d’une personnalité non élue et non partisane. C’est une déviation manifeste de l’esprit et probablement de la lettre de la Constitution. 
Le premier parti politique n’a pas pris la charge de la formation du gouvernement, ni de la définition du programme du gouvernement, même en concertation avec les autres partis de la coalition. En fait, il n’y a pas de responsabilité politique claire du gouvernement actuel.

La deuxième cause de la crise réside dans le fait que le premier parti politique élu fait face depuis les élections à une crise interne aiguë, qui a fragilisé ses structures et ses institutions. Indépendamment des tenants et aboutissants de cette crise du parti, qui était somme toute prévisible, le résultat est qu’il n’assume pas politiquement la responsabilité qui lui incombe dans la gestion des affaires du pays. Il ne donne ni une impulsion à l’action du gouvernement ni un soutien franc à ses initiatives. Bien au contraire, nous avons observé nombre de fois l’action gouvernementale perturbée au niveau du parlement, sinon contrecarrée, par les députés membres du parti censé la soutenir en premier.

Il en découle que nous sommes dans un processus qui est de nature à remettre en cause les résultats des élections de 2014, qui étaient supposés apporter la stabilité politique et institutionnelle, sur laquelle doivent se baser le redressement tant escompté de l’économie et la mise sur orbite du développement accéléré du pays. Le manque de transparence dans les rôles respectifs du chef de l’Etat et du chef du gouvernement dans leur exercice du pouvoir complique davantage la situation.

Une crise lente et non ouverte

Nous sommes dans une crise lente et non ouverte, mais elle est sournoise et dangereuse. Quelles sont les manifestations actuelles de cette crise ?

La première manifestation se trouve au niveau du degré de confiance accordé par le citoyen, constaté dans tous les sondages, à la classe politique et en particulier aux partis. Les citoyens n’ont plus confiance dans leurs gouvernants qui ont été élus démocratiquement, ni dans tous ceux qui sont impliqués dans la scène politique. 
Ils ont de loin plus confiance dans des structures non élues comme l’armée.

La deuxième manifestation de la crise est au niveau du manque de visibilité dans les programmes et orientations du gouvernement. Par une combinaison malheureuse d’une incapacité des membres de la coalition à travailler ensemble afin d’élaborer un programme commun crédible, d’une incapacité du gouvernement à fonctionner de manière efficace et homogène et d’une suite de chocs qui ont perturbé son action, le gouvernement n’arrive pas à convaincre et à projeter une vision crédible de son action et de l’avenir.

La troisième manifestation est au niveau de la détérioration des indicateurs économiques, dont surtout ceux de l’investissement qui est conditionné en premier lieu par la confiance dans les institutions, dans la stabilité politique et le degré de visibilité concernant les politiques futures. Le taux d’investissement privé, en pourcentage du PIB, ne cesse de baisser, compromettant les perspectives futures de croissance.

La quatrième manifestation de cette crise est à trouver dans les difficultés et les retards pris dans la mise en place des structures institutionnelles prévues par la nouvelle constitution deux années après son adoption: Cour constitutionnelle, Conseil supérieur de la magistrature, institutions et lois relatives à la décentralisation et aux collectivités locales, conseil pour l’environnement et des générations futures, la nouvelle haute instance pour l’audio-visuel, la nouvelle instance pour la lutte contre la corruption. 
Il en va de même pour la mise en application de diverses lois importantes comme celle contre le terrorisme, avec des textes réglementaires qui mettent trop longtemps à être publiés.

La crise politique et ses manifestations font aujourd’hui que le citoyen tunisien est angoissé et perturbé par la tournure des événements: risques sécuritaires dont le terrorisme est le plus important, situation économique dégradée et dont les perspectives ne sont pas encourageantes, et situation sociale préoccupante. 

L’Etat peine à recouvrer son autorité, et à agir avec efficacité comme cela a été promis par les vainqueurs des élections. Ces différents risques sont évidemment bien liés et se nourrissent les uns des autres. Mais c’est la crise politique qui est la plus déterminante et sur laquelle il faut agir en priorité, car elle conditionne la capacité de l’Etat tunisien à faire face aux défis de la sécurité, de l’économie et du social. 
En plus, cette crise politique risque de devenir aiguë et éclater ouvertement à n’importe quel moment.

Mais que faire et quelles pistes de sortie de crise ?

En premier lieu, le remaniement gouvernemental attendu doit s’inscrire dans un cheminement de résolution de la crise dans son ensemble. Autrement, il risque de constituer un replâtrage qui n’aura aucun effet et sera une nouvelle occasion manquée. 
La continuation du travail du gouvernement comme s’il pouvait être indépendant de ce qui se passe au niveau politique général, et comme s’il était un gouvernement de technocrates, est dangereux et doit être corrigé ! D’ailleurs, les difficultés rencontrées pour réaliser ce remaniement, qui ne cesse d’être repoussé, sont une preuve manifeste de l’aggravation de la crise.

En deuxième lieula crise au sein du parti majoritaire au Parlement Nidaa Tounes doit être résolue au plus vite. Sans une direction claire et responsable du premier parti politique, l’action gouvernementale ne peut être effective et efficace. Cette résolution de la crise doit éliminer les origines de la crise, et non pas seulement faire basculer la situation au profit d’un camp particulier et au détriment d’un autre. Si ce parti se scinde ou bien continue à vivre cette crise de légitimité et de direction, la crise politique ne pourra que s’approfondir et même devenir ouverte et aiguë.

Troisièmement, toute coalition politique telle qu’elle existe aujourd’hui ou bien ajustée qui soutiendrait le gouvernement doit se constituer sur des bases claires en termes de programme politique, économique, institutionnel et de responsabilité politique.

Quatrièmement, la clarification et la délimitation effective des responsabilités respectives entre le président de la République et le chef du gouvernement doivent se faire au plus vite en se conformant à la Constitution. L’ambiguïté dans l’exercice du pouvoir est source de confusion et de dysfonctionnements que le pays ne peut plus se permettre.

A défaut d’une action politique forte et déterminée pour sortir de cette crise, l’avenir du pays est hypothéqué et les perspectives de vaincre le terrorisme, de redresser la situation économique et de résorber le mécontentement social sont assombries. 
Il semble de plus en plus évident qu’à l’instar de ce qui s’est passé en 2013, la pression de la société civile et sa vigilance seront déterminantes. 
Le système politique semble être bloqué et dans l’incapacité de relever ce défi tout seul!


2 commentaires:

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  2. LE NOUVEAU GOUVERNEMENT : République des copains et des coquins !

    Ali Gannoun :

    Si Hbib Essid a cogité longtemps pour nous livrer un gouvernement de rêves ... brisés; à croire que ce pays ne dispose plus de compétences ni de savoir faire :
    - Bien que Batikh ait résisté aux islamistes, Essid l'a éliminé.
    Ce geste suffit à lui seul pour démontrer la dépendance totale de ce gouvernement du bon vouloir des Frères musulmans nahdhaouis.
    - Tayeb Baccouche est définitivement réduit au silence. Il n'a su l'ouvrir que pour dire des bêtises. Son allégeance au fils de BCE, était trop tardive.
    - Chahed, le liquidateur officiel du Nidaa, est élevé au rang de ministre.
    - Khaled Chawket, le blablateur sans mérite, est le nouveau porte parole des bras cassés.
    - Zied Laathari, l'homme à la tablette omniprésente, est toujours ministre pour accompagner le chômage qui monte et pour lequel il n'a présenté aucun remède durant toute une année.
    - Ben Dhia est toujours aux sports. Il assiste impuissant à la montée de l'indiscipline dans toutes les disciplines.
    - L'intérieur est resté sous la coupe des "Frères", pour entériner la dislocation de ce ministère qui continue à protéger les malfrats qui l'ont intégré sous la troïka.
    - Mohsen Hassan est au commerce. Ce sera pour lui l'occasion pour se débarrasser des casseroles qu'il traîne.
    - A la culture Mme Sonia Mbarek a le rayonnement culturel d'un organisateur de combat de coqs.
    - Najmeddine Hamrouni, un très grand barbu sans barbe, est l'oeil de Moscou chez le chef du gouvernement.
    Il actionnera le téléphone rose entre les deux cheikhs (Ghannouchi & BCE), à chaque fois que ce sera nécessaire.
    - Essid est toujours un grand ... hésitant !
    A force de tourner la tête vers les deux vieux (Ghannouchi & BCE), il finira par avoir un torticolis.

    J'ai juste envie de dire pardon à ceux qui sont morts pour ce pays et qui, tous les jours, se font de nouveau assassiner !

    PS : Je reproche une seule chose à Si Habib Essid : Il aurait du nommer directement Ali Laaridh comme ministre de l'intérieur plutôt que de nommer son chef de cabinet à ce poste !

    !..AH..!

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