Jeux paralympiques : une cérémonie époustouflante
Sur les Champs-Élysées et la place de la Concorde, le spectacle d'ouverture chorégraphié par Alexander Ekman a magnifié la puissance des corps.
Après une cérémonie
sur la Seine pour ouvrir les JO, pas question de revenir au stade pour l'ouverture des Paralympiques.
Les para-athlètes ont été les premiers à vouloir la même ambition, « d'où le choix des
Champs-Élysées et de la place de la Concorde », disait Thierry Reboul dimanche dernier. Cette fois, la plus grande
place de Paris et témoin de l'Histoire, était méconnaissable. Transformée en
théâtre à ciel ouvert avec un stade monumental tourné vers l'obélisque, elle a
accueilli trois heures de spectacle. Thomas Jolly, directeur artistique des Jeux, était une fois de
plus aux commandes. La chorégraphie du Suédois Alexander Ekman a enveloppé
toute la cérémonie orchestrée sous le signe du « Paradoxe » et qui a
cheminé sur l'idée de l'intégration du handicap. Avec des images fortes, égrenées
dès le début, et une maîtrise à couper le souffle.
Pour donner le coup d'envoi, Théo Curin,
ex-nageur paralympique et animateur télé, au volant d'un drôle de taxi recouvert de
centaines de phryges, transporte des para-athlètes dans Paris et les interroge.
Le premier des cinq tableaux de la soirée, Discorde, a ensuite vu deux groupes se faire face. Lorsque Chilly
Gonzales, en pantoufles, air pénétré et affublé d'une longue traîne noire,
s'est amarré à son piano, il a établi une correspondance osée entre le pianiste
et le handicapé, tous deux tributaires d'un accessoire à roulettes. Sur sa
musique, de plus en plus discordante, une centaine de danseurs se lèvent, corps
de ballet en noir, tels des Men in Black, sur la scène blanche étendue au pied de l'obélisque,
accompagnés d'une vingtaine d'autres en fauteuil. Un rapport qui respecte
exactement les 20 % de handicapés de la population française. Ekman meut la
centaine de danseurs valides selon une discipline au cordeau : tous
ensemble volent, virent, lèvent la jambe, se mettent à genoux dans un unisson
impeccable. Valides, certes mais aux ordres. Ce sont les handicapés qui papillonnent
autour d'eux et au milieu de huit pianos. La séquence s'achève par un feu
d'artifice bleu, blanc, rouge jaillissant des fontaines dissimulées par des
écrans circulaires, telles des lanternes magiques.
Revenue d'outre-tombe, Christine and
The Queens, qui se fait de nouveau appeler Christine, surgit
et marche sur les pianos. Elle, « ou il », comme dit Daphné Bürki, chante Piaf : Non, rien de rien avec l'ensemble Matheus. Il faut le deviner, on
l'entend mal. Pour l'émotion, on repassera. Face à face, les deux groupes
illustrent le premier « Paradoxe » de la soirée. Dans l'axe des
Champs-Élysées, la patrouille de France laisse échapper ses volutes bleu,
blanc, rouge. Partis du milieu des Champs-Élysées, les 5 100 para-athlètes et
leurs accompagnants ont défilé par un temps idéal, la délégation française
fermant le ban. Le rythme était celui d'une cérémonie dans un stade : une
interminable déambulation passant devant le DJ Myd, affublé d'une immense
traîne bleu, blanc, rouge. Les commentateurs télé ont étouffé la musique, mais
on a reconnu Monday, Tuesday, Spacer, Nino Ferrer avec Champs-Élysées et Que je t'aime ou Emmenez-moi.
Effets de
démultiplication
Le deuxième tableau, My Ability, éblouit et réveille. Un chapitre fait d'émotion : après des témoignages de personnes en situation de handicap racontant leur parcours, les danseurs paraissent assemblés en grappe, corps et fauteuils. Que cachent-ils ? Leurs bras volubiles laissent s'échapper Lucky Love. Chanteur né avec un seul bras, il chante My Ability au centre d'une foule de danseurs qui le baignent de beauté et d'harmonie. Tandis que le drapeau de la France était hissé au son d'une Marseillaise moins martiale que l'originale, l'obélisque se drapait de bleu, blanc, rouge. C'était le moment de la séquence protocolaire avec les discours de Tony Estanguet et d'Andrew Parsons, président du Comité international paralympique, précédés d'une vidéo retraçant les Jeux paralympiques depuis 1948.
Arrive le troisième tableau, Sportographie,
une grande séquence chorégraphiée sur un titre entraînant de Victor Le Masne,
où la batterie était mise en avant. Nos deux groupes mettent en valeur le travail
d'équipe. Une séquence sport. Ils courent tous, vêtus de blanc sur l'anneau du
stade. Positions de combats. Au centre, au pied de l'obélisque, des projections
de corps parfaits, puis des dessins de stade. Où le sport rencontre-t-il la
danse ? Des coups de sifflet indiquent les changements de sens ou de
routine. Les danses sont faites pour être vues du ciel, dessins de lignes, de
cercles formés par des corps qui scandent les mêmes gestes. Alexander Ekman a
travaillé sur les effets de démultiplication à la Busby Berkeley. Quel
chorégraphe ne rêverait pas d'œuvrer pour des effectifs aussi
gigantesques ?
Au centre, un unijambiste esquisse un solo en béquilles.
À nouveau, c'est dans ses gestes transcendant la vulnérabilité, plus que dans
les grands ensembles, que l'humanité affleure. Tous s'emparent de béquilles.
Ekman en fait l'accessoire de sa chorégraphie. Brandies vers le ciel, elles
allongent les corps, tournées vers le sol, elles démultiplient les dessins
faits au sol par une simple paire de jambe, se font rames ou ailes, tandis que
sur le sol on projette des gros plans de sportifs. Des danseurs en chaise
roulante mènent la danse. La danse gagne son pari et envoûte la Concorde.
L'émotion était bien là
Pour l'arrivée de la flamme, portée par Florent Manaudou, Sébastien Tellier a enflammé la scène avec La Ritournelle, sous un impressionnant jeu de lumières signé Thomas Dechandon qui avait déjà fait danser la tour Eiffel le 26 juillet dernier.
Pour le quatrième tableau, Concorde, 150 danseurs munis de torches enflammées se sont lancés dans une chorégraphie rythmée par le Boléro de Ravel. Les flammes formant les agitos, symbole du mouvement paralympique. La vasque s'est de nouveau élevée sous l'air de Daphnis et Chloé, toujours de Ravel.
La cérémonie et la fête se sont achevées par le
tableau Célébration, très coloré et joyeux, sur l'air de Born to Be Alive, par Christine and the Queens.
L'émotion était bien là. Qu'en sera-t-il le 8
septembre prochain, pour la cérémonie de clôture ? Cette fois, le Stade de
France sera transformé en dancefloor géant. La soirée a été confiée au
producteur Romain Pissenem, numéro un mondial des grandes soirées électro qui a
fait appel à Jean-Michel Jarre, Kungs, Offenbach et bien d'autres stars de la
French touch.
***
Chers athlètes,
Chers amoureux des Jeux en France et partout dans le monde,
Bienvenue au pays de l’amour… et de la révolution.
Car ce soir débute la plus belle des révolutions : la révolution paralympique.
Ce soir, les révolutionnaires, c’est vous, chers athlètes.
De nos ancêtres au bonnet phrygien, vous avez le panache et l’audace.
Des révolutionnaires du monde entier, vous avez le courage et la détermination.
Comme eux, vous vous battez pour une cause qui vous dépasse.
Mais vos armes à vous, ce sont les performances.
Vos armes à vous, ce sont les records.
Vos armes à vous, ce sont les émotions du sport.
Même si vos histoires de vie sont toutes singulières, on vous a souvent fait la liste de tout ce que vous ne pouviez pas faire.
Jusqu’au jour où vous avez poussé la porte d’un club de sport.
Ce jour-là, vous avez su que le sport, lui, ne vous mettrait aucune limite.
Ce jour-là, vous avez su qu’il ne vous enfermerait dans aucune case.
Comme tous les athlètes, vous vous êtes entraînés, vous avez sué, vous avez échoué, vous vous êtes relevés…
Et vous êtes devenus les immenses champions qui nous font l’honneur d’être avec nous ce soir.
Ce qui fait de vous des révolutionnaires, c’est que quand on vous a dit “non”, vous avez continué.
Quand on vous a dit « handicap», vous avez répondu : «performance”.
Quand on vous a dit que c’était impossible, vous l’avez fait.
Et ce soir, vous nous invitez à vous rejoindre pour mener ensemble cette révolution paralympique.
Ce soir, vous nous invitez à changer de regard, à changer d’attitude, à changer de société, pour enfin donner toute sa place à chacun.
Parce que quand le sport va commencer, on ne verra plus des femmes et des hommes avec un handicap, on vous verra vous : on verra des champions.
Avec vous, on va revivre ce que le sport a de plus beau :
On sera comme des gosses quand vous serez sur la ligne de départ,
On sera comme des coachs quand viendra la balle de match,
On sera comme des fous quand vous franchirez la ligne d’arrivée !
Comme avec les athlètes olympiques, à chacune de vos victoires, c’est tout un pays qui sera fier ensemble.
Mais votre force, c’est qu’à chacune de vos victoires, c’est aussi tout un pays qui va changer.
A chacune de vos victoires, le monde va progresser.
Parce que chacune des émotions que vous allez nous faire vivre portera en elle un message qui, lui, ne s’effacera jamais :
Vous n’avez aucune limite : alors arrêtons de vous en mettre.
C’est ça, la révolution paralympique.
Une révolution douce, mais qui va changer chacune et chacun d’entre nous en profondeur, pour toujours.
Une révolution individuelle, mais avec une portée universelle.
Un changement soudain : le 9 septembre, nous nous réveillerons différents.
Il y a peu d’événements capables de rendre le monde meilleur.
Les Jeux Paralympiques ont ce pouvoir inégalé, non seulement de nous faire vibrer, mais de nous transformer.
Alors ce soir, je veux remercier le Comité International Paralympique et son Président, Andrew Parsons : merci de nous donner cette opportunité unique de révolutionner notre façon de voir le monde.
J’aimerais remercier aussi tous les acteurs, publics et privés, qui ont permis à cette révolution paralympique de commencer :
Merci, Monsieur le Président de la République,
Madame la Maire de Paris,
Madame la Présidente du Comité Paralympique et Sportif Français,
Madame la Ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques,
Madame la Présidente de la Région Ile-de-France,
Messieurs les Présidents de la Métropole du Grand Paris et du Département de la Seine-Saint-Denis,
Mesdames et Messieurs les représentants du sport français et international,
Chers partenaires,
Merci pour votre engagement, merci d’avoir mis toute votre passion et toute votre ambition dans ce projet.
Et merci à ce public complètement fou qu’on a découvert cet été et qui est à nouveau au rendez-vous ce soir !
Chers amoureux des Jeux, chers supporters des Bleus :
Ce n’est pas fini, on va encore vivre des moments dingues !
Ce n’est pas fini, nos athlètes tricolores ont encore besoin de vous !
Ce soir, l’Equipe de France est de retour, et elle est prête à battre tous les records !
Chers athlètes français,
Vous vous attendez ce moment depuis toujours, et vous allez avoir le plus beau des publics pour vous porter jusqu’aux podiums.
Ils ont répété leurs chants,
Ils ont maquillé leurs joues,
Ils ont préparé leurs drapeaux,
Ils vont vous faire sentir la force de tout un pays derrière vous !
Dear athletes of the world, these fans will be here for you too.
You are 4,400 Paralympians here in Paris.
You represent 168 delegations.
You are the best para athletes on the planet.
You inspire us, yes, but inspiration needs action.
So, like you, we’re determined to give everything - our heart, our soul and the best of France:
- Breathtaking venues,
- Unprecedented Ceremonies,
- And an atmosphere as crazy as your collective achievements.
The Paris 2024 team has been working for years to welcome you.
Our volunteers are ready to make this the most fun and festive revolution that France has ever seen.
Above all, you will find an entire country in love with the Games, which is so proud to host you for the very first time.
It’s the best return match in history that is starting tonight.
Chers athlètes,
Chers révolutionnaires de France et du monde entier,
Notre révolution commence ce soir !
Bienvenue aux Jeux Paralympiques de Paris 2024 !