jeudi 21 juin 2018

Bientôt l'égalité homme-femme en Tunisie ?

La commission des droits et des libertés, a remis son rapport au président de la République : la balle est dans le camp de Béji Caïd Essebsi.
Donnera-t-il suite à sa proposition d'égalité entre homme et femme devant l'héritage ?
Ghannouchi s'y opposera-t-il au risque de perdre sa crédibilité d'avoir changé pour se revendiquer "progressiste" et "démocrate", pour séduire les Tunisiens ?
Tant que les Tunisiens n'auront pas tranché entre Etat Civil et Etat religieux, ils n'en sortiront pas des ambiguïtés. Or Ghannouchi à mainte reprises a rassuré les Tunisiens que l'Etat restera Civil, particulièrement lors de la constituante quand son neveu tentait d'imposer la chariaa en qualifiant la femme de complémentaire de l'homme !
R.B

On peut aisément pardonner à l'enfant qui a peur de l'obscurité.
La vraie tragédie de la vie, c'est lorsque les hommes ont peur de la lumière.
Platon

L’Etat religieux ou confessionnel prend pour point de départ la désignation symbolique des maîtres et la délimitation du territoire qui est le leur et celui de la communauté de leurs sujets.
Il voile les femmes et leur impose un code de conduite excessivement minutieux afin de projeter son pouvoir aux tréfonds des corps et des foyers.
Or, dans les corps des femmes et la pénombre des foyers réside aussi l’honneur des hommes.
Et c’est des hommes, placés sous surveillance dans leur honneur, que les détenteurs du pouvoir religieux se rendent maîtres en prenant le contrôle des femmes.
Ahmad Beydoun
La présidente de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité tunisienne, la députée indépendante Bochra Bel Haj Hmida, mercredi à Tunis.
Bochra Bel Haj Hmida *

En Tunisie, « une révolution dans la continuité »

La Commission des libertés individuelles et de l’égalité, créée par le Président Béji Caïd Essebsi, présente son premier rapport. Sa présidente, la députée indépendante Bochra Belhaj Hmida, détaille les mesures progressistes qui y figurent.
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Egalité femmes-hommes devant l’héritage, homosexualité, peine de mort, votre travail s’attaque à de nombreuses questions taboues…

C’est une révolution dans la continuité. Révolution car, en effet, nous avons soulevé des questions tues jusqu’ici ou timidement abordées. Nous proposons un code des libertés et droits individuels qui les définit précisément. C’est un bouleversement, seul le Canada possède un texte de ce genre. 

Continuité aussi car nous prolongeons la tradition avant-gardiste de la Tunisie qui date du Code du statut personnel de 1956 [interdiction de la polygamie, instauration du consentement mutuel des époux…] en instaurant des avancées toujours absentes chez nos voisins. 

Avec cette commission, le Président nous a offert une opportunité historique qui, peut-être, ne se représentera pas.

C’est pour cela que, pour chaque mesure sensible, vous indiquez plusieurs propositions de lois, plus ou moins radicales ?

Notre réflexion repose sur une certaine lecture de la religion portée par des théologiens pour qui l’islam est porteur des valeurs de justice, d’égalité et d’intégrité physique. Mais, pour ne pas courir le risque de ne rien obtenir, nous avons choisi de faire plusieurs propositions concernant les trois points les plus sensibles. 

Sur l’homosexualité, notre première mesure est l’abrogation de l’article 230 du code pénal [qui criminalise les relations homosexuelles]. La seconde, c’est d’abandonner la peine de prison qui peut aller jusqu'à trois ans et d’interdire l’usage du test anal [considéré comme un acte de torture par des ONG], utilisé aujourd’hui pour prouver une relation homosexuelle.

Concernant l’héritage, le principe est l’égalité totale. Mais c’est une question difficile sociétalement et même juridiquement. Nous prônons donc d’abord l’égalité pour les cas les plus répandus : entre frères et sœurs, mari et femme ou parents et enfants. De son vivant, le testateur garde cependant le droit de ne pas suivre cette règle. Dans la deuxième formulation, la femme doit revendiquer l’égalité pour l’obtenir automatiquement. Toutes les précautions ont été prises pour qu’elle ne soit pas soumise à des pressions familiales qui l’obligeraient à abandonner son droit. La femme ne peut renoncer à sa moitié d’héritage qu’à la seule condition qu’elle l’exprime clairement.

La question de la suppression de la peine de mort n’était pas évidente. Quand vous abordez la question, on vous répond : « Vous voulez laisser en vie les terroristes, les violeurs d’enfants, etc. » Mais nous ne pouvions pas élaborer des lois basées sur des valeurs universelles d’humanisme en maintenant des peines inhumaines.

Avez-vous subi des pressions ?

Aucune, à aucun moment ! Nous nous sommes réunis plus d’une trentaine de fois en dix mois. Nous avons consulté des experts de toutes tendances en toute liberté. Le Président a été clair dès le premier jour : « Vous écrivez ce que vous voulez et vous publiez ce que vous avez fait. Moi, je suis libre de prendre ce que je veux. »

Et maintenant, comment s’assurer que cette « opportunité historique» se transforme en acte ?

C’est aux Tunisiens de se saisir de ces thèmes, de les défendre, ce n’est pas à nous. Mais je suis convaincue que dès le 13 août [jour de commémoration de la promulgation du Code du statut personnel et premier anniversaire de la Colibe], nous, les députés, aurons un projet de loi à voter. Mais, c’est aussi un travail de long terme pour faire accepter ces changements. La jeunesse devra jouer son rôle.


Députée indépendante. Présidente de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité tunisienne.


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Voilà encore un journaliste tombé dans le panneau de Ghannouchi pour dire que son parti Ennahdha était proche des Frères musulmans, ignorant que c'est une branche de cette organisation internationale dont Ghannouchi est toujours membre du bureau politique !
R.B

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Audace tunisienne
L’importance du débat lancé en Tunisie par la Colibe, la commission chargée par le président Béji Caïd Essebsi de proposer des mesures favorables aux libertés individuelles, ne saurait être sous-estimée.
Rien n’est fait : « proposez, je choisirai  a dit en substance le Président, un homme qui tient à son autorité. Mais si la commission est suivie, c’est une révolution qui se prépare, qui placera la Tunisie en tête de la réforme des pays musulmans.
A l’aune de #MeToo, du combat féministe, de la juste émancipation des minorités sexuelles, ces mesures paraîtront élémentaires. Mais en comparaison des législations moyenâgeuses qui sévissent dans la plupart des pays islamiques, c’est une rupture décisive.
La commission propose d’établir l’égalité hommes-femmes en matière d’héritage (la loi islamique prévoit que la femme reçoit la moitié de ce qui est réservé à l’homme dans cette circonstance), de dépénaliser l’homosexualité (punie de peines de prison), de supprimer le test anal toujours pratiqué sur les hommes soupçonnés d’homosexualité, d’abolir la peine de mort, entre autres réformes touchant à des tabous en terre musulmane.
Tout cela est prudemment formulé. En matière d’héritage, la femme pourra par exemple choisir de se soumettre à la tradition si sa volonté est librement exprimée ; pour la peine de mort, la commission propose de procéder par étapes, etc.
Le Président, aussi bien, jugera le moment venu de ce qu’il retient ou non du rapport de la Colibe. On peut supposer que son estimation des rapports de force politiques et de l’effet électoral de ses décisions pèsera lourd dans la balance.
Une coalition d’autorités islamiques a déjà critiqué le projet en expliquant qu’un gouvernement ne saurait aller à l’encontre de la lettre du Coran et que l’adoption de ces réformes porterait atteinte à « l’identité tunisienne ».
La position du parti Ennahdha, longtemps proche des Frères musulmans, qu’on soupçonne d’œuvrer discrètement contre tout changement, jouera un rôle essentiel.
Curieusement, l’argument identitaire rejoint les thèses du nationalisme européen, pour qui la démocratie, en accroissant sans cesse les droits des uns et des autres, porte atteinte à l’identité des nations. Entre les islamistes et ceux qui les dénoncent avec le plus de virulence, il existe une paradoxale parenté…
Mais la présidente de la commission a bon espoir et promet qu’un projet de loi sera soumis au Parlement à l’été. La chose n’est pas impossible : le président Essebsi se réclame de la tradition bourguibiste, qui fait de l’amélioration de la condition féminine un de ses marqueurs historiques les plus puissants.
Le débat, en tout cas, aura un retentissement qui dépassera de loin la seule sphère tunisienne. Dans le monde musulman, l’abandon de la lettre du Coran au profit d’une interprétation modernisée de l’islam encouragera tous ceux qui luttent dans ces pays pour l’émancipation des individus, celle des femmes et des homosexuels en particulier.

Si le Président et le Parlement suivent la commission, la Tunisie se retrouvera en tête de la réforme islamique, de même qu’elle avait donné le signal des révolutions arabes. Elle contredira ainsi tous ceux qui essentialisent l’islam et jugent les pays musulmans incapables de s’adapter à la modernité. Universalisme des droits contre identitarisme religieux. On voit que l’affaire n’a rien de secondaire.

Lire aussi :





    

7 commentaires:

  1. La CoLibe demande l'abrogation de l'article 230 du code pénal tunisien qui criminalise l’homosexualité

    http://www.liberation.fr/planete/2018/06/20/sur-l-homosexualite-notre-premiere-mesure-est-l-abrogation-de-l-article-230-du-code-penal-tunisien-q_1660781

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  2. Une saine révolution dans les mœurs et la législation.

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  3. Jean Pierre Ryf

    Voir la vidéo où il donne son analyse du rapport de la CoLibe*.

    https://www.facebook.com/jeanpierre.ryf/videos/10214446305844827/?q=jean-pierre%20ryf

    * Commission Liberté & égalité

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  4. LES LIBERTÉS INDIVIDUELLES FONT PEUR AUX MONARQUES ET AUX DICTATEURS DE TOUS POILS ...

    Les Tunisiens seront-ils les avant-gardistes en la matière comme ils le furent pour le Code du Statut Personnel ?

    Bochra Bel Haj Hmida vient de remettre son rapport à BCE pour accorder plus d'égalité et de liberté aux tunisiens !

    https://www.leconomiste.com/flash-infos/les-autorites-marocaines-interdisent-la-tenue-d-un-colloque-sur-les-libertes#.WyrA9IwtXDZ.facebook

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  5. EN TUNISIE, IL Y A AUSSI DES IMAMS PROGRESSISTES ... que l'on entendait pas souvent mais qui existent !

    http://kapitalis.com/tunisie/2018/06/22/libertes-le-syndicat-des-imams-soutient-les-propositions-du-colibe/

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  6. LE COMBAT POUR LES LIBERTÉS INDIVIDUELLEs, SERA ÂPRE ET PASSIONNÉ !

    Bochra Bel Haj Hmida en a fait l'amer expérience.
    Pour la stigmatiser, ses détracteurs lui imputent ce dont on ne trouve nulle trace dans son rapport : « La criminalisation de la circoncision !». Ce qui trahirait leur désir de légaliser aussi l’excision des fillettes comme le recommandait Wajdi Ghanime ce frère musulman égyptien qui veut introduire cette pratique barbare en Tunisie !

    Mais ce n'est que lorsque la passion laissera la place à la réflexion, que les idées avanceront.
    D'où le travail de pédagogie qu'elle et que doivent faire aussi les responsables politiques des partis qui se disent progressistes !!

    http://kapitalis.com/tunisie/2018/06/30/le-debat-autour-du-rapport-de-la-colibe-entre-anatheme-et-reflexion/

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  7. UNE DÉCLARATION D'AMOUR A NOTRE Bochra Bel Haj Hmida NATIONALE ?

    http://www.lepoint.fr/editos-du-point/sebastien-le-fol/martin-luther-est-une-femme-par-kamel-daoud-12-07-2018-2235492_1913.php

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